Qui connaît François Genoud ? Dans L’Injuste, la dernière pièce qu’il joue au Théâtre de la Renaissance, Jacques Weber incarne un personnage historique aussi si sombre que méconnu. Suisse lausannois, devenu pro-nazi, éditeur de Mein Kampf, il s’est arrogé après la seconde guerre mondiale les droits d’auteurs d’Hitler ou de Goebbels. Négationniste, il s’est engagé auprès des nationalistes arabes les plus radicaux et des fronts de libération algériens ou égyptien. Cette pièce fictionnelle, imagine à la fin de sa vie, son interview par une journaliste israélienne.
Dans Shakespeare aussi il y a des immenses salopards. La différence c’est que le passé met à distance. Ce qui fait peur, c’est que François Genoud -banquier nazi- est un personnage récent. Il dit des choses qui peuvent faire écho à l’actualité. Jacques Weber
« C’est un monstre absolu » le qualifie Jacques Weber. Comment appréhender un tel personnage ? Comme les autres rôles répond l’acteur. « En même temps, c’est le fait même du théâtre » abonde-t-il. « Le théâtre est le lieu du cathartique par excellence. C’est un lieu qui ne répond pas à des questions mais qui interroge. Comment s’est construit le mal ? Ce personnage montre que le mal peut être extrêmement intelligent, clair, précis. Il met parfois le doigt sur des problèmes, des équivoques, des paradoxes. »
« Que peut-on faire par rapport à cette réelle régression démocratique ? »
Observateur attentif de notre époque, face au « noircissement de l’Europe », le comédien alerte sur la régression de notre démocratie, chauffée à blanc par ce qu’il appelle « la société du commentaire ». « Le commentaire est intéressant quand il y a une confrontation des opinions. Mais méfions-nous du commentaire qui crée l’évènement » met-il en garde. « Des faits divers, minimes au regard d’un ensemble, deviennent énormes et tout le monde s’en sert pour réveiller tel ou tel type d’opinion. Les commentaires sont dangereux car ils sont pulsionnels. Ils permettent à notre démocratie d’enfanter des monstres».
Aujourd’hui, quand le peuple vote, ce n’est plus une opinion, c’est une pulsion. C’est ce qui m’inquiète. Jacques Weber
«Que peut-on faire par rapport à cette réelle régression démocratique de l’heure ? » s’interroge Jacques Weber. S’en remettre à la sagesse ? C’est en tout cas l’une des quatre vertus du dôme Tournon que retient le comédien. « Tout part de la sagesse. La sagesse mène à la justice » conclue-t-il.
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