Ce samedi 6 décembre, dans le cadre de l’examen du projet de loi de finances 2026, les sénateurs ont adopté plusieurs amendements pour porter d’un à trois le nombre de jours de carence dans la fonction publique. La mesure, défendue par une partie de la majorité sénatoriale, une alliance de la droite et du centre, contre l’avis du gouvernement, est devenue ces dernières années un véritable marronnier budgétaire. Elle vise à aligner le secteur public sur ce qui se fait déjà dans le privé ; si la mesure est conservée dans la version finale du budget, les jours d’arrêt maladie des agents publics ne seront remboursés par l’Assurance maladie qu’à partir du quatrième jour chômé.
Les soutiens de la mesure ont fait valoir « le décrochage » entre le public et le privé en matière d’absences pour raison de santé, « avec en moyenne 14,5 jours dans le secteur public contre 11,7 jours dans le secteur privé en 2022 ». Cet écart a été mis en évidence dans un rapport conjoint de l’Inspection générale des finances et de l’Inspection générale des affaires sociales en juillet 2024. « Il s’agit de rétablir une inégalité et d’être cohérent », a défendu le sénateur Les Indépendants Pierre-Jean Rochette, auteur de l’un des amendements adoptés. « Tomber malade, c’est bien malheureux, mais que l’on soit dans le public ou dans le privé, on doit avoir le même traitement », a-t-il fait valoir.
Des jours de carence largement couverts dans le privé
David Amiel, ministre délégué chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l’État, a voulu dénoncer « une idée préconçue ». « Est-ce que les agents publics sont plus absents que ceux du privé ? Non. Quand on regarde l’évolution ces dernières années, l’écart d’absences a été divisé par six et nous sommes aujourd’hui quasiment sur le même taux d’arrêt maladie », a-t-il expliqué. Il a également rappelé qu’à la différence du secteur public, dans le privé « près de 70 % des salariés sont couverts par leur entreprise pour tout ou partie de ces trois premiers jours d’absence ».
En 2018, un premier jour de carence a été réinstauré dans la fonction publique, pour une économie estimée à 108 millions d’euros. L’allongement à trois jours du délai de carence devrait porter les efforts à 216 millions d’euros. Mais la gauche a reproché à la majorité sénatoriale « sa défiance vis-à-vis de la fonction publique et une vision idéologique qui affaiblit l’État plus qu’elle ne le renforce », selon la formule de l’écologiste Thomas Dossus. « En réalité, les agents essayent de tenir plus longtemps face à la maladie, et au final l’arrêt est plus long », a déploré sa collègue socialiste Annie Le Houérou.
Réduction du nombre d’agents
Par ailleurs, les sénateurs ont également adopté un amendement actant le non-remplacement d’un départ à la retraite sur trois dans la fonction publique. L’objectif : réduire les effectifs de 23 000 équivalents temps plein, pour une économie de 700 millions d’euros. Cette diminution avait déjà été évoquée par l’ex-Premier ministre François Bayrou, toutefois, les sénateurs ont souhaité exclure du dispositif les ministères des Armées, de l’Intérieur et de la Justice, dont le budget est actuellement fléché par des lois de programmation.
Le sénateur LR Claude Nougein, rapporteur pour la commission des Finances, évoquant « le problème de la suradministration de la France », a dénoncé le « laxisme » de certaines administrations en matière de réduction des effectifs. « Certains ministères arrivent à réduire le nombre d’effectifs en gardant la même efficacité, et d’autres nous disent que ça n’est pas possible », a-t-il regretté. La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a appelé à se méfier des effets de bord « d’une règle mécanique ». « On ne peut pas, d’un coup, réduire de 9 000 postes les effectifs de l’Education nationale sans anticipation », a-t-elle alerté.