La réécriture du budget devrait se jouer pour l’essentiel au Sénat, où le gouvernement dispose d’une majorité solide. C’est d’ailleurs en substance ce qu’était venu dire Michel Barnier, en visite devant le groupe LR fin octobre. Le Premier ministre avait indiqué à la droite sénatoriale que la Haute assemblée serait au centre des débats budgétaires.
Profondément remanié au fur et à mesure des débats ces derniers jours, le volet recettes du projet de loi de finances (PLF) a été rejeté ce 12 novembre par une majorité de députés (362 voix contre, 192 voix pour). Ni le socle commun ni le Rassemblement national n’étaient favorables aux modifications intervenues. À plusieurs reprises, le Nouveau Front populaire (NFP) a obtenu une série de victoires sur des amendements, insérant de nouvelles taxes dans le texte.
Bercy déplore une « overdose fiscale » à l’Assemblée nationale
Le ministre des Comptes publics, Laurent Saint-Martin, a dénoncé une « overdose fiscale », se chiffrant selon lui à 35 milliards d’euros. Le président LFI de la commission des Finances, Éric Coquerel, évalue les nouvelles recettes votées à 75 milliards, quand le rapporteur général du budget, Charles de Courson (Liot) les estime à 12 milliards d’euros, une fois retranchées les mesures « probablement euro-incompatibles, ou inconstitutionnelles ».
Conséquence du rejet de cette première partie, cela signe la fin des débats à l’Assemblée nationale en première lecture, puisque cette partie est indispensable au projet de loi. Le texte va donc être transmis au Sénat dans sa version initiale.
Le projet de loi repartira alors de zéro au palais du Luxembourg. Cette configuration marque une différence notable avec les deux dernières années, puisque même après avoir fait usage de l’article 49.3, le gouvernement avait pu reprendre certains amendements dans le passé. Dans ces circonstances inédites, la réécriture au Sénat revêt une autre importance. L’examen au Sénat doit commencer au Sénat le 25 novembre. Les débats se poursuivront jusqu’au jeudi 12 décembre, avec un vote solennel prévu dans l’après-midi ou en soirée.
De nouvelles méthodes de travail
Les méthodes de travail ont d’ailleurs évolué en amont, pour faciliter la cohérence des modifications à venir. Depuis octobre, un travail de coordination anime les différents rapporteurs budgétaires. Et depuis plusieurs jours, les principaux responsables des groupes du socle commun (Les Républicains, Union centriste, groupe RDPI à majorité Renaissance et Les Indépendants à majorité Horizons) se concertent.
Cette majorité élargie cherche à accorder ses violons en vue de l’examen budgétaire (relire notre article). Plusieurs dispositions devraient être retravaillés au Sénat. Le rapporteur général Jean-François Husson veut impulser « plusieurs milliards d’euros » d’économies supplémentaires. La chambre des territoires pourrait également chercher à alléger l’effort demandé aux collectivités territoriales. Le sénateur de Meurthe-et-Moselle, à la manœuvre ces derniers jours pour faire la lumière sur le dérapage du déficit public, doit dévoiler la position de la commission des finances sur le volet fiscal du projet de loi, ce mercredi.
Se sachant particulièrement attendus cette année, les groupes de la majorité pourraient être tentés de diminuer leur nombre d’amendements, pour fluidifier les débats après des débats souvent chaotiques à l’Assemblée nationale. Le débat budgétaire au Sénat l’an dernier avait été marqué par une inflation marquée du nombre d’amendements. 3760 ont été déposés, contre 3040 en 2022. « Force est de constater qu’il devient de plus en plus difficile d’assurer la qualité de nos débats dans un cadre constitutionnel aussi contraint que celui de l’examen de la loi de finances », avait regretté Gérard Larcher en décembre dernier, au terme des débats en première lecture.
Premier rendez-vous avec l’examen du projet de loi de financement de la Sécurité sociale
Mais c’est bien sur le PLFSS (projet de loi de financement de la Sécurité sociale) que le Sénat fera entendre en premier sa voix, comme tous les ans. Plusieurs dispositions devraient sensiblement évoluer, notamment les modalités de l’évolution des pensions de retraite en 2025, ou encore le niveau de cotisation des entreprises sur les bas salaires. Comme les députés n’ont pas pu se prononcer sur l’ensemble du projet de loi dans les temps, c’est également une version initiale qui a été transmise au Sénat, enrichie de plusieurs amendements retenus par le gouvernement.
Comme pour le PLF, la séance au Sénat devrait offrir une seconde chance pour certains amendements de l’Assemblée nationale qui n’auraient pas pu être examinés, si ces derniers sont repris par des collègues sénateurs.
Le PLFSS sera débattu en commission ce 13 novembre, avant d’être examiné en séance du 18 au 23 novembre. Un vote solennel se tiendra le 26 novembre.