France Unveils Austerity Plans In 2026 Budget
(Credit Image: © Stefano Lorusso/ZUMA Press Wire)/SIPA60035502_000001/Mark Avery - batch/2507160012

Budget 2026 : François Bayrou appelle à lutter contre la fraude soulignant les travaux du Sénat sur le sujet

Lors de l’annonce de ses grandes orientations budgétaires pour 2026, le Premier ministre François Bayrou s’est dit vouloir « être intransigeant avec ceux qui cherchent à frauder ». Il a par ailleurs annoncé déposer « à l’automne un projet de loi contre la fraude fiscale et sociale » et une mission « confiée à trois parlementaires ». La sénatrice centriste Nathalie Goulet s’est portée candidate.
Marius Texier

Temps de lecture :

6 min

Publié le

Mis à jour le

« Nous accentuerons la lutte contre la fraude en améliorant la détection de la fraude et surtout le recouvrement des fraudes et amendes », a déclaré hier François Bayrou lors de ses annonces sur ses grandes orientations budgétaires pour 2026. Si le Premier ministre s’est montré plutôt évasif sur le sujet, il a cependant annoncé vouloir déposer à l’automne un projet de loi contre la fraude fiscale et sociale avec une mission « confiée à trois parlementaires pour suivre la mise en œuvre de ce plan ». A n’en pas douter, François Bayrou devrait piocher les heureux élus au sein du Sénat après avoir souligné les « travaux menés » par la chambre haute sur la fraude fiscale.

Un « grand soir »

Particulièrement en pointe sur les sujets de fraude sociale et fiscale, la sénatrice centriste Nathalie Goulet a présenté sa candidature, dès l’annonce du Premier ministre, dans une vidéo postée sur X. Interrogée par Public Sénat, la sénatrice appelle à un « grand soir » sur la lutte contre les fraudes. « Le Premier ministre a été assez elliptique sur le sujet », regrette-t-elle. « Nous aurions de nombreuses propositions à lui soumettre, notamment sur les prix de transfert (prix des transactions transfrontalières entre sociétés), sur les paradis fiscaux et sur le blanchiment d’argent ». Au Sénat, la commission d’enquête conduite par Nathalie Goulet a estimé entre 38 et 58 milliards d’euros chaque année le montant du blanchiment d’argent en France.

En mars dernier, la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin estimait la fraude à hauteur de 20 milliards d’euros dont 13 milliards avaient pu être récupérés. La ministre souhaite doubler le montant détecté d’ici à 2029. Également présente ce mardi, la ministre du Travail et de la Santé, Catherine Vautrin, a affirmé que 13 milliards d’euros provenaient directement de la fraude sociale.

« Il s’agit seulement de refermer le robinet qui fuit »

Une étude du Haut conseil du financement de la protection sociale (HCFiPS) confirme le chiffre avancé par la ministre. Sur l’ensemble des fraudes sociales, près de 7 milliards d’euros proviendraient directement auprès de l’Urssaf dû aux cotisations éludées ou au travail dissimulé. « La fraude sociale se règle sur un temps court », précise Nathalie Goulet qui a déposé en 2020 une proposition de loi pour appliquer diverses mesures urgentes pour lutter contre les fraudes sociales. « Il s’agit seulement de refermer le robinet qui fuit ».

Concernant le montant de la fraude fiscale, les chiffres sont plus difficiles à déterminer comme l’indique la Cour des comptes. Néanmoins les estimations tablent sur un montant largement supérieur à celui présenté par Bercy (16,7 milliards) qui avoisinerait entre 60 et 80 milliards d’euros chaque année. Selon le syndicat Solidaires Finances publiques, ce montant pourrait aller jusqu’à 100 milliards d’euros.

« Stopper le mécanisme de fraude »

« Les montants sont importants, mais il faut surtout stopper le mécanisme de fraude », prévient Nathalie Goulet. Hier après les annonces, la sénatrice a eu l’occasion d’échanger avec Amélie de Montchalin lors d’une réunion en ligne. Elle assure lui avoir transmis des dispositifs pour lutter contre les fraudes : « Les mesures pour faire rentrer de l’argent prennent du temps, notamment en ce qui concerne l’aide aux entreprises ».

« La chasse aux niches fiscales »

François Bayrou a également déclaré vouloir agir sur les « niches fiscales et sociales qui profitent d’abord aux ménages les plus aisés et aux grandes entreprises ». Déjà en avril dernier, le président du groupe Modem à l’Assemblée nationale, Marc Fesneau, proche du Premier ministre, évoquait l’idée d’une réduction des 474 niches fiscales que compte la France, « dont 65 sont en cours d’extinction ». Selon la Cour des comptes, le coût des niches fiscales s’élevait à 83,29 milliards d’euros dans le budget 2024. « Il faut faire la chasse aux niches fiscales inutiles, inefficaces, en commençant par les dispositifs qui arrivent à extinction », a précisé François Bayrou lors de ses annonces.

Bien que légale, de nombreux économistes pointent le coût faramineux de certaines niches fiscales sans véritables contreparties. Pour certaines, ces niches fiscales s’apparentent à des effets d’aubaines qui profitent aux plus aisées. En avril dernier, Amélie de Montchalin estimait que raboter 10 % des niches fiscales pouvait « être un objectif » préférant un impôt bas plutôt qu’un système qui ne bénéficie qu’à certains.

Cum que coûte ?

« Au Sénat, nous avons toujours été très en avance et très allant sur les sujets de fraude », se félicite Nathalie Goulet. « Et en particulier au sujet des CumCum ». Révélée en 2018 dans une enquête internationale, la fraude aux arbitrages de dividendes, dite « CumCum », est un stratagème qui consiste pour certains actionnaires étrangers d’entreprises françaises à contourner l’imposition à la source sur les dividendes en déplaçant temporairement leurs actions auprès d’un acteur tiers, en l’occurrence une banque, contre une rétribution.

Dans la loi de finance 2025 et à l’initiative d’un amendement sénatorial, le Parlement a adopté un mécanisme pour combattre ces montages. Mais dès avril, l’exécutif fait passer un texte d’application qui « ajoute à la loi des cas de non-application de l’imposition ». « Cela vide largement de son effectivité le dispositif antifraude voté par le Parlement », a dénoncé la commission des finances.

Lors d’une visite inopinée le 19 juin au ministère de l’Economie, Jean-François Husson, le rapporteur général de la commission des finances du Sénat a découvert la pression exercée pour faire obstacle au texte du Parlement. « Plusieurs sources ont confirmé aujourd’hui que c’était la Fédération bancaire française qui était très directement intervenue dans la nouvelle rédaction », a-t-il précisé.

Selon plusieurs estimations, c’est environ 3 milliards d’euros de recettes qui s’échappent chaque année en raison de la fraude CumCum. Dans des estimations menées par l’université de Mannheim (Allemagne), le manque à gagner fiscal pour la France, due à la fraude des CumCum, se chiffrerait à 33 milliards d’euros sur la période 2000-2020.

Le texte du Sénat maintenu ?

Nathalie Goulet assure avoir obtenu gain de cause hier lors de l’entretien en ligne avec Amélie de Montchalin. « Le Premier ministre devrait annoncer suivre le texte qui a été voté au Sénat », s’est-elle réjouie. Un revirement du gouvernement qui s’explique peut-être par les déclarations de Jean-François Husson le mois dernier, après sa visite à Bercy : « Si ce texte n’était pas retiré, je ne vois pas comment il serait possible de demander aux Français de participer au redressement des comptes publics en 2026 », soulignait-il. « Comment d’un côté, demander 40 milliards d’euros aux citoyens français, et laisser de l’autre perdurer la fraude opérée par les banques ? »

Partager cet article

Dans la même thématique

Budget 2026 : François Bayrou appelle à lutter contre la fraude soulignant les travaux du Sénat sur le sujet
11min

Économie

Jours fériés, retraités, niches fiscales : Amélie de Montchalin assaillie de questions au Sénat après le grand oral de François Bayrou

Auditionnée par la commission des finances du Sénat, la ministre des Comptes publics souligne que le moment est celui du « point de départ de la construction du compromis » sur le budget 2026. Ferme sur l’objectif de réduction, elle s’est cependant montrée ouverte à des évolutions et à la réflexion sur un certain nombre de sujets.

Le

Mairie, FRANCE
8min

Économie

Budget : les collectivités locales ponctionnées de 5,3 milliards en 2026, un chiffre qui ne passe pas au Sénat

Les économies demandées aux collectivités territoriales devraient passer de 2,2 milliards en 2025 à 5,3 milliards en 2026, selon le plan d’économie présenté par François Bayrou mardi 15 juillet. Un montant qui fait bondir aussi bien à droite qu’à gauche de l’échiquier politique au Sénat. Chaque camp rappelle la part limitée des territoires dans le déficit et leur rôle prépondérant dans l’investissement public.

Le

Budget 2026 : « Les deux jours fériés, cela doit faire partie d’un dialogue avec les partenaires sociaux », estime le rapporteur général du Sénat
6min

Économie

Budget 2026 : « Les deux jours fériés, cela doit faire partie d’un dialogue avec les partenaires sociaux », estime le rapporteur général du Sénat

Le rapporteur général du budget au Sénat, Jean-François Husson (LR), constate que le Premier ministre a repris des éléments de la contribution sénatoriale, mais qu’il y a des « divergences », notamment sur les collectivités. Sur celle de la suppression de deux jours fériés, il précise que la question « n’est pas mineure ». Côté Sécurité sociale, la rapporteure générale Elisabeth Doineau constate que le plan est « à la hauteur des efforts à faire ».

Le