La présentation d’un budget lundi au plus tard, date limite pour assurer son adoption avant le 31 décembre selon le calendrier encadré par la Constitution, apparaît comme l’enjeu crucial des consultations de dernière minute qui se jouent autour de Sébastien Lecornu. En s’exprimant à nouveau ce mercredi matin sur le perron de Matignon, 48 heures après sa démission inattendue, le chef du gouvernement démissionnaire est venu rendre compte de ses derniers entretiens. La veille, il avait échangé avec des responsables du bloc présidentiel (Renaissance, Modem, Horizons), des Républicains, des députés LIOT (Groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires) ou encore de Place Publique.
Plusieurs enseignements sont à en tirer. Le Premier ministre sortant a confirmé la « volonté d’avoir pour la France un budget avant le 31 décembre ». Il ressort également de ces discussions l’esquisse d’un effort budgétaire plancher. « Tout le monde s’accorde à dire, en tout cas dans les rendez-vous que j’ai eus hier, que la cible de déficit public doit être tenue en dessous de 5 % du déficit, et c’est-à-dire en clair entre 4,7 et 5 % de manière définitive », a-t-il ajouté.
Un effort de réduction du déficit de 0,4 point minimum
Autrement dit, la cible du déficit évoquée ce matin est nettement plus basse que celle qui était encore défendue cet été par son prédécesseur François Bayrou. Pour rappel, le déficit public est attendu à 5,4 % du PIB en 2025. C’est le point de départ de l’effort. François Bayrou avait fixé l’objectif d’un retour à 4,6 % pour l’année 2026. Ce chiffre figurait par ailleurs en avril dans les engagements pris par la France devant l’Union européenne. Il est inscrit dans le rapport annuel d’avancement, concernant la réalisation du plan budgétaire et structurel à moyen terme.
L’ajustement budgétaire à opérer en 2026 aurait donc représenté, selon cette trajectoire, environ 24 milliards d’euros, un dixième de point de PIB valant 3 milliards d’euros. Pour être plus précis, l’effort budgétaire doit également tenir compte des 3,5 milliards de budget supplémentaire pour la Défense, soit un effort global de 27,5 milliards d’euros. L’effort des 44 milliards d’euros, souvent mis en avant depuis cet été, correspondait à l’effort à réaliser en se basant sur la croissance naturelle des dépenses, c’est-à-dire le « tendanciel ».
Le 26 septembre, dans une interview au Parisien, Sébastien Lecornu avait déjà assoupli l’objectif d’un déficit ramené à 4,6 %, en annonçant vouloir présenter un « projet robuste aux alentours de 4,7 % ». Un effort relâché au niveau de 5 % du PIB, soit le minimum évoqué par ses interlocuteurs hier, reviendrait à diminuer de moitié la cible défendue ces derniers mois, avec une réduction de 0,4 point du PIB. Cela représenterait 12 milliards d’euros d’économies, soit un effort de 15,5 milliards, investissements additionnels dans la Défense inclus.
Ce relâchement permettrait de financer certaines demandes de la gauche – comme la suspension de la réforme des retraites – ou annuler certaines économies dans le projet de budget. Et ainsi d’aboutir à un accord de non-censure et donc une voie de passage pour le budget, comme en février dans le cas des textes budgétaires de l’année 2025.
Le mois dernier, Sébastien Lecornu avait d’ailleurs averti que l’absence de budget fin décembre pour être synonyme de dérapage. « Si la France devait ne pas avoir de budget d’ici la fin de l’année, que chacun soit bien conscient que nous ne serions ni à 4,6, ni à 4,7 mais peut-être à 6 % », avait-il mis en garde.