« C’est impensable et inacceptable » : face aux efforts budgétaires demandés aux collectivités, les sénateurs montent au créneau
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Le déficit public de la France a bien atteint 5,5 % du PIB pour l’année 2023, confirme ce mardi l’INSEE. Un dérapage auquel le ministre de l’Économie, convié le même jour au Sénat pour une audition sur la lutte contre le narcotrafic, n’a pas manqué de réagir, plaidant pour « une prise de conscience collective de la nécessité de réduire les dépenses dans tous les champs de l’action publique : le social, l’État et les collectivités territoriales. »
Après l’annonce d’un plan d’économies de 10 milliards d’euros sur les dépenses de l’État, ce sont donc les collectivités qui sont dans le viseur. Des pistes d’économies devront être évoquées le 9 avril prochain, à l’occasion d’une réunion du Haut conseil des finances publiques locales. « Tout cela se fera dans le dialogue, la concertation, et sur la base d’une libre décision des collectivités territoriales », tente de rassurer Bruno Le Maire.
« Les collectivités ne sont pas le problème des finances publiques nationales »
Des déclarations qui peinent à convaincre au Sénat, qui dénonçait la semaine dernière la « rétention d’informations » de Bercy sur le dérapage du déficit public. « Depuis septembre dernier, nous savons que le gouvernement va dans le mur. Maintenant que l’on se crashe, on va se laisser le temps de rencontrer les collectivités pour avancer petit à petit ? Je n’y crois pas », dénonce Thierry Cozic, sénateur socialiste et vice-président de la commission des finances.
Pour préparer le terrain, mi-mars, le gouvernement a commandé à la Cour des comptes un rapport sur la participation des collectivités territoriales au redressement des finances publiques. Auditionné par la commission des finances de l’Assemblée le 13 mars, le vice-président de l’association des maires de France a devancé la question posée par le gouvernement à la juridiction financière. « Le bloc local ne représente qu’environ 10 % de la dépense publique et les collectivités locales environ 9 % du total de la dette, tout en réalisant 70 % de l’investissement public. Les collectivités ne sont donc pas le problème des finances publiques nationales », défend André Laignel.
Un coup de rabot qui passerait d’autant plus mal que, ces dernières années, les collectivités ont dû composer avec la suppression de la taxe d’habitation et, depuis 2024, avec la fin progressive de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises. « C’est la double peine. On va demander des efforts aux collectivités alors qu’elles ont perdu 80 % de leurs recettes fiscales. Aujourd’hui, l’autonomie financière des collectivités est déjà remise en question, elles n’ont plus de marge de manœuvre », déplore Thierry Cozic, sénateur socialiste et vice-président de la commission des finances.
« Les normes nouvelles imposées aux collectivités représentent 2 milliards et demi de dépenses »
« C’est impensable et inacceptable », abonde la présidente de la commission des affaires économiques Dominique Estrosi Sassone, « on ne peut pas faire des demandes d’économies à l’emporte-pièce, les collectivités sont déjà dans une situation difficile ». Pour palier ce manque de moyens, le Sénat avait fait voter une rallonge supplémentaire de 437 millions d’euros pour venir en soutien aux collectivités pour 2024. Des amendements que le gouvernement n’avait finalement pas retenus, portant la hausse de la dotation aux collectivités à 320 millions.
« L’argent dépensé par les collectivités est utile et efficace, il fait tourner des services au nom de l’État : les écoles, les transports… », défend la sénatrice centriste Françoise Gatel. Malgré les investissements ambitieux demandés aux collectivités, aussi bien en matière de transition écologique que de déploiement des services publics, la présidente de la délégation aux collectivités territoriales estime que des pistes d’économies existent. « Entre 2017 et 2022, les normes nouvelles imposées aux collectivités représentent 2 milliards et demi de dépenses. Nous savons que la surenchère normative génère des coûts et empêche d’agir, étaient-elles toutes indispensables ? », interroge Françoise Gatel.
Une demande de « lisibilité » budgétaire que la sénatrice portera le 4 avril prochain auprès du Premier ministre, invité du premier anniversaire de l’adoption de la charte en faveur de la simplification des normes portant sur les collectivités. « Si le gouvernement s’engage dans cette simplification, il verra que les collectivités sont dotées d’une véritable intelligence de la dépense », espère Françoise Gatel.
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