Emmanuel Macron visits Ligny-en-Barrois, Meuse, and the Daimler Buses plant, ahead of the Choose France Summit
Crédits : Fred MARVAUX-POOL/SIPA

Choose France 2025 : quels sont les enjeux du sommet ?

Du 19 au 21 mai se déroule la 8ème édition du sommet « Choose France » au château de Versailles qui réunit des investisseurs étrangers pour les convaincre d’investir en France. Si les économistes saluent la capacité du pays à attirer les investisseurs, ils soulignent que cela ne se traduit pas nécessairement en création d’emplois.
Marius Texier

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« France, univers de création », voici le thème de la 8ème édition du sommet « Choose France » venant saluer le savoir-faire français. Et quoi de mieux que de le célébrer au château de Versailles, véritable vitrine française ?

« C’est un événement qui permet à la fois de rencontrer des industriels et des investisseurs étrangers afin qu’ils investissent en France, mais également de communiquer auprès du grand public », définit David Cayla, maître de conférences à l’Université d’Angers. Cette année, ce sont plus de 200 patrons du monde entier qui ont fait le déplacement en France pour un investissement total de 20 milliards d’euros dans une cinquantaine de projets a annoncé Emmanuel Macron vendredi dernier.

Pour David Cayla, « Choose France » est une traduction parfaite de la stratégie d’Emmanuel Macron. « Il a pris acte de la mondialisation. Au lieu de vouloir peser sur les règles du jeu comme ce fut la stratégie de la France durant plusieurs années, il souhaite désormais jouer aux règles du jeu ». Devant le parterre de patrons réunis dans le château de Versailles, Emmanuel Macron a rappelé ses réformes de simplification du marché du travail et de baisse de la fiscalité. Il a souhaité poursuivre la simplification en proposant de revenir sur la directive européenne sur le devoir de vigilance qui impose un respect de l’environnement et des droits humains aux entreprises.

« 20 milliards d’euros c’est énorme », juge Lionel Nesta, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). « Emmanuel Macron a raison de promouvoir les investissements étrangers en France, il a un rôle de vrp ». Emmanuelle Auriol, professeure d’économie à la Toulouse School of Business, abonde dans le même sens : « Dans un contexte de baisse des investissements en France et en Europe ces dernières années, 20 milliards d’euros ce n’est pas négligeable ».

« Un déficit généralisé d’investissements en Europe »

A l’image de l’Europe qui a enregistré une baisse de 5 % de ses investissements étrangers l’an dernier, le territoire national accuse également d’un recul des investissements étrangers de 14 %. « Il y a un déficit généralisé d’investissements en Europe », pointe Lionel Nesta qui salue la capacité d’Emmanuel Macron à lever des fonds dans ce contexte. « L’investissement public est plus facile à relancer, mais pour ce qui est de l’investissement privé, c’est une autre paire de manches ».

Le pays le plus attractif d’Europe en volume

Si la France pâtit également du recul des investissements étrangers, c’est elle qui s’en sort le mieux parmi ses voisins européens. Selon un baromètre du cabinet Ernst et Young, l’hexagone se classe, pour la sixième année d’affilée, comme le premier pays européen pour les investissements étrangers (1025 projets) devant le Royaume-Uni (853) et l’Allemagne (608). Pour Emmanuel Auriol, cette attractivité s’explique par « l’efficacité des services » du pays et ses nombreuses infrastructures : « Le pays est maillé en infrastructures que ce soit au niveau des routes, des services de liaison ou des énergies. Les investisseurs apprécient cela. De plus, nous avons beaucoup de secteurs dans lesquels nous excellons comme la défense, l’aéronautique ou encore l’intelligence artificielle ».

Dévoilé en avril, un baromètre du cabinet international Kearney place même la France en septième place mondiale de l’attractivité économique et à la troisième place en Europe.

Mais pour David Cayla, la France est le pays le plus attractif en termes de volume seulement. « Lorsque nous nous comparons à des pays avec une économie similaire comme l’Allemagne ou le Royaume-Uni alors oui nous sommes les plus attractifs », reconnaît-il. « Seulement, en proportion des investissements par rapport à la taille des économies, nous ne sommes pas le pays le plus attractif, l’Irlande est bien au-dessus de nous ».

Une faible création d’emplois

Mais si la France peut s’enorgueillir d’être si attractive, cela ne se traduit pas forcément au niveau de l’emploi. « Il est vrai que ce ne sont pas des projets d’investissements qui créent beaucoup d’emplois », confie Emmanuelle Auriol. « Les investissements portent sur des secteurs où les salaires sont très élevés ». Cette année, les différents investissements s’orientent principalement vers les secteurs de la technologie, de la finance et du tourisme.

Cependant, lorsque l’on regarde combien ces investissements créent d’emplois, la France fait grise mine. Dans l’IA par exemple, on compte près de 2 000 emplois pour 41 projets d’investissements tandis qu’en Espagne c’est 5 000 emplois pour 24 projets. Pour un projet d’investissement, on compte en moyenne 125 emplois créés en Espagne contre 30 en France. Cette situation s’explique en partie par le coût du travail élevé en France par rapport au reste du continent.

« Un pognon de dingue »

Depuis 2018 et la première édition de « Choose France », ce n’est pas moins de 47 milliards d’euros qui ont été investis en France pour un total de 178 projets. Dans une vidéo publiée dimanche sur X, Emmanuel Macron a pointé, ironiquement, « un pognon de dingue » récolté au cours des différentes éditions du sommet faisant référence à ses propos polémiques sur les minimas sociaux en 2018.

Cette année, le fonds d’investissement américain Prologis a promis près de 6,4 milliards d’euros d’investissements et la création de 3 600 emplois. Amazon a également annoncé vouloir investir près de 300 millions d’euros et la création de 1 500 emplois. Selon l’AFP, Emmanuel Macron va également rencontrer le magnat mexicain Carlos Slim, la présidente du constructeur automobile chinois BYD, le patron de l’entreprise saoudienne Qiddiya, ainsi que des chefs d’entreprise sud-coréens.

Dans un contexte de hausse des droits de douane américains et de crise politique nationale, convaincre les grands patrons étrangers d’investir en France s’avère être une tâche difficile. Pour David Cayla, c’est l’édition 2026 qui risque d’être décevante : « Cette année, la plupart des accords ont été négociés en amont », souligne-t-il. « Mais dès l’année prochaine, nous risquons de voir les investissements américains faiblir d’autant qu’Emmanuel Macron n’a plus la main sur les questions fiscales avec sa majorité relative. Cela n’incite pas à investir ».

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