Auditionnés par la commission des Affaires économiques du Sénat ce mercredi 30 octobre, les acteurs des filières spiritueux ont prévenu qu’aucun futur n’est envisageable pour eux si les surtaxes chinoises ne sont pas supprimées. Ils misent sur le déplacement de Sophie Primas, ministre du commerce extérieur, en Chine la semaine prochaine pour plaider leur cause.
Colère des agriculteurs : les solutions du Sénat
Par Steve Jourdin
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Sur les retraites : il n’y a plus qu’à…
Cela sonne comme une évidence. « Quand le Parlement adopte une loi, le gouvernement doit l’appliquer ! » gronde Laurent Duplomb. « Sur les retraites, on a adopté une loi en 2023, l’exécutif devait détailler les modalités de mise en œuvre de la réforme dans les trois mois. Aujourd’hui, on apprend que ça n’est toujours pas prêt ! » regrette le sénateur LR de Haute-Loire, agriculteur de profession. Le Parlement a en effet adopté en 2023 une proposition de loi afin de revaloriser les retraites des agriculteurs. La réforme n’entrera en vigueur qu’en 2026, et prévoit de calculer les pensions sur les 25 meilleurs années de revenus. Mais le gouvernement devait publier un rapport sur les différents scénarios de l’application des mesures, ce qu’il n’a pour l’heure toujours pas fait.
« Comme d’habitude on s’essuie les pieds sur le Parlement, comme un paillasson ! » peste Laurent Duplomb, qui reconnaît néanmoins que des choses ont été faites sous Emmanuel Macron. En 2020, une loi a été adoptée pour revaloriser les retraites. Le texte prévoyait une augmentation des pensions à 85 % du Smic, contre 75 % auparavant. « Rien de plus normal, il s’agissait de la reconnaissance de la nation envers ceux qui travaillent toute leur vie pour un revenu de misère et qui touchent une retraite de misère en fin de parcours » selon le sénateur LR.
Mettre fin à la « surtransposition des normes européennes »
Mais le compte n’y est pas selon la droite sénatoriale, qui fait 42 propositions pour sortir de la crise actuelle. Pour le groupe LR, l’urgence est de mettre fin à la surtransposition des normes européennes. Plusieurs catégories de mesures sont attendues, notamment la réintroduction de la cinquième famille des néonicotinoïdes, l’acétamipride. « Son interdiction a mis la filière betterave dans le corner, les exploitations ont fermé les unes après les autres alors qu’on importe encore des produits de Belgique et d’Allemagne qui eux ont le droit de recourir à ce néonicotinoïde », remarque Laurent Duplomb.
Autre proposition : revenir sur le doublement des zones des non-traitement (ZNT). Définies par arrêté préfectoral, il s’agit de distances à respecter en bordure d’un point d’eau au-delà desquelles les produits phytosanitaires ne peuvent pas être utilisés. « Aujourd’hui, on double la distance de ces zones par rapport à ce que prévoit l’Union européenne. Cela hystérise les débats. D’autant plus que nous sommes le seul pays d’Europe à exiger des chartes départementales pour fixer ces distances », selon l’élu de la Haute-Loire. Souvent, ces chartes font l’objet de bras de fer juridiques devant le tribunal administratif, sur fond de conflit entre les associations environnementales et les exploitants.
Les sénateurs LR veulent également supprimer l’OFB, l’Office français de la biodiversité. Un organisme qui est « devenu la police religieuse de l’environnement ! » pour Laurent Duplomb. Créé en 2020, l’OFB est issu de la fusion entre la police de l’eau et des milieux aquatiques et l’Office national de la chasse et de la faune sauvage (ONCFS). Or, cette fusion n’aurait pas tenu compte des évolutions des campagnes « Les fonctionnaires de l’OFB sont toujours armés, alors qu’il n’y a aujourd’hui presque plus de braconnage. Ils arrivent sur des exploitations agricoles avec leurs armes pour verbaliser des agriculteurs qui ont leur malheur de couper des buissons de façon non réglementaire. Est-ce qu’il y a besoin d’armes pour cela ? Et est-ce qu’on a besoin de quatorze règlements différents sur la taille des haies ? »
Stop à la « stigmatisation »
Pour les sénateurs LR, il y a aussi urgence à mettre fin à l’ « agribashing ». Dans leur viseur : certaines associations de défense de l’environnement. « Est-ce que vous accepteriez à titre privé que l’on vous mette une caméra dans la salle de bain, quand vous vous lavez les dents pour vérifier que vous coupez bien le robinet après ? C’est ce que l’on fait aujourd’hui aux exploitants agricoles ! » dénonce Laurent Duplomb, qui cite l’association L214 et les procédés utilisés pour alerter sur la maltraitance animale.
Les sénateurs demandent le durcissement des sanctions pénales contre les personnes coupables d’intrusion dans les exploitations, la fin de la défiscalisation des dons pour toutes les associations coupables d’infraction, ou encore la suppression de la plateforme Phytosignal utilisée pour dénoncer les actes répréhensibles des agriculteurs.
Une simplification administrative
Selon le groupe LR, toutes ces mesures doivent être accompagnées d’un grand plan de simplification des normes. « Il faut abandonner le plan Ecophyto 2030, le système du Green Deal à la Pascal Canfin, ça suffit ! » estime Laurent Duplomb. « La France pense qu’elle doit donner des leçons de bonne conduite à toute l’Europe, et se permet de faire des plans contre les produits phytosanitaires en espérant les imposer au reste de l’Europe ». Le plan Ecophyto 2030 prévoit de réduire de moitié l’utilisation des substances chimiques d’ici à 2030 par rapport à 2015-2017. Alors que le dispositif a fait l’objet de nombres consultations depuis plusieurs semaines et qu’il devait être présenté à la fin du mois, aucun calendrier définitif n’a pour l’heure été révélé par le gouvernement. Outre l’abandon définitif de ce plan, les sénateurs demandent la levée de l’interdiction des rabais pour les agriculteurs sur les produits phytosanitaires.
Autant de mesures qui n’ont pour l’heure pas suscité la curiosité du gouvernement. « Tous les journalistes m’appellent pour connaître nos propositions, mais je n’ai pour le moment reçu aucun coup de fil de Marc Fesneau ou de Gabriel Attal. Peut-être n’ont-ils pas mon numéro ? » fait mine de s’interroger Laurent Duplomb.
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