Conditionnement du RSA : « Ce n’est ni du travail gratuit, ni du bénévolat obligatoire », assure Olivier Dussopt

Auditionné par la commission des Affaires sociales, Olivier Dussopt a précisé le contenu du projet de loi Plein emploi, qui entérine la transformation de Pôle Emploi en France Travail, et conditionne le RSA à 15h ou 20h « d’accompagnement » par semaine. Le texte sera discuté du 10 au 13 juillet en séance au Sénat.
Louis Mollier-Sabet

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Ce sera le dernier projet de loi de la session parlementaire au Sénat. Le texte sur le plein-emploi sera en effet examiné à la chambre haute du 10 au 13 juillet prochain, et la commission des Affaires sociales démarrait ce mercredi ses travaux en auditionnant Olivier Dussopt. Le ministre du Travail, du Plein-emploi et de l’Insertion a donc présenté un projet de loi dont on connaît les contours depuis le Conseil des ministres du 7 janvier dernier. Assez peu bousculé, le ministre a surtout du répondre à des questions sur la future articulation entre l’organisme France Travail – qui devrait remplacer Pôle emploi – et les conseils départementaux qui doivent gérer le RSA.

Un projet de loi financé par la dynamique de l’emploi et des cotisations sociales

Sur le plan du financement, notamment, l’accroissement des moyens visant à accompagner les allocataires du RSA visé par le gouvernement, qui incombe en théorie aux départements, devrait en partie être compensé par France Travail. « La loi ne prévoit pas le financement [de cet accompagnement]. L’Etat doit investir et accompagner via France Travail pour donner plus de moyens aux Conseils départementaux en faveur de l’insertion. Cela relève des lois de finances et des conventions avec l’Unedic, mais une partie des moyens de France Travail sera fléchée vers les Conseils départementaux » a ainsi assuré Olivier Dussopt.

Le ministre du Travail se veut rassurant : les sources de financement ne devraient pas manquer vu la dynamique actuelle de l’emploi. « Pour cet accompagnement, nous aurons besoin de 300 à 500 millions en 2024. Dans le cadre du projet de loi de finances, il y a des crédits affectés au financement de Pole Emploi, ils peuvent être augmentés. 80 % du financement de Pole Emploi vient de l’Unedic, qui verse 11 % de ses recettes. Vu la dynamique de l’assiette [du nombre de personnes qui cotisent à l’Unedic], cela fait 400 millions supplémentaires sans changer le taux en 2024. L’Unedic est passé d’un déficit de 2 milliards sur les dix dernières années à un excédent de 4,2 milliards cette année. On serait à un excédent de 8,7 milliards en 2024 et entre 10 et 18 milliards en 2027 », détaille le ministre, sous-entendant que les recettes ne manqueront pas pour alimenter ce type de dispositifs.

« Cela pourrait aller du passage du permis de conduire à la recherche d’un logement en passant par du job dating ou des formations »

Parce que c’est bien le point chaud du projet de loi : le gouvernement veut mettre en place un « accompagnement » supplémentaire des allocataires du RSA, représentant un volume horaire de 15 à 20h par semaine. « 42 % des allocataires sont encore au RSA sept ans après une première inscription. 33 % des allocataires retrouvent un emploi sept ans après leur inscription, plus souvent précaire que stable », explique le ministre pour justifier la mesure. « Il faut retrouver l’esprit du RMI de 1988, avec 80 % du financement qui va aux allocations et 20 % à l’insertion », poursuit-il. Pour ce faire, l’exécutif mise sur un « contrat d’engagement réciproque » entre les allocataires et l’administration, et qui comprendrait les fameuses « 15h à 20h d’activité » qu’avait évoquées Emmanuel Macron pendant la campagne électorale.

Une mesure dont les contours n’étaient pas très clairs au départ et qu’Olivier Dussopt à tenu à préciser pour convaincre les sénateurs que ce n’était ni « du travail gratuit », ni du « bénévolat obligatoire. » D’abord sur la nature des activités concernées, le ministre entend « déterminer avec les allocataires le type d’action », qui pourrait aller « du passage du permis de conduire à la recherche d’un logement en passant par du job dating ou des formations. »

Pas de radiation, mais « suspension » du RSA en cas de non-respect des engagements

Ensuite, ce contrat devra « tenir compte de l’âge de l’allocataire, de la formation, et des freins en termes de mobilité, de logement, de garde d’enfants et de l’offre d’insertion et de formation » pour être signé. Une fois signé seulement, la sanction pourrait « se mettre en œuvre » en cas de non-respect des engagements définis. « Parfois on semble croire que l’on conditionnerait l’accès du RSA à la signature du contrat. Mais la sanction viendrait après l’examen de l’éligibilité du RSA », a ainsi assuré Olivier Dussopt.

Et si une sanction devait être prononcée, ce ne serait pas une radiation, explique le ministre du Travail, mais « une suspension le temps que les engagements soient tenus. » « Ce n’est donc pas irréversible, et c’est plus rapide qu’une réunion du conseil pluridisciplinaire [nécessaire pour une radiation] », a-t-il ajouté. La gauche de l’hémicycle ne partagera probablement pas ce point de vue en séance dans trois semaines.

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