Déficit public : « Le gouvernement ment à la représentation nationale », s’insurge Luc Carvounas

Après l’annonce d’un déficit public plus élevé que prévu, les élus de tous bords tirent à boulets rouges sur la politique économique du gouvernement. A gauche, à l’instar du maire d’Alfortville Luc Carvounas, on s’inquiète du spectre d’une politique de rigueur à venir.
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Le déficit public de l’Etat pour 2023 s’avère bien plus important que ce qui était annoncé initialement : il manque 18 milliards d’euros supplémentaires dans les caisses de l’Etat par rapport aux dernières prévisions, pour un déficit public qui représente 5,5 % du PIB. Un chiffre colossal, puisque comme le rappelle le sénateur Les Républicains et rapporteur de la commission des finances Jean-François Husson, en 2022, à l’époque où « l’on sortait d’une crise sanitaire historique », « on était en dessous de ce montant », signe selon l’élu que le gouvernement est « en échec ». Mais le gouvernement aurait-il pu prévoir un tel déficit, qui porte désormais la dette à 110,6 % du PIB ? L’exécutif a déjà été accusé par Les Républicains d’avoir manqué de sincérité dans son dernier projet de loi de finances. Mais c’est cette fois un élu de gauche, le maire (PS) d’Alfortville, Luc Carvounas, qui assure que le gouvernement « ment à la représentation nationale ».

 

 

Inquiet pour le modèle social

 

Et l’ancien député de mentionner le fait que Claude Raynal, le président de la commission des finances s’est rendu « à Bercy pour juger sur pièce » et s’est rendu compte que « les services de l’Etat avait tiré la sonnette d’alarme en plein débat sur le projet de loi de finances ». « On voit bien que tout cela n’est pas fait en grande transparence », insiste Luc Carvounas, également président de l’Unccas (Union nationale des centres communaux d’action sociale). Face à cette situation économique délicate, le gouvernement promet de ramener le déficit sous la barre des 3 % le plus vite possible. Pour cela, Bruno Le Maire a déclaré la guerre à « l’Etat providence », modèle social où l’Etat intervient dans de nombreux domaines de la vie des citoyens pour leur fournir des prestations sociales. Issue de la seconde guerre mondiale, ce modèle repose sur des dépenses importantes de l’Etat, et est donc coûteux. Le ministre de l’Economie veut remplacer l’Etat providence par un « Etat protecteur » : la réduction du déficit public et de la dette passe nécessairement par moins de dépenses, selon Bruno Le Maire. Une façon d’aborder le problème qui ne convainc pas du tout Luc Carvounas. « Je suis très inquiet quand j’entends Bruno Le Maire dire qu’il faut repenser le modèle de notre financement social. Ça veut dire quoi ? La TVA sociale ? Mais ce sera donc pour tout le monde, y compris les retraités qui ont déjà du mal à finir leur fin de mois. Tout ça n’est pas responsable, j’ai l’impression que ce gouvernement n’a pas de vision ». Car pour réduire le déficit public, le gouvernement a deux leviers en main : réduire les dépenses de l’Etat ou augmenter ses recettes, et donc les impôts. Or jusqu’à présent, Bruno Le Maire exclut totalement d’augmenter les impôts.

 

 

Augmenter les impôts plutôt que réduire les dépenses

 

Un positionnement qui, selon Luc Carvounas, confine à la posture, voire à « l’idéologie ». Bruno Le Maire, ce n’est pas Deus ex machina, ce n’est pas lui qui décide tout seul, il y a un Parlement », rappelle l’édile d’Alfortville, qui recense d’ailleurs d’autres sons de cloche au sein de la majorité : « J’écoute Yaël Braun Pivet, j’écoute François Bayrou, des voix s’élèvent ». Ces derniers se montrent favorables à une taxation des superprofits. Un point de convergence avec Luc Carvounas. Le maire socialiste « ne comprend pas pourquoi » le gouvernement « se refuse » par principe à cette idée. Je vous donne un exemple très simple. Total l’année dernière, c’est 21 milliards. Presque 16 milliards rendus aux actionnaires en dividendes. Pourquoi dans ce pays on va faire peser l’effort sur les collectivités, et sur les citoyens ? Pourquoi ne pas aller vers l’entreprise qui se gave ? C’est de l’idéologie ! » Plus à droite, le ministre de l’Economie a pourtant quelques soutiens. Dans une tribune au Figaro, une centaine de maires et d’élu locaux affirment que « Bruno Le Maire a raison » de vouloir réduire les déficits sans augmenter les impôts. « Bravo, Bruno Le Maire a au moins cent amis pour faire sa campagne en 2027, je n’ai rien d’autre à dire », ironise Luc Carvounas. « Bruno Le Maire est le ministre de l’Economie de ce pays depuis 7 ans, il a eu le temps d’ailleurs d’écrire pas mal de bouquins, et on voit ce matin le résultat des déficits », se désole l’élu socialiste.

 

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