Fraudes « CumCum » : le rapporteur général du Sénat à Bercy pour comprendre pourquoi un dispositif anti-fraude a été « vidé de son effectivité »

Le sénateur Jean-François Husson (LR) s’est rendu au ministère de l’Économie et des Finances ce 19 juin, pour réaliser un contrôle sur pièces et sur place. La commission des finances cherche à comprendre pourquoi le gouvernement a affaibli la portée d’un dispositif de lutte contre la fraude aux arbitrages aux dividendes (CumCum), voté par le Parlement.
Guillaume Jacquot

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Nouvelle descente du rapporteur général de la commission des finances au Sénat, Jean-François Husson, à Bercy. Cette fois, il n’est pas question de données sur les finances publiques, mais de comprendre pourquoi le gouvernement a « introduit une brèche » dans un dispositif de lutte anti-fraude adopté dans la dernière loi de finances, à l’initiative du Sénat.

Depuis plusieurs semaines, les sénateurs considèrent que leur disposition, votée l’hiver dernier pour combattre les montages « CumCum », la fraude aux arbitrages de dividendes, a été amoindrie dans sa portée par l’exécutif. Un texte d’application « ajoute à la loi des cas de non-application de l’imposition », ce qui « vide largement de son effectivité le dispositif anti-fraude voté par le Parlement », dénonce la commission des finances.

« Le gouvernement a, une nouvelle fois, contourné la volonté du législateur »

Les montages « CumCum », révélés au grand jour au moment des révélations de l’affaire dite des « CumEx Files », reviennent à contourner l’impôt sur les dividendes dû par les porteurs étrangers d’actions d’entreprises françaises. Un actionnaire transfère ses titres à une entité, en France ou à l’étranger, souvent une banque, avant de recevoir des dividendes, et dans le but d’éviter leur imposition à la source. La banque rend ensuite les titres et les dividendes au propriétaire, moyennant une commission. La France accuse 33 milliards d’euros de manque à gagner sur vingt ans à cause de ce type de schéma fiscal.

Fin 2024, le Sénat a adopté à l’unanimité un dispositif pour combattre ce type de montage. L’article a survécu dans la version finale du budget 2025. En 2018, la haute assemblée avait déjà voté un dispositif en 2018, mais ce dernier avait été « vidé de sa substance ».

« Ce qui est très désagréable — et c’est un euphémisme — c’est qu’après cette adoption, y compris en commission mixte paritaire, là aussi à l’unanimité, le gouvernement a, une nouvelle fois, contourné la volonté du législateur. Ce n’est pas acceptable. Sauf erreur de ma part, le Parlement est souverain lorsqu’il vote la loi, et surtout lorsqu’il s’agit du budget », a fait savoir Jean-François Husson (LR), ce matin juste avant son opération de contrôle.

« Il y a un désaccord sur l’interprétation que le gouvernement a finalement retenue »

Voici plusieurs semaines que la commission des finances s’est engagée dans un bras de fer avec Bercy au sujet du texte d’application. Le président de la commission des finances, Claude Raynal, et le rapporteur général ont adressé deux courriers au ministre de l’Économie et des finances Éric Lombard, les 31 mars et 17 avril. « Il y a un désaccord sur l’interprétation que le gouvernement a finalement retenue contre l’avis du Sénat. J’ai demandé des éléments, la production d’un certain nombre de documents. J’en ai obtenu certains, mais il m’en manque beaucoup. J’ai donc besoin de comprendre », explique le sénateur Jean-François Husson.

Le rapporteur général a prévu de faire part de ses découvertes à 16 heures, lors d’une conférence de presse. Pour lui, il est d’autant plus important de respecter « la volonté du Parlement » à un moment où les finances publiques sont mal en point. « Je pense que, dans un temps où l’on va demander des efforts importants aux Français pour redresser les comptes, on ne peut pas continuer à ce qu’il y ait un laisser-aller, notamment vis-à-vis des fraudeurs », prévient-il.

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