Réseaux du futur, cybersécurité, communication quantique : les domaines de recherche ne manquent pas pour Orange et les 700 chercheurs du groupe spécialisé dans les télécommunications. Auditionné au Sénat ce 6 mai par la commission d’enquête sur l’utilisation des aides publiques versées aux grandes entreprises, le premier opérateur français a tenu à défendre l’utilité du crédit impôt recherche (CIR), l’une des niches fiscales les plus coûteuses pour l’État chaque année, avec un total de plus de 7 milliards d’euros décaissés.
Le dispositif a subi une petite ponction dans le cadre des économies du budget 2025. La dernière loi de finances a en effet réduit le montant de l’assiette sur laquelle est calculée ce crédit d’impôt. Dans un contexte où le gouvernement cherche 40 milliards d’euros d’économies pour l’an prochain, la dirigeant d’Orange a tenu à défendre ce dispositif, jugé essentiel pour son groupe, et plus largement pour l’innovation en France. « La baisse du CIR n’est pas un bon signal », a fait savoir Christel Heydemann, directrice générale d’Orange depuis 2022, dans un exposé avec un accent parfois très politique.
« Le soutien public à la recherche est essentiel. Sans soutien public, pas de recherche. Sans recherche, l’avenir d’un Etat s’assombrit. Ces aides sont aussi une condition de l‘influence de la France sur les réseaux du futur et dans les instances normatives mondiales […] Le soutien de l’État ne devrait pas faiblir, il devrait même se muscler », a plaidé la dirigeante d’entreprise, évoquant même les problématiques de souveraineté dans la défense, qui dépend des communications.
Une « asymétrie » au niveau de la fiscalité
L’an dernier, Orange a reçu au total 233 millions d’euros d’aides nationales et européennes, dont 88,5 millions sous forme d’exonération de cotisations sociales, 88,5 millions au titre des crédits d’impôts et d’incitations fiscales, et enfin 46 millions d’euros de subvention. Pour Christel Heydemann, ces aides « doivent être mises en regard de la surfiscalité sectorielle qui pèse sur Orange, et qui est très singulière en France ». L’ingénieure a notamment cité les impositions forfaitaires sur les entreprises de réseaux (IFER), qui ont représenté pour Orange près de 7 milliards d’euros de contributions depuis leur instauration en 2010.
La taxe Copé a également été épinglée. Elle a été mise en place en 2009, pour compenser la suppression de la diffusion de publicités en soirée sur les chaînes de France Télévisions. Orange a versé depuis 1,8 milliard d’euros depuis cette date à ce titre. « Les mesures actuelles ne compensent pas l’asymétrie dont nous souffrons par rapport à nos grands concurrents en Europe », a déploré la patronne du groupe.
S’appuyant sur l’exemple néerlandais, Christel Heydemann a estimé qu’une régulation et une fiscalité « qui permettent d’investir dans les réseaux du futur » étaient finalement préférables à un système d’aides publiques. « Il nous semblera toujours préférable de revoir des choix fiscaux contreproductifs plutôt que d’en compenser les effets négatifs par des aides publiques », a-t-elle souligné lors de l’audition.