Le Sénat s’oppose à une diminution des ressources de l’Assurance chômage

Les sénateurs ont refusé ce 14 novembre que l'État réduise, à son profit, les excédents réalisés par l’Unédic, dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024.
Guillaume Jacquot

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Après être venu au secours de la caisse de retraite complémentaire des salariés du privé, l’Agirc-Arrco, le Sénat a poursuivi son élan de défense des organismes paritaires, s’opposant à un prélèvement sur les excédents réalisés par l’Unédic, c’est-à-dire l’Assurance chômage. Les sénateurs ont supprimé ce 14 novembre, dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2024, la possibilité pour le gouvernement de réduire, par arrêté, la compensation à l’Unédic des allégements de contributions patronales.

L’article 10 du PLFSS doit même permettre au gouvernement de réduire sans plafonnement cette compensation. Se basant sur les montants financiers inscrits dans le projet de loi de finances, la commission des affaires sociales a affirmé que l’État récupérait 2,5 milliards d’euros en diminuant sa compensation à l’Unédic, réduisant donc du même montant une partie des excédents. Fin septembre, les partenaires sociaux s’étaient déjà érigés contre le projet du gouvernement. Le patronat et les syndicats ont dénoncé, dans une déclaration commune, une « ponction inacceptable ».

« Un véritable hold-up »

La rapporteure générale, exprimant la voix de la commission des affaires sociales, où la droite et le centre sont majoritaires, mais également le groupe socialiste, et le groupe écologiste ont fait adopter un amendement pour retirer cette disposition.

Élisabeth Doineau (Union centriste) a rappelé que l’Unédic était actuellement lestée de 56 milliards d’euros de dette, et qu’une réduction que la compensation que l’État lui verse, aurait un impact sur cette trajectoire de désendettement. « Il y a besoin de rappeler que, quand on a une dette, on doit la rembourser, parce que c’est aussi la pérennité du système que l’on prévoit », a voulu souligner la sénatrice de la Mayenne. L’écologiste Raymonde Poncet-Monge a protesté contre « un véritable hold-up », et le socialiste Alexandre Ouizille a dénoncé une mesure « qui bafoue le paritarisme ».

« Ce n’est pas anormal de participer au financement de quelques politiques publiques »

De son côté, le gouvernement s’est montré défavorable aux amendements sénatoriaux, ce qui laisse présager leur rétablissement par la suite à l’Assemblée nationale, grâce au 49.3. Refusant encore une fois le terme de ponction, Thomas Cazenave, le ministre des Comptes publics, a souligné que l’objectif était de récupérer « moins d’un tiers des excédents de l’Unédic ». « Ça ne remet absolument pas en question la volonté partagée par les partenaires sociaux, et soutenue par l’État, de désendettement de l’Unédic », a-t-il tenu à rassurer. À travers cette mesure budgétaire, l’exécutif souhaite que l’Unédic participe au financement de la politique de l’emploi.

Alors que le déficit avoisine les 5 % du produit intérieur brut cette année, Bercy entend demander des « efforts partagés » à toutes les composantes de la dépense publique, mais aussi tirer les bénéfices de sa réforme de l’assurance chômage. Celle-ci a rendu les modalités de prise en charge moins avantageuses pour les assurés, dans un contexte de progression du taux d’emploi. « Ce n’est pas anormal que de demander aussi à des régimes, qui tirent le bénéfice de nos réformes, que de participer au financement de quelques politiques publiques », a argumenté le ministre.

« Le rôle de l’Unédic ce n’est pas de contribuer à la politique de l’emploi ou à la politique économique du gouvernement », a objecté la socialiste Audrey Linkenheld. Attaché depuis le début de la discussion à préserver le paritarisme, le président de la commission des affaires sociales Philippe Mouiller (LR) a critiqué les choix opérés par le gouvernement dans le volet trésorerie du projet de loi. « Depuis le début, on a très peu entendu des mesures d’économies, on a très peu entendu des mesures de réforme. Ce qu’on a entendu, c’est finalement le fait d’aller chercher de l’argent chez ceux qui ont, quelque part, de part de leur gestion – certains ont bénéficié de réformes nationales mais ont également bien tenu l’organisation. »

Pour la suite de l’examen, le président de la commission a appelé ses collègues à faire preuve de cohérence, en évitant donc les demandes d’exonérations de cotisations.

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