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Loi spéciale : l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu ne devrait pas faire son retour au Sénat

Déclarés irrecevables à l’Assemblée nationale, les amendements sur le projet de loi spéciale, pour indexer sur l’inflation le barème de l’impôt sur le revenu, pourraient difficilement faire leur retour au Sénat. La majorité sénatoriale veut suivre l’avis du Conseil d’Etat.
Guillaume Jacquot

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La version sortie de l’Assemblée nationale sur le projet de loi spéciale ne comportera pas d’indexation sur l’inflation du barème de l’impôt sur le revenu. La présidente de l’Assemblée nationale Yaël Braun-Pivet a déclaré contraires à la Constitution les amendements déposés dans cette optique par les députés des oppositions en séance. Si ces modifications ont été adoptées en commission, c’est sur le texte initial que s’est prononcé ce lundi l’hémicycle, comme pour les textes budgétaires. La députée Renaissance a ainsi suivi l’avis du Conseil d’Etat. Saisie par le gouvernement démissionnaire, la plus haute juridiction administrative du pays a indiqué la semaine dernière que cette disposition ne relevait pas du périmètre de ce projet de loi. Ce dernier doit se limiter à reconduire les impôts existants pour le 1er janvier, dans l’attente de l’adoption d’une loi de finances pour l’année 2025.

L’indexation « n’a pas sa place » dans cette loi de spéciale, a fait savoir Gérard Larcher

Le président de la commission des finances Éric Coquerel (La France insoumise), l’un des auteurs de ces amendements, considérait que les impôts à reconduire devaient être considérés « en fonction du périmètre des contribuables touchés ». Le parlementaire LFI avait aussi mis l’absence de jurisprudence sur le sujet, puisque le dernier (et seul) exemple de loi spéciale soumise au Conseil constitutionnel en 1979 ne comportait pas cette indexation.

Le Sénat, qui prendra le relais dans l’examen du texte à partir de ce mardi après-midi en commission, devrait vraisemblablement, suivre aussi à la lettre l’avis du Conseil d’Etat. « Toutes les mesures fiscales nouvelles, au-delà de l’autorisation de prélever les impôts existants, ne peuvent être considérées comme nécessaires pour assurer la continuité de la vie nationale et n’ont pas leur place dans la loi spéciale. C’est en particulier le cas de l’indexation du barème de l’impôt sur le revenu », a rappelé le président du Sénat Gérard Larcher, dans La Tribune dimanche. Le troisième personnage de l’Etat « souhaite que la Constitution soit respectée », un impératif « essentiel » en « période d’instabilité politique », a-t-il ajouté.

« La logique d’une loi spéciale, c’est le service minimum en termes d’amendements »

Lors de l’examen en commission ce mardi, le rapporteur Jean-François Husson (LR) compte se donner comme ligne de conduite la sécurité juridique du projet de loi. « La logique d’une loi spéciale, c’est ce que j’appelle le service minimum en termes d’amendements […] Pourquoi s’exposer inutilement puisque de toute façon le projet de loi de finances traitera les sujets qui sont dans l’air du temps », nous déclarait-il la semaine dernière. Il sera suivi par la majorité de droite et du centre.

Reste à savoir si les oppositions, à gauche, ont l’intention de relancer le sujet du barème ou non. Le groupe socialiste, par exemple, ne souhaitait pas s’exprimer avant la fin des débats à l’Assemblée nationale. Plusieurs groupes devraient évoquer le sujet ce mardi à l’occasion de leur réunion hebdomadaire. Rappelons que le délai limite pour le dépôt des amendements de séance expire mardi à 18 heures. Le président de la commission des finances, le sénateur socialiste Claude Raynal, sera chargé d’examiner leur recevabilité.

« On se rend bien compte, par le travail de nos collègues à l’Assemblée nationale, et le débat que cela instaure, que cette loi spéciale n’est pas une simple formalité. Présentée comme un texte exclusivement technique, cette loi est quand même politique », observe ce lundi le sénateur communiste Pascal Savoldelli.

Dans ce qui pourrait être le dernier texte à l’agenda en cette fin d’année, les débats s’annoncent vifs. Son adoption ne fait aucun doute, mais ce texte devrait être l’occasion de règlements de comptes politiques sur un débat budgétaire qui n’a pu être mené à son terme.

D’autres amendements en débat à l’Assemblée nationale

En dehors du barème de l’impôt sur le revenu, stoppé par le filtre de la recevabilité, certaines propositions ont été soumises au débat ce lundi en fin d’après-midi à l’Assemblée nationale. Le rapporteur général Charles de Courson (LIOT) et Jean-Philippe Tanguy (RN) proposaient de fixer dans le projet de loi les plafonds d’emprunt auxquels auront droit les organismes de Sécurité sociale. Les députés socialistes voulaient faire figurer noir sur blanc le niveau des prélèvements sur recettes à destination des collectivités territoriales, et de l’Union européenne. Sur ce dernier point, le Rassemblement national défendait l’idée de reconduire la contribution française à son niveau de 2024, soit 1,5 milliard d’euros de moins que le niveau évalué pour 2025. Au sein de ces amendements, seul celui qui concerne les collectivités locales a été adopté. Le texte a été adopté par 481 voix, et zéro voix contre.

Dans son avis, le Conseil d’Etat a souligné que l’article 1er du projet de loi, sur l’autorisation de lever de l’impôt, emportait lui aussi la reconduction des prélèvements sur recettes. Ce point a néanmoins fait l’objet d’interrogations des sénateurs lors de l’audition des ministres, jeudi dernier. Il en a été de même pour les plafonds d’emprunt des organismes de Sécurité sociale.

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