Lutte contre la fraude : Éric Bocquet pointe « l’angle mort » des paradis fiscaux

Le gouvernement français a dévoilé son plan de lutte contre la fraude fiscale en France. Peu convaincu, le sénateur communiste Éric Bocquet alerte sur les optimisations fiscales à grande échelle. Le pouvoir exécutif promet d’agir.
Lauriane Nembrot

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

Hémicycle du Sénat, 11 janvier dernier. Le ministre des Comptes publics Gabriel Attal annonce un vaste plan de lutte contre les fraudes fiscale et sociales. Dans le détail, Bercy compte s’appuyer en partie sur les travaux du Sénat pour la mise en œuvre « d’un plan complet de lutte contre les fraudes ». « Croyez bien que c’est une grande priorité que nous fixons pour continuer à renforcer notre efficacité en la matière », avait fait savoir en janvier l’ancien porte-parole du gouvernement.

À ce titre, mardi 9 mai, dans les colonnes du journal Le Monde, Gabriel Attal a promis que « d’ici à la fin du quinquennat, les contrôles fiscaux sur les plus gros patrimoines augmenteront de 25 %. Et les cent plus grandes capitalisations boursières feront désormais l’objet d’un contrôle fiscal tous les deux ans ».

Faire payer les « ultra-riches »

Pas de quoi satisfaire Éric Bocquet, le sénateur communiste du Nord. Mercredi 10 mai, lors de la session de questions d’actualité au gouvernement, le vice-président de la commission des finances a de nouveau alerté le gouvernement sur l’ampleur des paradis fiscaux en Europe.

Le sénateur communiste est revenu sur le plan du ministre Gabriel Attal qui a promis de « faire payer les impôts aux ultra-riches et aux multinationales qui fraudent ». « Je crains un angle mort majeur du dispositif. C’est celui des paradis fiscaux », a dénoncé Éric Bocquet. Une position qu’il avait déjà défendue au printemps, dénonçant des « mesurettes » du gouvernement pour lutter contre la fraude fiscale.

Traquer les multinationales

« Considérez-vous comme Bruxelles qu’il n’existe pas de paradis fiscaux au sein de l’Union européenne ? », a encore questionné Éric Bocquet. Le parlementaire a rappelé les dessous de l’affaire « OpenLux », un vaste réseau de fraude fiscale au Luxembourg relevé par les journalistes du Monde en février 2021. Au total : 6.500 milliards d’euros d’actifs répartis entre quelque 55.000 sociétés offshore. Selon les précisions apportées par les sénateurs, 17.000 d’entre elles « sont détenues par des compatriotes français ».

En réponse aux questionnements du sénateur, Roland Lescure, le ministre délégué chargé de l’Industrie, a défendu l’action du gouvernement dans la lutte contre les paradis fiscaux. Des réussites à l’échelle nationale et internationale seraient à souligner.

« Si les multinationales sont désormais taxées à un niveau minimal dans le monde c’est grâce au gouvernement français », a martelé Roland Lescure. « C’est grâce à la détermination de notre gouvernement qui a porté ce sujet au niveau international ». D’après le ministre, « nous allons continuer à le faire ».

Des moyens supplémentaires

Le ministre a notamment rappelé la création prochaine d’une “COP” fiscale  pour lutter contre la fraude au niveau international. « Dans le cadre de cette COP fiscale, nous allons renforcer les moyens domestiques pour traquer les fraudes fiscales avec 1.500 agents supplémentaires d’ici la fin du quinquennat” a précisé Roland Lescure.

“On va avoir des moyens, nouveaux et modernes, pour traquer les flux des personnes pour s’assurer que celles et ceux qui ne sont pas en France légalement ne résident pas en France ou n’y passent pas trop de temps” a aussi expliqué Roland Lescure.

Dans la même thématique

L’entrée du Sénat
5min

Économie

Budget 2026 : pour trouver 40 milliards d'économies, la majorité sénatoriale ne s'interdit rien

Les sénateurs du bloc gouvernemental travaillent à identifier des coupes budgétaires pour la prochaine loi de finances. Leur objectif : aller chercher les 40 milliards d’économies souhaités par l’exécutif du coté des dépenses de l’Etat, pour éviter les hausses d’impôts. Tous les ministères sont visés, seul le budget de la Défense devrait être épargné par leurs travaux.

Le

Lutte contre la fraude : Éric Bocquet pointe « l’angle mort » des paradis fiscaux
7min

Économie

Aides aux entreprises : un face à face sous tension au Sénat entre Bernard Arnault et le communiste Fabien Gay

Le PDG du groupe LVMH a été auditionné ce 21 mai par la commission d’enquête sénatoriale sur les aides versées aux grandes entreprises. Suppressions de postes chez Moët Hennessy, présence de filiales dans des paradis fiscaux, coût de la Fondation Louis Vuitton : le milliardaire a dû répondre à plusieurs questions du sénateur communiste, dans une ambiance parfois tendue. Le dirigeant a dans le même temps rappelé l’importance de la contribution fiscale de son groupe, qu’il considère être comme le « plus patriote » du CAC 40.

Le

Lutte contre la fraude : Éric Bocquet pointe « l’angle mort » des paradis fiscaux
4min

Économie

« Il est très mauvais pour l'Etat de se mêler de la gestion des entreprises privées » : Bernard Arnault répond à Emmanuel Macron

Le PDG du groupe LVMH, lors d’une audition au Sénat, s’est exprimé sur les appels, formulés par le président de la République ou le ministre de l’Economie, à cesser les investissements aux Etats-Unis, dans le contexte de la guerre commerciale. Un interventionnisme qui n’a pas été du goût du patron du premier groupe de luxe au monde.

Le

China: Global Manufacturing Industry in April 2025
3min

Économie

Guerre commerciale américaine : « Le risque est de nous détourner de la principale menace qui est la concurrence chinoise »

La commission des finances du Sénat a auditionné des économistes spécialistes du commerce international pour évaluer « l’impact macroéconomique de la politique commerciale américaine » sur l’économie française. S’ils jugent que les effets des droits de douane américains vont rester « modérés », ils redoutent l’impact de la concurrence chinoise.

Le

La sélection de la rédaction

Bercy
7min

Économie

Lutte contre la fraude fiscale : « Des oublis et des insuffisances », pointent les sénateurs

Mise en place d’un conseil d’évaluation des fraudes, création d’une nouvelle sanction d’indignité fiscale pour les gros fraudeurs, recrutement de 1 500 effectifs d’ici 2025 en charge du contrôle et de la lutte contre la fraude… Gabriel Attal a présenté ce mardi son plan contre la fraude fiscale qui laisse sur leur faim les parlementaires spécialistes du sujet.

Le

Lutte contre la fraude : Éric Bocquet pointe « l’angle mort » des paradis fiscaux
7min

Politique

Lutte contre la fraude fiscale : « On est dans la mesurette autour de laquelle on fait beaucoup de communication », déplore Éric Bocquet

Alors que Bercy annonce 14,6 milliards d’euros recouvrés en 2022, Gabriel Attal s’est un peu emporté en annonçant des résultats « historiques », malgré une hausse par rapport à l’année dernière. Le ministre du Budget a tout de même annoncé un « plan » de lutte contre les fraudes pour le printemps prochain. Des discussions ont déjà commencé avec les parlementaires impliqués, qui sont partagés sur l’ambition du gouvernement.

Le