En pleines tensions commerciales internationales, le gouvernement surveille le budget comme le lait sur le feu. Ce mercredi matin, la ministre française des Comptes publics, Amélie de Montchalin a annoncé un effort supplémentaire de réduction de la dépense publique de 5 milliards d’euros.
« Comme la croissance baisse, comme on a moins de recettes et comme certains ministères ont de nouveaux besoins, si on veut tenir la cible de déficit, il faut qu’il y ait 5 milliards de dépenses qu’on avait prévu de faire, qu’on ne va pas faire à l’endroit où on voulait les faire, soit parce qu’elles n’auront pas lieu du tout, soit parce qu’on les aura réallouées », a-t-elle justifié au micro de RMC.
La ministre a précisé que ces 5 milliards seraient décomptés des 9,1 milliards d’euros placés en réserve (dont 8 sur le périmètre de l’État), c’est-à-dire mis de côté pour faire face à toute éventualité au cours de l’année. Dans un contexte de soutien accru à l’Ukraine après le désengagement américain, une partie de ces cinq milliards d’euros « va aller à nos dépenses essentielles de défense », a-t-elle ajouté. « La répartition exacte sera précisée dans les prochains jours », selon le cabinet de la ministre.
Une prévision de croissance qui devrait être abaissée de quelques dixièmes de point
Pour rappel, l’objectif du gouvernement est de parvenir à réduire le déficit public à 5,4 % du PIB en 2025, après 5,8 % l’an dernier. Mais la croissance sur laquelle repose la loi de finances, à savoir 0,9 %, pourrait être moins élevée que prévu, avec des conséquences sur le niveau des rentrées fiscales. Avant même l’offensive douanière de la Maison Blanche déclenchée le 2 avril, les incertitudes internationales ont conduit la Banque de France à réduire de 0,2 point à 0,7 % sa prévision de croissance pour 2025. Lors du point presse qui a suivi le Conseil des ministres, la porte-parole du gouvernement Sophie Primas a déclaré que l’impact brut sur la croissance française des surtaxes douanières américaines « sera entre 0,3 et 0,5 % ».
Selon nos informations, le ministre de l’Économie Éric Lombard devrait annoncer une révision de la prévision de croissance lors de son passage au journal de 20 heures de TF1 ce 9 avril. Déjà le 19 mars, lors d’une audition au Sénat, le ministre de l’Économie avait reconnu un « cadre sous tension » et avait estimé que le gouvernement devrait opérer des « ajustements » budgétaires, si la croissance était « plus faible que prévu ».
« Je sens que les ministres veulent tenir la ligne du déficit annoncé », note le rapporteur général du budget au Sénat
« Je sens que les ministres veulent tenir la ligne du déficit annoncé », observe auprès de Public Sénat le rapporteur général de la commission des finances du Sénat, Jean-François Husson (LR). « Il est incontestable que les obstacles et les contrariétés multiples viennent rendre l’exercice difficile, mais raison de plus pour rapidement solenniser les choses et essayer d’engager le combat de la France pour le redressement général », appelle le sénateur de Meurthe-et-Moselle. Et d’ajouter : « Ce n’est pas le moment d’être abattu. Il faut être lucide, ne pas se tromper. »
Le 15 avril, de nombreux parlementaires des commissions des finances et des affaires sociales vont participer à une conférence sur les finances publiques, aux côtés du gouvernement, de représentants de la Sécurité sociale et des collectivités territoriales. Ce rendez-vous doit être l’occasion de faire le point sur les risques de dérapages des finances publiques, mais également sur les mesures correctrices. « Cela ne doit pas être d’abord un exercice de communication, cela doit être un temps de mobilisation officielle, avoir quelques lignes fortes et comment on propose au Parlement, aux partenaires sociaux, des voies de passage », espère le rapporteur du budget au Sénat. « Le temps de la défausse, des promesses non tenues, c’est fini. On arrive dans une période clé, charnière. Il nous faut être dans le sursaut », encourage-t-il.
Après deux années d’écarts considérables sur le front de l’évolution des dépenses et des recettes, Jean-François Husson se montre optimiste sur les éléments relatifs au premier trimestre 2025, qui seront annoncés prochainement. « De ce que je crois comprendre, il devrait y avoir moins de mauvaises surprises. Cela devrait être assez proche des prévisions. »