Réduction du déficit : les prochaines marches seront « plus difficiles à franchir », avertit Gabriel Attal

Entendu devant la commission des finances du Sénat, le ministre des Comptes publics a estimé que la poursuite de la baisse du déficit public serait un « défi de taille ». Il annonce que les « Dialogues de Bercy », pour préparer avec les parlementaires le futur budget, se tiendront plus tôt que prévu.
Guillaume Jacquot

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Gabriel Attal était venu pour parler du passé, cela ne l’a pas empêché de s’exprimer sur les exercices budgétaires à venir. Auditionné devant la commission des finances du Sénat ce 2 mai sur le projet de loi de règlement 2022, texte qui arrête le montant définitif des dépenses et recettes de l’État, le ministre des Comptes publics est revenu sur les choix budgétaires de l’an passé en pleine flambée inflationniste, tout en esquissant quelques commentaires sur la suite.

Saluant le « dynamisme des recettes fiscales », qui ont « largement contribué » à la baisse du déficit public (4,7 % du PIB pour 2022), Gabriel Attal a considéré que le choix de la « protection » des ménages et des entreprises face à la hausse des prix de l’énergie s’était révélé « vertueux ». Revers de la médaille, le solde des administrations publiques est resté « très dégradé », selon lui. « Nous devons impérativement tenir nos objectifs de finances publiques et enclencher le désendettement de la France à l’horizon 2027 comme nous nous y sommes engagés », a-t-il appelé.

Personne n’aura fait mention de l’abaissement de la note financière de la France par l’agence Fitch Ratings vendredi soir. Le ministre a simplement concédé que les « prochaines marches », dans le rétablissement des comptes, seraient « plus difficiles à franchir », « parce que l’environnement économique n’est plus le même ». Après une croissance de 2,6 % l’an dernier, l’exécutif ne table plus que sur une progression du PIB de 1 % cette année, une prévision pourtant déjà bien plus optimiste que pour d’autres institutions. « Le défi est de taille, et pourtant je sais que nous pouvons y arriver », a clamé le numéro 2 de Bercy.

Gabriel Attal donne rendez-vous aux commissions des finances dès l’été pour préparer le futur budget

Au ministère, le rendez-vous du prochain projet de loi de finances est déjà dans tous les esprits. La Première ministre Elisabeth Borne a même envoyé des courriers à tous les membres du gouvernement pour demander des pistes d’économies. « Je veux que l’ensemble des groupes politiques représentés au Parlement soient associés à cette réflexion », s’est engagé Gabriel Attal. Il a ainsi annoncé que les « Dialogues de Bercy », ces rendez-vous avec les parlementaires de « co-construction » de la future loi de finances, interviendront plus tôt cette année. Dès l’été, autrement dit.

Exprimant la voix de la majorité sénatoriale, le rapporteur général du budget, Jean-François Husson (LR) a épinglé le contenu du projet de loi de règlement 2022, « cette année encore très éloigné de la prévision ». Le sénateur de Meurthe-et-Moselle s’est étonné des difficultés de Bercy à prévoir les recettes fiscales à leur juste hauteur mais aussi des « reports massifs » de crédits d’un exercice à l’autre. « La loi de finances donne désormais une vision imprécise de la vision du budget. Elle réduit la portée de l’autorisation parlementaire », a-t-il reproché, dénonçant une « stratégie du flou ».

Pas de loi de finances rectificative cet été, selon le ministre

À l’approche de l’été, le président de la commission, Claude Raynal (PS), en a profité pour sonder le gouvernement sur sa volonté ou non de présenter un budget rectificatif. Sa question était d’autant plus prégnante que le ministre des armées évoquait ouvertement le sujet le 2 avril. Dans les colonnes du Parisien, Sébastien Lecornu indiquait avoir demandé à l’Élysée et à Matignon de « présenter prochainement au parlement une demande de dépense supplémentaire de 1,5 milliard d’euros en 2023 ». La rallonge était justifiée par des « urgences opérationnelles », notamment de capacités en drones et lutte anti-drones dans le contexte de la guerre en Ukraine.

« À ce stade, ce n’est pas prévu », a répondu Gabriel Attal. Pour le moment, le Parlement ne devrait pas étudier d’autre projet de loi de finances rectificative que le traditionnel collectif de fin de gestion. « J’espère que ce sera le cas jusqu’à la fin de l’année et qu’il n’y aura pas d’éléments supplémentaires de crise qui justifieraient qu’on doive en passer par là », a ajouté Gabriel Attal. Selon le ministre des Comptes publics, le ministère des Armées dispose d’une marge de « trois milliards d’euros » pour absorber le surplus de besoins, et le projet de loi de finances rectificative de fin d’année sera l’occasion de régulariser les choses.

Le projet de loi de règlement 2022 ne serait pas le seul texte du genre proposé au vote du Parlement. Le gouvernement va retenter sa chance avec celui clôturant les comptes de l’année 2021, et qui avait été rejeté définitivement le 3 août dernier. L’Assemblée nationale comme le Sénat avait rejeté ce texte purement symbolique, premier échec de la législature pour la majorité relative gouvernementale. Ce qui n’a pas empêché l’exécutif de présenter un projet de loi de finances. Gabriel Attal ne désespère pas de voir ce projet de loi pour l’année 2021 être adopté cette année. « Il ne faut pas se tromper de combat. Voter un projet de loi de règlement n’a jamais voulu dire qu’on donne son accord ou son satisfécit au gouvernement pour la conduite des affaires de la Nation pendant une année donnée, mais seulement qu’on prend acte de l’exécution budgétaire pendant cette année. »

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