SNCF : « Un peu triste de quitter la RATP », Jean Castex se déporte des dossiers liés à son ancienne entreprise

L’ancien Premier ministre et P.-D.G. de la RATP a été auditionné par la commission de l’aménagement du territoire du Sénat ce mercredi. Il a notamment mis l’accent sur les investissements nécessaires dans le réseau et les véhicules, ainsi que les défis soulevés par la poursuite de l’ouverture à la concurrence. Il sera auditionné par la même commission à l’Assemblée nationale la semaine prochaine pour que le Parlement vote sur sa candidature.
Louis Mollier-Sabet

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Avec le départ de Jean-Pierre Farandou au ministère des Transports dans le nouveau gouvernement Lecornu II, Emmanuel Macron a joué la sécurité en proposant la nomination de Jean Castex à la tête de la SNCF. L’ex-Premier ministre s’était impliqué dans le dossier des transports par son inauguration enthousiaste du train de nuit Paris-Nice en 2021 et avait pris la tête de la RATP après son passage à Matignon (voir notre article). Du réseau de transports parisien au ferroviaire national, il n’y a que quelques rails ; et voilà Jean Castex proposé à la tête de la SNCF par le chef de l’Etat, en attendant la probable confirmation des deux commissions du Parlement après son audition à l’Assemblée nationale la semaine prochaine.

« Il y a des bases solides pour cette grande entreprise de service public »

Le nouveau P.-D.G. de la SNCF s’est dit « un peu triste » de quitter la RATP, tout en se félicitant de partir après la conclusion de « plusieurs chantiers », dont l’ouverture à la concurrence du réseau de bus, la signature d’un nouveau contrat quinquennal avec la région Île-de-France et la modernisation de huit lignes de métro sur quatorze. « Sinon je ne serais pas parti », a tenu à rassurer le désormais ex-PDG de la RATP face aux inquiétudes suscitées par un départ précipité avant la fin de son mandat prévue en 2029.

Jean Castex a d’ailleurs tenu à assurer aux sénatrices et sénateurs qu’il saisirait la commission de déontologie de la SNCF dès son entrée en fonction et qu’il se déporterait de tout dossier où la SNCF serait en concurrence avec la RATP. Pour ce qui est des appels d’offres en cours, l’ex-Premier ministre a fait état de cinq dossiers en France, dont un dossier « important » sur l’étoile ferroviaire de Reims et trois dossiers à l’étranger. Le nouveau P.-D.G. de la SNCF a aussi assuré que – durant les trois prochaines années – il se déporterait des futurs appels d’offres « où la RATP est sortante et décidera de se représenter et que le groupe Keolis décide d’y aller. »

Le nouveau P.-D.G. de la RATP en a aussi profité pour saluer le bilan de son prédécesseur. « Il y a des bases solides pour cette grande entreprise de service public », s’est-il félicité, en citant notamment « le redressement des comptes de l’entreprise », avec une augmentation de 20 % du chiffre d’affaires en quatre ans.

1,5 milliard par an d’investissements supplémentaires dans le réseau

Au-delà de la transition depuis son poste précédent, Jean Castex a aussi développé trois grands chantiers qui se dressent devant le groupe. En premier lieu, Jean Castex a abordé la question de l’état du réseau, « la mère des batailles. » Le nouveau P.-D.G. de la SNCF a repris l’objectif de son prédécesseur d’augmenter les investissements dans le réseau de 3 à 4,5 milliards par an. La SNCF est prête à consentir un tiers de cet effort, ce qui laisse 1 milliard d’euros par an à faire financer par l’Etat. Dénonçant un « sous-investissement manifeste » dans les infrastructures ferroviaires sur les trente dernières années, Jean Castex a promis de s’engager dans cette « bataille du milliard » que constitueront les négociations avec l’Etat sur le sujet. « Si on a des infrastructures plus performantes, notamment sur la signalisation, on va s’y retrouver en matière de coûts d’exploitation », a-t-il défendu.

Ensuite, la SNCF va faire face à un « défi capacitaire », avec une baisse du nombre de véhicules – tous véhicules confondus – de 102 000 en 2019 à 96 000 en 2023, pour un nombre plus important de voyageurs. « Il faut répondre à ce défi capacitaire. À ce titre, l’ouverture à la concurrence peut être un avantage car elle donne de l’offre supplémentaire là où l’on en manque. »

Enfin, le groupe va devoir gérer la poursuite de l’ouverture à la concurrence, avec cinq lots attribués à la SNCF sur huit pour les TER (pour plus de 80 % du chiffre d’affaires total) et une offre TGV quasi uniquement assurée par la SNCF – seuls 2 % du chiffre d’affaires est réalisé par des concurrents. « Si vous avez des nouveaux entrants qui ne desservent que des segments extrêmement rentables sur un tiers de l’activité, il faut quand même conserver un souci d’aménagement du territoire sur ces lignes-là aussi », a averti Jean Castex, qui a notamment défendu « l’unité » du groupe face à la filialisation qui vient avec l’ouverture à la concurrence : « Lorsqu’on gagne un appel d’offres, il faut aussi gérer une phase de transition délicate, avec une menace qui est l’éparpillement du groupe. Il faut conserver une forme d’unité. »

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