FRANCE – COUNCIL OF MINISTERS MEETING APRIL 21, 2025
Crédits : ARNAUD CESAR VILETTE / OLA NEWS / SIPA PRESS

Transports : François Bayrou lance une grande conférence pour repenser des financements « à bout de souffle »

En déplacement à Marseille, le Premier ministre a ouvert ce lundi 5 mai une série d’ateliers destinés à dégager des pistes de financement pour garantir le développement des transports en France à l’horizon 2040, tout en répondant aux enjeux écologiques de baisse des émissions de gaz à effet de serre. Deux gros chantiers attendent le gouvernement : l’avenir des concessions d’autoroute et la rénovation du réseau ferré.
Romain David

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Coup d’envoi ce lundi 5 mai de la conférence « Ambition France Transport », voulue par le Premier ministre pour dégager des solutions de financement afin d’assurer le développement des transports sur les quinze prochaines années, dans un contexte de redressement des finances publiques. « Depuis des décennies on a multiplié les plans et puis quand on expertise pour savoir où sont les moyens, on voit qu’ils n’ont pas été prévus », a expliqué François Bayrou lors d’un déplacement à Marseille, en compagnie de plusieurs ministres. L’objectif : offrir à chaque citoyen, quel que soit son lieu de résidence, une solution de mobilité décarbonée à l’horizon 2040, sans alourdir la dette du pays.

« Notre modèle de financement des infrastructures de transport est aujourd’hui à bout de souffle », a déploré le chef du gouvernement. « Dans l’extrême difficulté des temps, nous essayons de mettre en place un travail pour que projets et financements crédibles puissent être mis en parallèle. Et pas seulement un financement par des chèques du trésor public. Les pays qui nous entourent ont trouvé d’autres modes de financement, des investissements privés aux investissements publics », a-t-il développé.

Les travaux d’« Ambition France Transports » se dérouleront sur dix semaines. Organisés sous la forme d’ateliers, pilotés par le ministre des Transports, Philippe Tabarot, en collaboration avec le ministère de l’Economie et des Finances, ils rassembleront élus, acteurs publics et privés, experts, associations environnementales et associations d’usagers. Leurs conclusions sont attendues mi-juillet, mais pourraient être reportées à septembre si nécessaire.

« Il y a une urgence écologique »

« On a trop souvent, dans notre pays, monté les modes de transport les uns contre les autres et finalement, on s’est aperçus qu’ils étaient infiniment complémentaires et qu’ils peuvent être solidaires à travers leurs modes de financement », a relevé Philippe Tabarot ce lundi.

« La France, par sa diversité géographique et territoriale et ses dynamiques régionales, impose une approche nouvelle, différenciée, mais solidaire en matière de mobilité », a également fait valoir François Rebsamen, le ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation. « Il y a une urgence écologique car il faut rappeler que 30 % des émissions de gaz à effet de serre proviennent des transports. » Pour réduire ces émissions, il faudrait augmenter de 25 % le taux de fréquentation des transports publics d’ici la fin de la décennie.

L’avenir des contrats de concessions autoroutières

L’un des principaux sujets d’ « Ambition France Transport » concerne la mobilité routière et l’avenir des concessions d’autoroute. Leur surrentabilité a souvent été pointée du doigt, notamment par la commission d’enquête sénatoriale lancée sur ce dossier en 2020. Le total des bénéfices engrangés sur l’année 2023 par les principaux prestataires, ASF, Cofiroute, APRR et SANEF a dépassé les 4 milliards d’euros.

Alors que les contrats vont commencer à expirer à partir de 2031, un rapport du Sénat publié en octobre dernier alertait sur le retard pris par l’exécutif dans la préparation des procédures de fin de concessions, au risque de laisser échapper une importante manne financière. De nombreux élus, à gauche notamment, appelle l’Etat à reprendre la main sur un réseau autoroutier dont il reste propriétaire. Ce lundi, François Bayrou, tout en critiquant la privatisation mise en place au début des années 2000, n’a pas souhaité exprimer de préférence sur le modèle d’exploitation qui pourrait prendre la suite.

Un réseau ferroviaire trop âgé

Autre gros morceau pour les participants à cette conférence : la régénération des structures ferroviaires, qui pourrait être au cœur de la réactualisation à venir du contrat de performance entre l’État et SNCF Réseau. L’âge moyen du réseau ferroviaire tricolore est de 29 ans, contre 17 ans en Allemagne et 15 ans en suisse. Conséquence de cette situation : le surcoût important qu’exige la mise en circulation des trains du quotidien. Dans un rapport publié en mars 2022, les sénateurs Hervé Maurey et Stéphane Sautarel estimaient que pour les TER les coûts de roulage en France étaient supérieurs de 60 % à ceux de l’Allemagne.

En février 2023, Élisabeth Borne, alors Première ministre, avait promis un plan à 100 milliards d’euros pour la remise à niveau du réseau. « Les 100 milliards n’ont pas été totalement budgétisés, c’est le moins que l’on puisse dire », a commenté Philippe Tabarot. « Pour autant, il en reste quelque chose. Je pense notamment aux investissements de la SNCF à travers son fonds de concours sur les infrastructures ferroviaires. »

Le modèle économique de la SNCF

Le rapport du Sénat cité plus haut alertait également sur les difficultés financières de la SNCF et un modèle économique « dans l’impasse », en dépit des restructurations lancées à la fin des années 1990, puis en 2014 et en 2018, et le rachat d’une partie de sa dette par l’Etat. Les deux filiales Keolis et Geodis, en charge des activités internationales de la SNCF, représentent à elles seules 50 % du chiffre d’affaires du groupe. En parallèle, 60 % des bénéfices de SNCF Voyageurs sont avalés par SNCF Réseau.

Par ailleurs, l’ouverture de la conférence « Ambition France Transports », ce lundi 5 mai, coïncide avec le premier jour d’une série d’appels à la grève lancé par les syndicats Sud-Rail et CGT-Cheminot avant le pont du 8 mai. Ils réclament des revalorisations salariales et un réaménagement de leurs temps de travail.

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