Les écoliers français porteront-ils un uniforme dans un an lors de la prochaine rentrée scolaire ? Le ministre de l’Education nationale Gabriel Attal a annoncé ce lundi qu’il dévoilera à l’automne les modalités de l’expérimentation du port de l’uniforme à l’école. Il a invité les élus volontaires à entrer en contact avec le gouvernement pour travailler sur cette expérimentation qui sera menée dans les écoles, collèges et lycées et dans « différents territoires ».
Ce travail lancé par Gabriel Attal reçoit déjà les faveurs de certains départements comme les Bouches-du-Rhône et les Alpes-Maritimes qui souhaitent participer à cette expérimentation. Le patron du parti LR Eric Ciotti et député des Alpes-Maritimes souhaite « avancer vite » dans ce sens pour généraliser le port de l’uniforme à l’école. Le maire Rassemblement national de Perpignan Louis Aliot tout comme le maire de Béziers Robert Ménard sont également candidats à cette expérimentation.
L’uniforme, une réponse au port de l’abaya ?
Le port de l’uniforme apparaît pour certains de ses partisans comme une réponse aux problèmes d’atteinte à laïcité à l’école et au port de l’abaya par certaines élèves que le gouvernement a décidé d’interdire dans les écoles dès cette rentrée. 513 établissements sont concernés par ce sujet du port de l’abaya, a estimé Gabriel Attal ce lundi. « Pas d’incident » à signaler sur ce point en cette rentrée, a indiqué la Première ministre Elisabeth Borne. « Si l’uniforme peut permettre aux chefs d’établissement de se battre contre une forme de prosélytisme à l’école, c’est une bonne chose », réagit le sénateur LR Jacques Grosperrin, qui travaille sur ces questions éducatives. « Mais ça ne sera pas suffisant. Cette laïcité doit se faire par la parole, les groupes de parole, des projets de pédagogiques. »
« Même si ce n’est pas, selon moi, le bénéfice principal de l’uniforme, il permet de remplacer le sentiment d’appartenance religieuse exprimé par certains vêtements comme l’abaya par un sentiment d’appartenance à son établissement », estime Céline Boulay-Espéronnier.
Au sein de la gauche sénatoriale, on ne croit pas aux vertus de l’uniforme en termes de laïcité. « Sur l’abaya, la loi de 2004 sur l’interdiction des signes religieux ostentatoires à l’école est très claire, il suffit de l’appliquer », explique la sénatrice socialiste Sylvie Robert. « Ce n’est pas l’uniforme qui va régler le problème. »
Une expérimentation soutenue par la droite sénatoriale
Plus largement, l’expérimentation de l’uniforme à l’école est soutenue par les sénateurs LR et certains voudraient aller plus vite. « C’est une bonne décision gouvernementale mais on a dépassé depuis longtemps le stade de l’expérimentation, il faut une loi pour généraliser le port d’une tenue vestimentaire dans chaque établissement scolaire », estime la sénatrice LR Céline Boulay-Espéronnier, qui avait déposé en janvier dernier une proposition de loi en ce sens. Une mesure débattue au printemps dernier dans le cadre d’un autre texte de la droite sénatoriale sur l’autonomie de l’école, mais qui a été rejetée durant le débat, par une majorité de voix venues de la gauche et du centre. « Une tenue par établissement permettrait de créer un sentiment de cohésion entre les élèves », estime la sénatrice qui regrette que sa proposition n’ait pas été adoptée par la Haute assemblée.
« L’uniforme n’est pas l’alpha et l’oméga de l’égalité à l’école »
C’est que le port de l’uniforme à l’école ne fait pas l’unanimité dans les couloirs de la Haute Assemblée, notamment chez les centristes. « L’uniforme n’est pas l’alpha et l’oméga de l’égalité à l’école », réagit Annick Billon, sénatrice centriste de Vendée et présidente de la délégation aux droits des femmes du Sénat. Le coût de cette mesure, estimé à plusieurs milliards d’euros, la laisse sceptique.
« Nous avons besoin de concentrer nos moyens sur les problèmes fondamentaux comme par exemple l’accueil des élèves en situation de handicap. Leurs accompagnants (les AESH) ne sont pas assez nombreux, pas assez rémunérés et nous devons améliorer leur formation. »
Même réticence du côté de la gauche sénatoriale. « Je suis contre l’uniforme car il ne va pas résoudre les problèmes de l’école », assure Sylvie Robert, sénatrice d’Ille-et-Vilaine et porte-parole du groupe socialiste du Sénat. « L’amélioration des conditions de travail des enseignants et de la mixité sociale à l’école sont des objectifs bien plus importants à atteindre, d’autant que les établissements scolaires sont déjà libres de mettre en place une tenue d’établissement. »