Budget 2025 : le Sénat propose la suppression de 2 000 postes d’enseignants, contre les 4 000 prévus par le gouvernement

À l’unanimité, les sénateurs ont adopté ce 2 décembre un amendement divisant par deux les objectifs du gouvernement en matière de suppression de postes d’enseignants. Une diminution des effectifs de 2 000 professeurs, contre les 4 000 demandés par l’exécutif, pour préserver les écoles rurales de fermetures.
Rose Amélie Becel

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Ce 2 décembre, le Sénat a débuté l’examen du volet dépenses du projet de loi de finances pour 2025, avec le débat sur le budget alloué à l’enseignement scolaire. L’occasion d’apporter une première modification importante à la copie du gouvernement. En octobre dernier, celui-ci avait annoncé la suppression de 4 000 postes d’enseignants, une annonce qui avait immédiatement suscité de vives réactions des syndicats, qui appellent à la grève le 5 décembre prochain.

Parmi ces baisses d’effectifs, 3 815 concernent les professeurs des écoles primaires. La commission des finances et la commission de la culture du Sénat ont proposé de ramener ces suppressions de postes dans l’enseignement primaire à 2 000. Deux amendements votés à l’unanimité dans l’hémicycle. « Une diminution beaucoup plus équilibrée », a défendu le rapporteur spécial de la commission des finances Olivier Paccaud (LR).

« La diminution des effectifs doit être progressive et précautionneusement ciblée »

Avec près de 100 000 élèves en moins attendus à la rentrée 2025, le ministère de l’Education nationale avait justifié ces suppressions de postes par des raisons démographiques. Un argument qui passe mal, pour tous les groupes du Sénat, qui ont épinglé les calculs du gouvernement. « S’il ne faut pas ignorer la démographie, la politique ne saurait se résumer à un exercice purement comptable ? L’art du politique, c’est de rendre souhaitable ce qui est possible. Est-il souhaitable que la France soit l’un des Etats de l’OCDE avec l’un des pires taux d’encadrement ? Non », a estimé Olivier Paccaud.

En divisant par deux les objectifs de suppression de postes du gouvernement, la majorité sénatoriale entend par ailleurs préserver les écoles rurales d’une baisse des effectifs qui risquerait d’entraîner des fermetures d’établissements. « La diminution des effectifs doit être progressive et précautionneusement ciblée. Elle présente un risque essentiellement pour les écoles rurales, qui ont déjà perdu 8,5 % de leurs effectifs entre 2015 et 2023 et sont donc les plus susceptibles d’être visées », a expliqué Olivier Paccaud.

La ministre de l’Education nationale s’est montrée sensible aux arguments du rapporteur spécial, en n’émettant pas d’avis défavorable à la proposition du Sénat, elle a tout de même fait savoir qu’elle était « plutôt réservée ». Anne Genetet a par ailleurs défendu que les suppressions de postes envisagées par son ministère n’auraient aucune incidence négative sur le taux d’encadrement des élèves. « Regardons la réalité de ce projet de loi de finances. Les écoles publiques comptent en moyenne 21 élèves par classe, c’est le niveau le plus bas depuis que nous mesurons cet indicateur. Dans les collèges et les lycées publics, le nombre d’heures hebdomadaires d’enseignement par élèves continuera de progresser », a défendu la ministre.

1 milliard d’euros d’économies supplémentaires sur la formation des enseignants

Pour améliorer le taux d’encadrement, les groupes de gauche ont déposé de leur côté plusieurs amendements pour revenir intégralement sur les suppressions de postes prévues, mais aussi pour demander le recrutement de davantage d’enseignants. « En ce qui concerne le nombre d’effectifs par classe, la France est l’une des mauvaises élèves de l’Union européenne. Dans le premier degré, on compte en moyenne 21,4 élèves par classe contre 19 dans le reste de l’UE. Au collège, ce sont presque 26 élèves par classe, contre 21 élèves ailleurs », a dénoncé la sénatrice socialiste Marie-Pierre Monier.

De son côté, la majorité sénatoriale a défendu de nouvelles coupes budgétaires, notamment sur le volet formation du budget de l’enseignement scolaire, jugé « sous-exploité ». « Cela fait des années, malheureusement, qu’il y a une sous-consommation des crédits de la formation. En 2020, le montant total des crédits sans consommation s’est élevé à 414 millions d’euros, en 2021 à 478 millions d’euros, en 2022 à 658 millions d’euros et en 2023 à 1,1 milliard d’euros », a déploré Olivier Paccaud. Contre l’avis de la ministre, qui assure que ces fonds sont bel et bien utilisés pour financer la formation des enseignants stagiaires et des contractuels, le Sénat a donc voté pour une diminution d’un milliard d’euros de ces crédits.

Enfin, cette fois-ci en accord avec Anne Genetet, la majorité sénatoriale a défendu un amendement pour diminuer les dépenses du ministère de 170 millions d’euros, dans le cadre des 5 milliards d’euros d’économies supplémentaires sur le budget 2025 demandés par le gouvernement. « La mission enseignement scolaire, comme les autres, doit participer effectivement au retour à meilleure fortune de nos comptes publics », a défendu le sénateur centriste Michel Canévet. Ces économies supplémentaires seront effectuées par le biais de « mesures transversales sur les dépenses salariales », mais aussi en coupant dans « les dépenses de fonctionnement des différents ministères », a confirmé Anne Genetet.

Faute de temps pour poursuivre les débats ce matin, les sénateurs devaient achever l’examen du budget de l’enseignement scolaire ce samedi 7 décembre, pour valider ces nouvelles mesures. Après le 49.3 déposé par Michel Barnier pour faire adopter le budget de la Sécurité sociale à l’Assemblée ce 2 décembre, si une motion de censure est votée par la majorité des députés cette semaine, l’examen du projet de loi de finances au Sénat sera interrompu.

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