C’est devant les sénateurs de la commission de la culture et de l’éducation, avant les députés demain, que la ministre de l’Education nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Elisabeth Borne, a présenté ce mardi la vision qu’elle porte de son action.
Alors que les enseignants des écoles parisiennes étaient appelés à la grève, ce mardi, pour dénoncer les fermetures de classes, l’ex-première ministre n’a pu que constater que la question interpellait sur tout le territoire. Plusieurs sénateurs, de tous départements, ont en effet multiplié les interpellations sur ce sujet sensible.
« Dire qu’il n’y a plus de suppressions de postes et à côté de ça, dire aux maires qu’on va fermer des classes, c’est difficilement entendable »
Une rafale de questions même, commencée avec le sénateur LR du Doubs, Jacques Grosperrin, soulignant l’importance du « diagnostic partagé », dont se réclame la ministre. Ou la sénatrice PS de la Drôme, Marie-Pierre Monier, dont « les remontées de terrain interrogent au regard des nombreuses fermetures de classes dans les territoires », pointant « un décalage » de perception avec le maintien de 4.000 postes, obtenu par les socialistes dans le cadre des négociations avec François Bayrou. Annick Billon, sénatrice centriste de la Vendée, évoque aussi les fermetures dans son département, « car on passe de 78 à 72 » classes.
Ou encore Laure Darcos, sénatrice du groupe Les Indépendants, qui relaie un courrier de son président de groupe, Claude Malhuret, et de l’ensemble des parlementaires du département, « pour tirer le signal d’alarme ». Et elle aussi « en Essonne » est concernée, appelant à « la clémence » des directeurs d’académies. « Dire qu’il n’y a plus de suppressions de postes et à côté de ça, dire aux maires qu’on va fermer des classes, c’est difficilement entendable », relaye à son tour la sénatrice LR de la Moselle, Catherine Belrhiti, dont le département est aussi touché. Adel Ziane, sénateur PS de Seine-Saint-Denis, prend également la parole et alerte sur les « 273 classes qui ferment en septembre, contre seulement 180 ouvertures, soit au total près de 100 classes en moins », ce qui en fait l’un des départements les plus touchés.
« Sur les 470 suppressions de postes prévues à l’échelon national, 198 qui sont prévues à Paris »
Mais c’est dans la capitale, que la ministre doit faire face peut-être aux plus de critiques. Elisabeth Borne s’est retrouvée au milieu des tirs croisés de deux sénatrices, l’une de droite, l’autre de gauche. Agnès Evren d’abord, sénatrice LR. « Les fermetures de classes à Paris représentent 25 % des fermetures, car c’est 110 fermetures sur 470 au plan national », dénonce l’élue (voir le début de la vidéo), soulignant que « la carte scolaire pour la rentrée 2025 est très préoccupante. 110 fermetures, après de nombreuses fermetures l’an passé, avec 26 classes supprimées dans mon arrondissement du 15e. Cela représente le quart des fermetures envisagées à Paris ». Craignant « des classes surchargées », elle demande à la ministre si elle « envisage un réexamen des fermetures, notamment dans les milieux les plus défavorisés ».
Colombe Brossel, sénatrice PS de Paris, enchaîne. « Généralement, quand deux élus de bords différents touchent le même sujet avec la même position, c’est qu’on touche au cœur de l’intérêt général », commence cette proche d’Anne Hidalgo (voir en second dans la vidéo). « Aujourd’hui, sur les 470 suppressions de postes prévues à l’échelon national, c’est en fait 198 qui sont prévues à Paris. 40 % des fermetures de classes dans le premier degré auront lieu à Paris. Mais il n’y a pas 40 % des enfants de ce pays qui sont scolarisés à Paris. Et la baisse démographique à Paris, ce n’est pas 40 % de la baisse démographique du pays », recadre Colombe Brossel. Pour la socialiste, « on n’est pas loin d’une entreprise de destruction massive de l’enseignement public à Paris ».
« Il peut y avoir des ouvertures à certains endroits et des fermetures à d’autres » souligne Elisabeth Borne
Malgré ces questions répétées, les sénateurs ont certainement dû être quelque peu déçus des réponses d’Elisabeth Borne. Droite dans ses bottes, elle assume ces suppressions de postes qu’elle justifie par la démographie et le financement de ses priorités.
« J’entends toutes les remontées sur la carte scolaire et les incompréhensions. Il peut y avoir des ouvertures à certains endroits et des fermetures à d’autres. Et il y a les politiques où on accorde des moyens, que ce soit pour les classes de 4e et 3e, des brigades de remplaçants, pour l’école inclusive ou l’accueil d’élève allophones (élèves nouvellement arrivés en France qui parlent une autre langue que le français, ndlr). C’est important de dégager des moyens », répond Elisabeth Borne.
« Les brigades de remplacement ont été beaucoup fragilisées, notamment au moment où on a fait le dédoublement des classes »
Elle explique que « les brigades de remplacement ont été beaucoup fragilisées, notamment au moment où on a fait le dédoublement des classes maternelles, CP et CE1 », égratignant au passage l’action du premier quinquennat et de l’un de ses prédécesseurs rue de Grenelle, Jean-Michel Blanquer. Pour la nouvelle ministre, « c’est important pour la continuité pédagogique qu’on puisse reconstituer ces brigades de remplacement ».
Côté école inclusive, qui vise à offrir un environnement adapté à tous les enfants, notamment quel que soit leur handicap, elle entend continuer à développer « les pôles d’appui à la scolarité ». Elle « souhaite atteindre 500 pôles de plus, pour atteindre la couverture complète du territoire d’ici 2027, ce qui suppose 3.000 pôles d’appui à la scolarité ».
Si des classes vont fermer, elle souligne que « le taux d’encadrement va progresser » globalement, « il n’aura jamais été aussi élevé. On doit perdre à peu près 100.000 élèves et on a une stabilisation du nombre de professeurs ». Mais elle insiste :