« J’ai l’impression que c’est un grand concours à qui ira le plus loin en termes de régression sociale », a éructé Céline Brulin, sénatrice communiste. Les discussions de cette fin de soirée au Sénat ont cristallisé les oppositions. Alors que l’ambition affichée n’était autre que d’apporter du pouvoir d’achat aux Français, les sénateurs de gauche ont reproché à leurs collègues de droite de vouloir tuer les 35 heures.
Deux visions irréconciliables
Le Sénat a relevé le plafond de défiscalisation des heures supplémentaires de 5 000 à 7 500 euros et pérennisé le dispositif. Si la gauche a réclamé la suppression de cet article, la droite sénatoriale a tenté d’assouplir davantage le dispositif. Un amendement finalement retiré de la sénatrice RDSE, Nathalie Delattre, proposait de défiscaliser d’éventuelles majorations de rémunérations pour le travail le dimanche.
Un autre amendement, du LR Laurent Duplomb, visait à déplafonner totalement la défiscalisation des heures supplémentaires. Le ministre des Comptes publics, Gabriel Attal, bien qu’il « salue la volonté » du sénateur a tout de même donné un avis négatif évoquant un effet d’aubaine et de substitution aux salaires qui avait eu lieu entre 2007 et 2012, ainsi que le coût budgétaire qu’entraînerait cette mesure. « Cela coûterait 80 millions d’euros en 2023 et 200 millions en 2024 », assure le ministre. L'amendement a été retiré.
Autre article scruté de près et qui a été adopté par le Sénat : celui de la monétisation des RTT. « C’est une mesure qui donne plus de liberté aux salariés pour une rémunération de leur travail via la monétisation de leurs RTT », défend Gabriel Attal. Il note le côté temporaire de la mesure qui ne durera que jusqu’à la fin 2023. Toutefois le ministre des Comptes publics n’exclut pas l’idée de réexaminer cette mesure après cette échéance. Les sénateurs, fondamentalement opposés à cette mesure, ont bien tenté, en amendement de repli, de ne pouvoir monétiser les RTT que sous réserve d’une convention collective. « Afin de ne pas laisser le salarié seul face à l’employeur », a précisé Rémi Féraud, sénateur socialiste. Amendement rejeté.
« On assume de mettre un coin dans les 35 heures »
Le sénateur écologiste, Daniel Breuiller, engage, lui, l’idée qu’il vaudrait mieux augmenter les salaires et garder les « acquis sociaux ». « Il y a des générations de travailleurs qui se sont battus pour conserver le droit d’avoir une vie hors du travail, de permettre la récupération. Aujourd’hui dans l’assemblée je n’entends que l’idée de vouloir toujours travailler plus et la nécessité de défiscaliser et de désocialiser. » Côté Républicains, cette vision est assumée. « Oui on assume de mettre un coin dans les 35 heures, répond Christine Lavarde, sénatrice des Hauts-de-Seine. Ça vous évitera de nous le reprocher. »