Une fraction de retraite par capitalisation existe depuis 20 ans pour les fonctionnaires
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Une fraction de retraite par capitalisation existe depuis 20 ans pour les fonctionnaires

Le débat monte sur l’introduction d’une part obligatoire de retraite par capitalisation, face au déséquilibre générationnel à venir et ses conséquences sur le système par répartition. Le système n’est pourtant pas totalement étranger en France, puisque 4,5 millions fonctionnaires cotisent chaque mois pour un système similaire, sur leurs primes.
Guillaume Jacquot

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La négociation des partenaires sociaux sur l’avenir du système de retraites comportera une séance consacrée à la retraite par capitalisation. La CPME (Confédération des Petites et moyennes entreprises), en pointe sur le sujet, en a fait l’annonce jeudi 27 février, à l’issue d’une première réunion de travail du « conclave » sur les retraites, consacrée au calendrier de travail.

Face au « piège démographique » à venir qui verra le nombre d’actif par pensionné continuer de se creuser, l’organisation patronale propose l’introduction d’une strate supplémentaire dans la retraite pour le secteur privé, celle d’une capitalisation individuelle obligatoire. Chaque cotisation viendrait financer la future pension de celui qui les verse, contrairement au régime par répartition, où les cotisations actuelles financent les pensions des retraités actuels. Pour cette retraite additionnelle par capitalisation, la CPME défend une augmentation du temps de travail, à raison de trois jours supplémentaires par an, ou d’une heure par semaine.

Un système introduit par la loi de 2003 pour la fonction publique

Ce nouvel étage, imaginé pour le secteur privé, n’est pas inédit dans notre pays. Il existe déjà pour la fonction publique, c’est la retraite additionnelle de la fonction publique (RAFP), qui marque cette année son 20e anniversaire. Introduite par la réforme des retraites en 2003, elle est gérée par les partenaires sociaux, à l’instar de l’Agirc-Arrco, qui est la retraite complémentaire obligatoire des salariés du privé.

La création de cette retraite additionnelle répondait à une revendication syndicale, notamment de la CFDT, de prendre en compte les primes pour la retraite, lesquelles ne généraient pas de droits. Les cotisations à la RAFP se font sur les primes et indemnités (qui ne sont pas prises en compte pour la retraite de base) et les avantages en nature, selon la base de leur valeur fiscale. 4,5 millions de fonctionnaires y cotisent tous les mois. Le taux de cotisation est fixé à 10 % du montant de l’assiette (5 % pour le fonctionnaire et 5 % pour l’employeur), dans la limite de 20 % du traitement indiciaire brut.

Un taux de rendement des fonds investis de 4,4 % en moyenne depuis sa création

Elle fonctionne par point, et la valeur d’achat de ce point varie en fonction des années. L’établissement qui gère les cotisations fonctionne comme un fonds de pension public. Les cotisations versées sont placées dans des actifs financiers (actions et obligations notamment), liquidés au moment de la retraite, sous forme de rente ou de capital.

20 ans après sa mise en œuvre, il affiche un taux de rendement annualisé de 4,4 %. Au 1er janvier 2025, la valeur du point permettant de calculer la pension a été revalorisée de 4 %, soit 2 points de plus que l’inflation. L’établissement qui gère la RAFP revendique une gestion prudente et rappelle que les investissements respectent les principes d’une politique de développement durable grâce au label ISR (investissement socialement responsable). « Celle-ci concourt à l’atteinte de l’objectif d’alignement du portefeuille avec un scénario de hausse de la température de 1,5 °C », souligne l’établissement.

Selon son dernier rapport annuel, la valeur du total de ses actifs a atteint 43,3 milliards d’euros au 31 décembre (contre 38,2 milliards en 2022). Sur un an, les entrées de cotisation et les revenus des placements ont représenté 3 milliards d’euros.

Des partenaires sociaux divisés

Si les organisations syndicales sont parties prenantes dans la gestion de cette retraite additionnelle par capitalisation, tous n’en partagent pas la philosophie. Pour rappel, huit représentants des organisations syndicales représentatives dans la fonction publique siègent dans l’établissement qui gère cette RAFP, aux côtés de 8 représentants des employeurs de la fonction publique, et de 3 personnes qualifiées. Les partenaires sociaux sont également engagés dans la Préfon (Caisse nationale de prévoyance de la fonction publique), un régime de retraite complémentaire facultatif par capitalisation mutualisée.

La CFDT, par exemple, affirme qu’elle n’est « pas opposée à l’existence de systèmes de retraites supplémentaires par capitalisation », comme la RAFP, « mais le cœur du système doit être en répartition, c’est-à-dire que les objectifs collectifs en matière de retraite doivent être atteints par le mécanisme de la répartition », soulignait-elle par exemple en 2019.

La CGT considère que la capitalisation « n’est pas une solution », mais une « régression sociale ». La centrale rappelle qu’il « n’y a pas de mécanisme de solidarité » ou encore qu’elle « implique des placements financiers comportant des risques ».

« Nous ne souhaitons qu’une chose, c’est que la Préfon disparaisse le jour où les pensions des fonctionnaires seront effectivement calculées sur la base de la rémunération », affirmait Yves Veyrier, secrétaire général de Force Ouvrière en 2019.

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