Station de ski de Villard de Lans

Fermeture de la station de ski de l’Alpe du Grand Serre : « Quand tout s’arrête d’un coup et que rien n’a été préparé, c’est terrible »

Déficitaire depuis plusieurs années, la station de ski de l’Alpe du Grand Serre, en Isère, ne rouvrira pas ses portes pour la saison hivernale. Face au réchauffement climatique, ces difficultés rencontrées par les stations de moyenne montagne pourraient être surmontées, avec de l’anticipation et un meilleur appui de l’État, juge le sénateur écologiste Guillaume Gontard.
Rose Amélie Becel

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Ce 4 octobre, la communauté de communes de la Matheysine, en Isère, a pris la décision de fermer les portes de sa station de ski. Située à 1 368 mètres d’altitude, cette station confrontée depuis plusieurs années aux difficultés financières notamment liées au manque d’enneigement, ne rouvrira donc pas pour la saison hivernale.

L’Alpe du Grand Serre est la première station de ski de cette importance à fermer dans les Alpes du Nord, mettant en péril 200 emplois directs et indirects. Pour le sénateur de l’Isère et président du groupe écologiste Guillaume Gontard, « il y a un véritable problème d’anticipation » dans la gestion de la transition de ces stations de moyenne montagne.

Au lendemain de l’annonce de la fermeture de la station de ski de l’Alpe du Grand Serre, vous affirmiez sur les réseaux sociaux qu’il s’agissait d’un « déchirement pour tout un territoire ». Qu’est-ce que vous dénoncez dans cette décision qui paraît pourtant inéluctable, en raison de la raréfaction des chutes de neige ?

Évidemment c’est inéluctable, il suffit d’écouter les scientifiques. Avec le réchauffement climatique et l’absence de neige, des exemples de stations de ski en très grande difficulté qui sont contraintes à la fermeture, il y en a et il pourrait y en avoir bien d’autres. Mais, quoi qu’il en soit, cela reste un déchirement parce qu’une station de ski c’est une histoire, c’est toute une économie qui a façonné un territoire…

Au-delà de ça, il y a un véritable problème d’anticipation. Les solutions ne sont pas simples, mais quand tout s’arrête d’un coup et que rien n’a été préparé c’est terrible. À l’Alpe du Grand Serre, il y avait un projet de développement d’activités en cours, mais qui demandait du temps et des investissements pour être mis en œuvre. Sans anticipation et sans appui au niveau national, les élus finissent par jeter l’éponge.

En février dernier, la Cour des comptes publiait un rapport alertant sur le fait que seules « quelques stations » pourraient espérer poursuivre leur exploitation au-delà de 2050, mais que cette réalité était encore largement sous-estimée. C’est un constat que vous partagez ?

Complètement. On n’a pas du tout pris la mesure du problème. Le modèle économique du tout ski, sur lequel nous nous reposons encore, ne pourra perdurer que dans quelques grosses stations qui ne connaissent pas de difficultés économiques. Petit à petit, les collectivités comprennent ces problématiques, notamment lorsque la question se pose de continuer à financer ces stations au détriment d’autres services.

Ce que je regrette, c’est que ces collectivités se retrouvent seules face à des sujets qui peuvent créer des tensions sur leur territoire. Il faut que l’État prenne conscience de ce besoin de davantage de proximité. Il faudrait développer une vision départementale du problème, un maillage territorial, pour savoir quelles stations doivent investir en priorité pour développer un autre type de tourisme.

Au niveau national, en mai 2021, l’État a déployé un « plan Avenir montagnes » pour soutenir l’économie des stations après le Covid. L’État devrait également apporter un soutien financier important à l’organisation des Jeux olympiques d’hiver dans les Alpes. À votre sens, ces investissements vont-ils dans le bon sens ?

Le plan montagne, c’est beaucoup de discours pour peu d’avancées concrètes. Je le constate bien dans la région Auvergne-Rhône-Alpes, la réponse privilégiée dans les investissements est souvent technologique. Mais financer à coups de millions, sans concertation et réflexion, l’installation de canons à neige, c’est une solution de très court terme.

Je vois que le Premier ministre a validé une première garantie de financement de plus de 500 millions d’euros pour les Jeux olympiques d’hiver de 2030, alors même que nous sommes dans une situation financière difficile. Je suis évidemment favorable à l’organisation de grandes fêtes autour de la montagne, mais ce sont peut-être nos derniers Jeux d’hiver, il faudrait se servir de cet événement pour repenser notre rapport à la montagne.

Il y a aussi un problème de répartition de tous ces investissements entre les petites et les grosses stations, avec une puissante économie du ski qui capte énormément d’argent au détriment de petites stations qui tentent de survivre. Pourtant, ce sont souvent ces mêmes petites stations qui sont de bonne volonté pour essayer de sortir du tout ski et travailler sur un tourisme des quatre saisons, développer une économie agricole, artisanale. On a vu aussi pendant le Covid que des petites stations ont quasiment fait le plein grâce à la randonnée. Tout n’est pas perdu, à condition qu’on réfléchisse et qu’on anticipe.

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