Audrey Podcast

Green Deal : « Si nous faisons une pause, notre transition écologique sera made in China »

Le Green Deal ou Pacte vert européen cristallise la colère des agriculteurs dans toute l’Union européenne. En réponse, la Commission a déjà fait un pas en arrière en retirant un texte clé qui visait à réduire de moitié l’usage des pesticides. Pourtant, d’après les experts, ce paquet de lois si décrié, pourrait être la clé pour l’Union européenne, pour se démarquer à l’avenir des Etats-Unis et de la Chine. Explications avec le podcast « Trait d’Union ».
Audrey Vuetaz

Temps de lecture :

4 min

Publié le

Mis à jour le

Des centaines de milliers de manifestants, parfois très jeunes, dans les rues de nombreuses capitales européennes, nous sommes en 2019 et ils participent à la « marche du siècle » pour le climat.

C’est dans ce contexte que le Pacte vert européen ou Green deal voit le jour quelques mois plus tard. Il est porté par Ursula Von der Leyen, la toute nouvelle présidente de la Commission européenne, une Allemande, membre du PPE, la droite conservatrice.

L’écologie, ce n’est pas son cœur de métier, mais elle est influencée par l’arrivée de nombreux députés européens à la fibre écologiste fraichement élus au Parlement. Les citoyens européens ont parlé via les urnes, ils veulent plus d’écologie.

 

Alors tout se lance à marche forcée, avec beaucoup d’ambition. Le Pacte Vert qui regroupe une cinquantaine de textes doit permettre à l’Union européenne d’être neutre en carbone d’ici 2050 et de respecter ainsi les accords de Paris.

« Par exemple, d’ici à 2030, on va devoir doubler la part des énergies renouvelables dans notre mix énergétique, on va devoir aussi réduire très fortement notre consommation énergétique en isolant beaucoup plus les logements, on va également appliquer le principe de pollueur-payeur à l’aviation, au maritime qui jusqu’à présent étaient des secteurs qui n’étaient pas du tout touchés par la politique climatique, » explique Neil Makaroff, directeur du think tank Strategic perspectives et expert des politiques climatiques européennes.

 

En 2023, la machine du Pacte vert se grippe

 

Après une trentaine de textes ambitieux adoptés, et ce, malgré la crise du Covid et la guerre en Ukraine, les premiers freins commencent à se faire ressentir au Parlement européen.

« Le premier texte qui a bloqué, c’est la création d’une taxe carbone sur l’essence et le fioul que les ménages utilisent pour se chauffer. C’est un sujet très sensible politiquement, donc en contrepartie on a créé un fonds social européen pour aider ces ménages à acheter des pompes à chaleurs ou rénover leur logement. Le problème c’est que ce fonds social est beaucoup trop faible dans son montant pour vraiment les aider à faire face, » souligne Neil Makaroff.

 

 

Le paroxysme est atteint l’été dernier sur le texte « restauration de la nature » et notamment sur son volet agricole qui doit permettre de transformer 10% des terres en zones à haute diversité. La droite, l’extrême-droite et certains libéraux tirent à boulets rouges sur cette idée, dans le camp d’en face la gauche et d’autre libéraux veut aller encore plus loin. Les débats se crispent.

 

« On est dans quelque chose de politique, souligne Jérémy Decerle, eurodéputé Renew et éleveur, c’est toujours plus facile de s’adresser à un agriculteur en lui disant qu’on s’est opposés à un texte qui allait lui mettre des contraintes, sans lui expliquer le reste. »

« Depuis quelques mois, on voit monter une vague anti-climat », abonde Neil Makaroff, « pourtant, toute pause réglementaire est dangereuse, parce que la Chine et les Etats-Unis, eux, ne s’arrêtent pas. L’Europe risque d’être déclassée d’un point de vue industriel.  Si on ne fait rien, notre transition écologique va être une transition made in China, nous n’aurons pas d’industrie en Europe, pas d’emploi en Europe. A mon avis, il faut continuer, en accompagnant mieux les ménages et les agriculteurs. Le Pacte vert a été très fort sur le déploiement, maintenant, il faut s’assurer que tout le monde ait les outils de la transition, notamment les classes moyennes et populaires. »

Le volet social de la transition sera donc à construire dans le prochain mandat, si le Pacte vert ne connait pas de coup d’arrêt, après les européennes de juin prochain. 

 

Retrouvez « Trait d’union » le podcast d’Audrey Vuetaz ici

Pour aller plus loin

Dans la même thématique

Green Deal : « Si nous faisons une pause, notre transition écologique sera made in China »
6min

Environnement

Office français de la biodiversité : « Nos agents ne sont pas des écolos bobos parisiens qui ne comprennent rien à la vie des territoires », dénonce Olivier Thibault

Ce mercredi, Olivier Thibault, directeur général de l’Office français de la biodiversité (OFB) était auditionné par la commission du développement durable du Sénat, pour échanger avec les sénateurs sur le rapport rendu par la mission d’évaluation de la loi portant création de l’OFB. L’occasion d’évoquer, dans le contexte de la crise agricole, la question de l’armement des agents de cet établissement et l’application des normes environnementales.

Le

Green Deal : « Si nous faisons une pause, notre transition écologique sera made in China »
4min

Environnement

Scandale des eaux minérales : le Sénat augmente le taux de TVA de 5,5 à 20 % sur l’eau en bouteille en plastique

Dans le cadre de l’examen du budget, les sénateurs ont adopté un amendement supprimant le taux réduit de TVA dont bénéficient les eaux en bouteille plastique, tout en rappelant le scandale des eaux minérales traitées illégalement et les conséquences environnementales de l’usage du plastique. La mesure pourrait rapporter entre 150 et 300 millions d’euros.

Le

Green Deal : « Si nous faisons une pause, notre transition écologique sera made in China »
5min

Environnement

Pollution : « Les coûts sanitaires des substances chimiques des plastiques sont exorbitants pour la société »

A dix jours de la dernière phase des négociations du traité international visant à mettre fin à la pollution plastique, le député MoDem Philippe Bolo a remis un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST) sur « l’impact des plastiques sur la santé ». Il propose plusieurs recommandations.

Le