« Il n’y a pas d’économie bleue sans un océan en bonne santé », alerte cet eurodéputé socialiste

L’Union européenne va défendre son Pacte pour les océans lors du Sommet des Nations Unies qui se tient à Nice, du 9 au 13 juin. Une stratégie qui vise à concilier économie bleue et écologie marine. On en débat cette semaine dans Ici l’Europe, sur France 24, LCP et Public Sénat.
Alexandre Poussart

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Plus de 70 chefs d’Etat et de gouvernement sont attendus à Nice pour la 3e conférence de l’Organisation des Nations Unies sur les océans, qui se tient du 9 au 13 juin.

Un sommet avec beaucoup d’enjeux puisque les océans sont les poumons bleus de notre planète. Ils couvrent 71 % de la surface du globe et absorbent près de 30 % du CO2 mondial.

Et malgré leur rôle vital, ils subissent une pression croissante. 8 millions de tonnes de plastique y sont déversées chaque année. 34 % des stocks de poissons sont surexploités et seulement 3 % des océans bénéficient d’une protection stricte.

Face à cette urgence, l’Union européenne va défendre lors de ce sommet un Pacte européen pour les océans. « Le but central de ce pacte est de restaurer nos océans. Et notre stratégie comprend 6 piliers : la science, la protection active, la gouvernance internationale, la lutte contre les pollutions, une économie bleue durable et la sécurité », explique Geneviève Pons, directive générale de l’Institut Jacques Delors, et membre de la Mission européenne « Restaurer nos océans », à l’origine de ce pacte, interrogée dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24, LCP et Public Sénat.

30% d’aires marines protégées en 2030

D’ici à 2030, l’Union européenne se fixe un objectif : 30 % d’aires marines protégées dans ses eaux maritimes alors qu’elle en abrite 12 % actuellement et 10% d’aires marines très protégées, sans activités humaines. Une loi sur les océans sera soumise aux eurodéputés d’ici à 2027.

« On est très en retard. Mais il y a une prise de conscience qu’il n’y a pas d’économie bleue sans un océan en bonne santé. Il faut maintenant passer à l’action et réaliser cet objectif des 30% d’aires marines protégées », explique Christophe Clergeau, eurodéputé socialiste et président de l’intergroupe du Parlement européen sur la mer. « Comme la santé des océans se dégrade, les perspectives économiques de la pêche et autres activités sont en danger. »

Limiter la pêche au chalut

Mais il existe encore certains paradoxes, alors qu’en 2020, 60% des aires marines protégées abritaient une activité intense de pêche au chalut (filet qui racle les fonds marins), une pratique à fort impact sur les écosystèmes marins. « Il faut donner aux pêcheurs qui actuellement pratiquent le chalutage la possibilité de transformer leurs méthodes de pêche », explique Geneviève Pons. « Ça prendra du temps, mais il faut le faire et retenir quelque chose de très important. Et ça a été prouvé partout dans le monde. Si vous protégez une zone, vous allez la voir se régénérer très rapidement les stocks de poissons et la pêche autour de cette zone sera beaucoup plus profitable. Donc il y a vraiment un intérêt commun de la protection et de la pêche à avoir des zones marines. » En 2023, l’Union européenne avait décidé d’interdire le chalutage dans les profondeurs supérieures à 800 mètres.

Dans le Pacte que la Commission européenne défendra à Nice, l’UE prévoit de renforcer la lutte contre la pêche illégale. Pour les importations de poissons dans l’UE, un système de certification numérique des captures (IT Catch) devient obligatoire en janvier 2026.

Freiner Donald Trump dans sa course aux minerais des fonds marins

Autre enjeu de ce sommet des Nations Unies, renforcer la gouvernance internationale de la haute mer pour protéger les océans alors que les Etats-Unis de Donald Trump, qui boycotte l’événement, viennent d’autoriser l’exploitation minière dans les grands fonds marins, malgré le moratoire sur cette activité signé par de nombreux pays.

« Aller gratter les grands fonds marins pour obtenir les nodules polymétalliques cela fait rêver tout le monde mais il faut s’inquiéter d’une telle activité car toutes les données scientifiques montrent pour le moment que cela va faire des dégâts considérables sur l’écosystème marin », explique Geneviève Pons. « Cela va libérer le dioxyde de carbone qui y était emprisonné, la colonne d’eau va devenir beaucoup plus opaque, et la biodiversité va être menacée. »

Du côté de la droite européenne, on ne s’interdit pas à long-terme une telle exploration minière, cruciale pour la compétitivité économique mondiale. « Le moratoire sur ces activités minières est une bonne chose et il faut attendre davantage de données scientifiques pour savoir si on peut avancer dans cette voie », estime l’eurodéputé portugais Paolo Do Nascimento Cabral, membre du groupe du Parti populaire européen au Parlement, et vice-président de l’intergroupe parlementaire sur la mer.

Son collègue socialiste Christophe Clergeau défend, lui, « une interdiction totale car ce serait une folie d’aller piller le fond des océans. Il y a beaucoup mieux à faire. Utilisons les mers en lien avec les pêcheurs pour développer la production des énergies vertes. En Europe, on aura de l’énergie verte produite en Europe, des emplois et une nouvelle filière industrielle en Europe. Ça sera du gagnant-gagnant pour tout le monde. »

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