France Climate
France's President Emmanuel Macron, third right, speaks at the opening of a special climate meeting at the Elysee Palace in Paris, Monday, Sept. 25, 2023. President Emmanuel Macron unveiled France's approach at climate-related commitments within the next seven years after special government meeting on Monday. (AP Photo/Michel Euler, Pool)/MEU106/23268496425837/POOL PHOTO/2309251554

Planification écologique : la méthode suscite l’inquiétude des sénateurs 

Après son intervention télévisée, le 24 septembre, Emmanuel Macron présente ce lundi 25 septembre le plan du gouvernement, issu des travaux du Secrétariat général à la planification écologique, pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Le but ? Respecter les objectifs européens et ceux de la stratégie nationale bas carbone.
Henri Clavier

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Le 16 avril 2022, dans l’entre-deux-tours de  l’élection présidentielle, Emmanuel Macron annonçait vouloir charger sa future première ministre de la planification écologique. Pour quelles raisons ? « Parce que cela concerne tous les domaines, tous les secteurs, toutes les dépenses, tous les équipements, tous les investissements, bref toutes les politiques », répondait le président de la République. Un an et demi plus tard, alors que le Secrétariat général pour la planification énergétique (SGPE) présente sa feuille de route, la capacité d’action de cet organe est remise en question. La planification écologique, dont la présentation de la feuille de route a déjà été repoussée plusieurs fois, doit permettre de réduire de 55% les émissions de CO2 d’ici 2030, conformément aux objectifs de l’Union européenne. Les moyens d’atteindre ces objectifs ont été détaillés par le président de la République ce 25 septembre.

L’idée initiale, empruntée à Jean-Luc Mélenchon, candidat malheureux du premier tour de la présidentielle, vise une méthode participative afin d’organiser la transition écologique dans tous les secteurs. Au Sénat, certains critiquent un coup de com’ alors que le Secrétariat général de la planification écologique peine à prendre forme. « Dans la globalité, c’est assez flou. J’ai trouvé que le président de la République était assez brouillon dans ses annonces. On avance à tâtons », regrette le sénateur écologiste du Rhône, Thomas Dossus, en désaccord avec la méthode.

Une planification verticale ?

 « Comme dit le Président, « l’écologie à la française » et donc la planification, signifient que chaque territoire s’adapte, à sa façon pour rentrer dans les clous d’une planification plus globale. Cette formule montre aussi que nous refusons l’écologie punitive et souhaitons la concertation avec les élus et les acteurs locaux », commente Nadège Havet, sénatrice RDPI du Finistère, pour expliciter les mots d’Emmanuel Macron. En insistant sur la possibilité pour « chaque métropole de s’adapter », la sénatrice désamorce l’une des principales critiques adressées à la planification écologique, la verticalité. La perception d’un État stratège et peu enclin à la discussion a été un sujet de crispation important pour les collectivités territoriales au moment de la mise en œuvre des textes sur le Zéro artificialisation nette (ZAN) ou sur les Zones à faibles émissions (ZFE). Une verticalité également perçue comme dangereuse par le centriste Patrick Chauvet qui « partage l’orientation de fond, mais pas la forme. » Ce dernier perçoit davantage le SGPE comme « un organe animateur qui doit permettre la concertation avec les territoires. »

 « Pour l’instant, c’est trop étatique, trop vertical, un peu trente glorieuses », affirme Thomas Dossus tout en expliquant qu’au « vu du chaos climatique qui arrive il faut un plan sur le long terme, donc oui la planification est nécessaire. Construire une planification, c’est contraindre, faire des choix et établir une priorité. » Une dernière dimension que les leaders des partis de gauche, qui se sont entretenus le 18 septembre avec Élisabeth Borne à ce sujet, trouvent insuffisante.

 « Les arbitrages ne vont pas vraiment dans le sens du Secrétariat général »

Si les décisions peuvent apparaître opaques et centralisées au sein du SGPE, Nadège Havet y voit surtout un « moyen d’impliquer tous les ministères, et pas seulement le ministère de la transition écologique, afin de créer une politique publique véritablement transversale. » En somme, l’ambition présidentielle consiste à centraliser les décisions au sein du SGPE en mobilisant des crédits irriguant tous les ministères et créer une synergie. Néanmoins, à gauche de l’hémicycle, on regrette un problème de méthode, une approche verticale contradictoire avec l’objectif final. « Pour l’instant, les arbitrages ne vont pas vraiment dans le sens du Secrétariat général. Il faut aussi donner un poids politique au SGPE », pointe Thomas Dossus qui regrette l’absence de vision à long terme, notamment budgétaire.

Paradoxalement, la planification semble encore reposer sur une approche de court à moyen terme. Par exemple, Emmanuel Macron annonçait une sortie du charbon pour 2027, une promesse déjà formulée en 2018… pour l’horizon 2022. « Il y a besoin d’un niveau d’investissement sur plusieurs années. 7 milliards c’est bien, mais on ne sait pas ce qui sera ajouté les années suivantes. Il faut une loi de programmation sur le climat, ça devient indispensable », martèle Thomas Dossus. Emmanuel Macron avait pourtant fait de cette vision à long terme le cœur de son ambition affirmant que cette « politique des politiques » devait aller « deux fois plus vite ». Si le président de la République souhaitait « susciter une mobilisation générale de la nation pour l’environnement « avec la création du SGPE, les effets pourraient s’avérer limités sans changement de méthode.

Les mobilités, angle mort du Secrétariat général pour la planification énergétique ?

Des effets qui paraissent d’autant plus limités que certains secteurs semblent constituer des angles morts de la stratégie gouvernementale. « Pour l’instant c’est encore difficile de nous parler de planification au sens propre du terme, les 100 milliards promis sur le ferroviaire, n’ont toujours pas de traduction budgétaire », déplore Thomas Dossus qui rappelle que les transports sont à l’origine de 32.2 % des émissions de CO2 en France. Néanmoins, Nadège Havet nuance, à raison, « qu’un plan d’action général de cette ampleur n’a jamais été fait. » La sénatrice Renaissance dément l’existence d’angles morts sur les mobilités : « Il y a une réflexion importante sur les mobilités du quotidien, le plan vélo mais aussi les RER métropolitains dont le projet de loi va arriver très prochainement au Sénat. » Assurément, la route reste longue pour trouver un consensus sur la méthode à suivre pour le SGPE.

 

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