Une négociation laborieuse
Le signe que la rentrée est bien là ? Le Mercosur qui revient. Après vingt-cinq ans de négociations, et plusieurs longs mois de bataille politique, la Commission européenne dévoile ce mercredi l’accord finalisé entre l’Union européenne et les pays du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay). Conclu au mois de décembre, il est inscrit à l’ordre du jour de la réunion hebdomadaire des commissaires européens. En l’état, il prévoit la suppression progressive de près de 90 % des droits de douane entre les deux blocs.
Sur le papier, c’est un « accord de partenariat stratégique » : une ouverture massive des barrières douanières pour les industriels européens, des débouchés agricoles pour les pays du Mercosur. Un grand marché de 700 millions d’habitants, que la Commission présente comme une chance historique. Mais en coulisses, le bras de fer politique n’est pas terminé.
Des concessions obtenues par la France
La France va-elle tenter de faire dérailler l’accord ? Emmanuel Macron a longtemps affiché une opposition ferme. Dès 2019, il qualifiait le texte de « très mauvais », « pas acceptable en l’état ». Comment lutter contre le bœuf brésilien ou l’éthanol paraguayen, produits à moindre coût avec des standards environnementaux plus souples ? En première ligne pour dénoncer l’accord, les syndicats agricoles ont maintenu la pression sur l’exécutif. Fin 2024, le président français considérait encore le texte comme « inacceptable en l’état » : trop dangereux pour les éleveurs. Et aussi, trop sensible politiquement.
Au mois de juin, à l’occasion de la visite d’Etat de Lula en France, Emmanuel Macron avait mis de l’eau dans son vin. Et se disait prêt à signer un accord « d’ici la fin de l’année » si celui-ci était associé de clauses miroirs » ou de « clauses de sauvegarde ». Message transmis. Pour obtenir le soutien de Paris, la Commission européenne propose désormais un protocole politique incluant des mécanismes dits de « circuit breakers » : des garde-fous qui permettraient de limiter temporairement les importations de viande bovine, de poulet et de sucre, si elles menaçaient la production européenne. Ces mesures visent à rassurer les agriculteurs français, tout en maintenant la dynamique vers la ratification du traité d’ici la fin 2025. Suffisant pour convaincre Emmanuel Macron de ne pas saboter l’accord ? Ce mardi, la FNSEA ne semblait pas convaincue. « On est extrêmement réservé sur les clauses de sauvegarde parce qu’elles sont extrêmement difficiles à activer sur le plan juridique », a déclaré son président Arnaud Rousseau, à l’occasion d’une conférence de presse.
Une procédure en plusieurs temps
La procédure de ratification de l’accord comporte plusieurs étapes. La présentation mercredi devant la Commission européenne en est une première. Une fois entériné par le collège des commissaires, le texte devra ensuite passer par le Conseil de l’UE, où les ministres voteront à la majorité qualifiée pour le volet commercial. Traduction : la France pourra protester, mais pas bloquer seule. Il lui faudra trouver des alliés.
Puis viendra le tour de l’adoption par le Parlement européen. Enfin, pour la partie politique de l’accord (coopération, environnement), chaque État membre devra ratifier. Là encore, Paris garde une carte en main : ralentir, temporiser, ou brandir son veto. Le feuilleton, entamé il y a vingt-cinq ans, est loin d’être clos.