L’examen du budget 2025 a été suspendu sitôt le gouvernement de Michel Barnier censuré mercredi soir. À ce stade, trois pistes législatives se dégagent pour assurer la continuité de la vie de la nation, sans que les juristes ne semblent s’accorder sur les modalités d’application de certains mécanismes d’urgence, quasiment inédits.
Diplomatie : les hausses d’effectifs, prévues dans le budget, rassurent la commission des affaires étrangères du Sénat
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Dans un monde instable, les moyens de la diplomatie française progressent. Auditionnée au Sénat ce 12 octobre, la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères Catherine Colonna a présenté un projet de budget pour 2023 en nette hausse. Sur un an, les moyens du Quai d’Orsay devraient progresser de 9 %. L’aide publique au développement bénéficie proportionnellement de la progression de la plus importante, le budget de l’action extérieure de l’État – cœur de la diplomatie – étant relevé, lui, de 5 %. « C’est le taux d’inflation mais je souhaite saluer néanmoins cet effort nouveau par rapport à des années où nous avons plutôt assisté à des compressions budgétaires », a salué Christian Cambon (LR), le président de la commission des affaires étrangères, de la défense, et des forces armées. « Il fallait un projet de budget ambitieux. La trajectoire à la hausse de notre budget se confirme et s’amplifie », a défendu la ministre.
L’ancienne ambassadrice a particulièrement insisté sur la création de 106 postes supplémentaires en 2023, une première en 30 ans. Sur les deux dernières décennies, les effectifs de la diplomatie française ont fondu de 30 %. « Le budget marque donc une rupture avec cette tendance qui n’était plus soutenable », selon elle. Christian Cambon s’est là aussi réjoui de cette nouvelle. « Depuis des années nous avons répété combien notre réseau s’affaiblissait. « Il était plus que temps de redonner des moyens humains au Quai d’Orsay. »
« Il est essentiel que la diplomatie intervienne plus activement »
Sept mois après le déclenchement de l’offensive russe en Ukraine, la France a également été confrontée à l’émergence de crise aussi bien sur le continent asiatique que sur le continent africain. Dans ce monde « plus brutal », « il est essentiel que la diplomatie intervienne plus activement », a-t-elle appelé. « Intérêts partout contestés », « menaces » pesant sur les ressortissants ou les emprises françaises, actions hostiles sur Internet : cette progression budgétaire, qui sera soumise au Parlement, ne sera pas de trop pour aborder tous les dangers listés par la ministre.
Les sénateurs ont « encore en tête » les violences contre l’ambassade de France au Burkina Faso début octobre. Dans ce contexte, une enveloppe de 5 millions d’euros sera consacrée à la sécurisation d’ambassades. À Ouagadougou, des renforts de gendarmerie seront déployés mais d’autres ambassades seront également renforcées par la hausse des budgets : Islamabad, Bagdad ou encore Addis-Abeba. Une petite partie des nouveaux moyens humains sera également fléchée pour la sécurité.
Catherine Colonna ajoute en outre des moyens supplémentaires sur le front de la cybersécurité mais aussi de la communication. 2,5 millions d’euros vont être mobilisés pour lutter contre la désinformation en ligne et la propagande hostile, « souvent d’origine russe », a précisé la cheffe de la diplomatie.
Diplomatie : « Nous tenons à ce qu’il soit bien clair dans l’esprit de tous qu’il y a une professionnalisation nécessaire »
À quelques jours du lancement des États généraux de la diplomatie, Christian Cambon a fait savoir que ce rendez-vous serait l’occasion de « revenir sur les conséquences » de la réforme de la haute fonction publique, dont le principe d’éteindre progressivement les grands corps. La commission sénatoriale s’était dressée contre les conséquences de cette réforme qui porte un coup à l’existence du corps diplomatique. La mission d’André Vallini (PS) et Jean-Pierre Grand (Les Indépendants) avait appelé cet été à suspendre la réforme. Pour Christian Cambon, « le gouvernement pourrait avoir beaucoup à gagner à prendre quelques-unes » des propositions du rapport.
Catherine Colonna a indiqué que son ministère allait « poursuivre la mise en œuvre de la réforme de la haute fonction publique », tout en rassurant son auditoire. « Nous tenons à ce qu’il soit bien clair dans l’esprit de tous qu’il y a une professionnalisation nécessaire, des réflexes professionnels, une expérience professionnelle qui s’acquiert au fil des années ». L’enjeu des État généraux de la diplomatie, à laquelle deux représentants du Sénat seront conviés, sera de « tracer les contours de la diplomatie professionnelle de demain », selon ses mots.
Autre point sensible abordé durant l’échange : la politique des visas avec l’Afrique du Nord. En septembre 2021, Emmanuel Macron a pris la décision de réduire drastiquement la délivrance de visas pour les demandeurs des pays du Maghreb, en réaction au manque de coopération de ces États pour le retour de leurs ressortissants en situation irrégulière. Or, selon la socialiste Hélène Conway-Mouret, cette politique « abîme durablement notre relation bilatérale sur l’ensemble du continent africain ». La sénatrice représentant les Français de l’étranger estime que davantage de personnels dans les services consulaires. « Nous avons des créations de postes et des crédits. Je pense qu’il ne faudrait pas gâcher ce qui est une opportunité, qui sera peut-être unique, ne pas nous attacher à seulement réparer, mais avoir un petit peu d’ambition ». Sur le réseau consulaire, la ministre a déclaré que le déploiement se poursuivait « au rythme des moyens ».