L’examen du budget 2025 a été suspendu sitôt le gouvernement de Michel Barnier censuré mercredi soir. À ce stade, trois pistes législatives se dégagent pour assurer la continuité de la vie de la nation, sans que les juristes ne semblent s’accorder sur les modalités d’application de certains mécanismes d’urgence, quasiment inédits.
Référendum d’initiative partagée : une proposition de loi pour le rendre « réalisable » rejetée par la commission des lois du Sénat
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Lors de leur niche parlementaire au Sénat le 22 novembre prochain, les socialistes proposent un texte pour rendre « réalisable » le dispositif de référendum d’origine partagée. Cet outil, prévu par la Constitution, n’a jamais été mis en œuvre. En effet, les conditions de sa réalisation sont très contraignantes. Avec cette réforme du RIP, « nous voulons faire des citoyens, des gouvernants et des gouvernés », explique Eric Kerrouche, sénateur socialiste des Landes et porte-parole du groupe socialiste au Sénat.
Un texte rejeté en commission des lois
Examinée en commission le 15 novembre, la proposition de loi de Yan Chantrel, sénateur socialiste des Français de l’étranger et auteur du texte, a pourtant été rejetée par la commission des lois. Le rapporteur Philippe Bas, ancien secrétaire général de la présidence sous Jacques Chirac, estime en effet dans son rapport que « si la proposition de loi contribu [e] utilement aux réflexions sur le sujet, les solutions qu’elle envisag [e], pour certaines inabouties ou contestables dans leur principe, ne [peuvent] être appréhendées de manière autonome par rapport aux réflexions conduites dans d’autres instances ». Il fait ici référence à un groupe de travail sur les institutions, mis en place par Gérard Larcher, ainsi qu’aux rencontres de Saint-Denis, autour des chefs de partis représentés au Parlement, initiées par Emmanuel Macron fin août 2023.
Un « deux poids deux mesures » avec la proposition de loi constitutionnelle des Républicains
Une mesure en particulier attire l’attention : dans leur proposition de loi, les socialistes souhaitent étendre le champ du référendum aux questions fiscales. Aujourd’hui, un référendum ne peut concerner que l’organisation des pouvoirs publics, les réformes relatives à la politique économique et sociale et aux services publics qui y concourent, ou bien la ratification d’un traité non contraire à la Constitution mais susceptible d’influencer le fonctionnement des institutions. Cette mesure a été rejetée par la commission des lois et son rapporteur LR, au motif que l’élargissement du champ du référendum « tendrait à faire de la voie référendaire un mode d’adoption des lois non plus dérogatoire, mais quasi concurrent de la voie parlementaire ». Motif qui fait vivement réagir les socialistes du Sénat. Eric Kerrouche, dénonce un « deux poids deux mesures », avec la proposition de loi constitutionnelle du groupe LR du Sénat, étudiée le 12 décembre prochain, qui vise à élargir le champ du référendum aux questions relatives à « l’entrée et au séjour des étrangers en France ainsi que le droit de la nationalité ».
« Si le Président souhaite faciliter le RIP, que les sénateurs du groupe Renaissance votent notre proposition de loi »
Si le parcours de cette proposition de loi semble entravé par ce rejet en commission, le sujet n’est pas clos pour autant. En effet, la réforme de la procédure du RIP a été évoquée par Emmanuel Macron lui-même, notamment le 5 octobre dernier, devant le Conseil constitutionnel. Il avait soulevé l’idée d’abaisser le seuil de signatures nécessaires pour déclencher la procédure, à 4,8 millions aujourd’hui, soit 10 % du corps électoral. Une proposition que formalise également la proposition de loi socialiste, qui souhaite le ramener à un million. Peut-être la nouvelle édition des rencontres de Saint-Denis, prévue ce vendredi, est-elle l’occasion pour les socialistes, de trouver un soutien auprès du Président de la République pour leur proposition de loi. Pourtant, Olivier Faure, Premier secrétaire du PS, a refusé l’invitation. « Ce n’est pas parce qu’Emmanuel Macron a évoqué l’idée d’abaisser le seuil du RIP qu’il va le reprendre à son compte », déplore Éric Kerrouche, « à force de toucher à tous les outils de la démocratie, il les a galvaudés », regrette-t-il, en rappelant la déception qu’ont suscité en leur temps le grand débat et ses cahiers de doléances, et la Convention citoyenne sur le climat dont seule une proposition a été reprise. « C’est le Parlement qui est le plus légitime pour discuter de ce genre de réforme », affirme quant à lui Yan Chantrel, « si le Président souhaite faciliter le RIP, que les sénateurs du groupe Renaissance votent notre proposition de loi ».
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