Afghanistan : « Les talibans sont une menace pour tous », rappelle Ahmad Massoud

De passage en France et au Sénat où il s’est entretenu avec Gérard Larcher, Ahmad Massoud, opposant afghan et fils du commandant Massoud, appelle la communauté internationale à cesser « sa politique passive » à l’égard des talibans. Interview.
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Depuis le retour des talibans au pouvoir à l’été 2021, Ahmad Massoud, fils du commandant Massoud, appelle à un soutien de la communauté internationale. A 34 ans, le chef du Front national de la résistance, qui revendique 4000 combattants, reprend la lutte de son père contre les talibans. De passage en Europe, Ahmad Massoud demande une reprise du dialogue avec les forces démocratiques afghanes, pour faire pression sur les talibans.

Qu’est-ce que vous attendez de votre passage en Europe ?

Ahmad Massoud. Depuis plus de deux ans, nous sommes les témoins d’une situation en Afghanistan où tout ce qui a été réalisé ces dernières années est en train de disparaître. Les femmes sont systématiquement prises pour cible. L’apartheid de genre est un phénomène réel. Le terrorisme se développe. Je pense qu’il est temps de vraiment porter attention sur ce qu’il se passe en Afghanistan.

Vous avez le sentiment que les pays européens ont abandonné l’Afghanistan ?

Je ne dirais pas abandonné, mais il y a une politique passive de la part de la communauté internationale. Rappelons-nous que cette politique passive a eu les conséquences mortifères dans les années 1990.

Vous avez publié un livre « Notre liberté » (éditions Bouquins) dans lequel vous écrivez vouloir être la voix de votre pays mais quelle voix ?

Celle des femmes et des hommes d’Afghanistan, celle de la démocratie d’Afghanistan. La voix de la liberté.

Vous dites dans ce livre, que les talibans d’aujourd’hui sont pires que les talibans d’hier.

Ai-je tort ? Leurs actions parlent pour eux.

Selon vous, le seul moyen de sortir votre pays de cette situation est d’arrêter les négociations avec les talibans.

C’est la clé. Je pense qu’il est essentiel que la communauté internationale s’engage avec les forces démocratiques afghanes, pour faire pression sur les talibans afin qu’un dialogue puisse reprendre. Parce que ce régime illégitime qui s’est imposé aux Afghans par les armes et cette oppression qui s’exerce, ne sont pas acceptables. Et c’est une menace pour nous tous.

Vous avez rencontré le président du Sénat. Vous étiez au Parlement européen hier. Comment se sont passés les échanges ?

C’était peut-être la première fois que nous sentions un tel changement de regard, une telle bienveillance envers l’Afghanistan et la situation des Afghans. Je ne dis pas que ce n’était pas le cas avant. Mais je crois qu’après deux ans, les talibans montrent leur vrai visage. Ils n’ont pas changé, ils n’ont pas tenu leurs promesses. Et je sens qu’il y a une vraie attention désormais de la part des Européens. Et c’est un immense espoir pour les Afghans et pour les forces démocratiques du pays.

Mais vous ont-ils donné des preuves de cet engagement ?

Je pense qu’on s’en approche mais c’étaient vraiment des échanges positifs et constructifs.

Vous voulez représenter la résistance aux talibans dans votre pays. Avez-vous des soutiens ? Et si oui, combien êtes-vous ?

Nous sommes 43 millions de résistants. Les Afghans ne soutiennent pas les talibans. Si les talibans le pensent, je les défie d’organiser des élections. Et nous verrons bien qui l’emporte.

Comme votre père, vous ne vouliez pas combattre. Mais à vos yeux, vous n’avez pas le choix ?

Absolument. Les talibans refusent de parler, de négocier avec les oppositions et les forces démocratiques du pays pour trouver une sortie de crise. Tout ce qu’ils disent c’est : rendez-vous et tout ira bien pour l’avenir de l’Afghanistan. Ce n’est pas une façon de parler. Donc quand vous n’avez pas d’autre choix que de vous défendre, vous le faites. Je suis sûr que cette oppression aura une fin et que les Afghans seront victorieux. Je veux juste faire mon devoir, protéger mon pays, du mieux que je peux.

 

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