Farmers protest in Poznan, Poland – 09 Feb 2024
Tractors block the streets during the demonstration. Farmers arrived by tractors to Poznan, one of the biggest cities in Poland to block the city streets in protest, farmers from all over Poland started a protest that is expected to last 30 days. The protest was organized by the Solidarity trade union of farmers, and the reason for it, is the recent decision of the European Commission to extend duty-free trade with Ukraine until 2025. In addition, Polish farmers do not want the implementation of the Green Deal, the import of cheap agricultural products from Ukraine and demand support for animal breeding. Solidarity said that, apart from the blockade of border crossings with Ukraine, they also planning to block roads in the big cities throughout the country between Feb 9 and March 10. - Attila Husejnow / SOPA Images//SOPAIMAGES_AHUSEJNOW_7311/Credit:SOPA Images/SIPA/2402101131

Colère des agriculteurs : tour d’Europe des revendications

Italie, Espagne, Pologne… Les agriculteurs européens poursuivent leurs mobilisations, pour maintenir la pression avant une réunion des ministres de l’Agriculture de l’Union européenne la semaine prochaine. Si les motifs de la colère se rejoignent, la principale revendication de ces mouvements varie selon les pays. Tour d’horizon.
Rose-Amélie Bécel

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Avec l’ouverture du Salon de l’agriculture en ligne de mire ce samedi, les exploitants français attendent de pied ferme de nouvelles annonces de Gabriel Attal, lors d’une conférence de presse prévue ce 21 février. Au même moment, partout en Europe, les mobilisations se poursuivent, notamment en Pologne où elles gagnent en intensité.

En Pologne, la gronde contre les importations ukrainiennes

Ce mardi, les tracteurs polonais se massent à proximité de la frontière avec l’Ukraine, autour d’une centaine de points de passage. Dans la matinée, un groupe d’agriculteurs a également bloqué une voie ferrée, assurant le transport de marchandises entre les deux pays, pour déverser au sol les céréales ukrainiennes contenues dans des wagons. « Comment peut-on ouvrir la frontière à quelque chose qui n’est nullement contrôlé ? Nous, quand on transporte quelque chose à l’étranger on passe des centaines de contrôles différents alors que là, rien du tout », s’est indigné un exploitant polonais auprès de l’AFP.

Depuis l’invasion russe, l’Union européenne a choisi d’exempter les importations ukrainiennes de droits de douane. Depuis, partout en Europe, les accusations de concurrence déloyale fusent contre Kiev, notamment chez les producteurs de céréales, de sucre et de volailles. La Pologne, dont les routes sont fortement empruntées par les entreprises ukrainiennes pour continuer à exporter, est en première ligne. Début février, des agriculteurs polonais avaient déjà bloqué un camion ukrainien pour déverser sur la route toute sa cargaison de céréales, entraînant l’ouverture d’une enquête par le parquet polonais.

Pour calmer la colère, la Commission européenne a proposé fin janvier de prolonger l’exemption de droits de douane jusqu’en juin 2025, tout en l’assortissant de « mesures de sauvegarde ». Cette année, si les exportations ukrainiennes atteignent les mêmes volumes qu’en 2022 et 2023, alors l’UE rétablira des droits de douane pour les œufs, les volailles et le sucre. Des mesures de protection jugées insuffisantes, puisque le sujet provoque désormais des mobilisations internationales. Selon le réseau de médias européens EurActiv, des organisations agricoles de République tchèque, Slovaquie, Pologne, Hongrie, Lituanie et Lettonie ont prévu de mener des opérations coordonnées devant des postes-frontières, ce 22 février.

En Grèce et en Italie, la question cruciale des revenus

Ce mardi, en Grèce, après plusieurs jours de blocages routiers, 250 tracteurs convergent aussi vers la capitale. Au cœur de leurs revendications : une dénonciation de la baisse des revenus agricoles. Durement éprouvés par les inondations et les incendies qui ont ravagé le pays l’année passée, les agriculteurs grecs peinent à être indemnisés. Après avoir versé une aide exceptionnelle comprise entre 2 000 et 4 000 euros l’an passé, le gouvernement a promis aux professionnels une nouvelle aide de 5 000 à 10 000 euros pour cette année.

Les exploitants grecs réclament également une diminution des coûts de l’électricité et du carburant – pour lequel il n’existe pas de fiscalité spécifique au secteur, comme c’est par exemple le cas en France. Pour abaisser les coûts de production, le gouvernement a ainsi promis de réduire les factures d’énergie des agriculteurs au cours des dix prochaines années et de réduire la TVA sur les engrais et les produits d’alimentation pour animaux de 13 % à 6 %. Face à la poursuite des mobilisations, le Premier ministre conservateur Kyriakos Mitsotakis, qui a rencontré les organisations agricoles la semaine dernière, a d’ores et déjà annoncé que le gouvernement n’avait « rien de plus à donner » aux agriculteurs, rapporte l’AFP.

Ce sont des revendications similaires, pour une meilleure rémunération, qui ont poussé plus d’un millier d’agriculteurs italiens dans les rues de Rome le 15 février dernier. Un petit groupe s’est rassemblé devant le Palazzo Chigi, siège du gouvernement, pour porter ses revendications auprès de Giorgia Meloni. Dans le cadre d’une table ronde organisée autour d’associations d’agriculteurs italiens, la Première ministre a déjà annoncé qu’elle restaurerait un certain nombre d’exemptions fiscales pour les exploitants aux revenus les plus faibles.

En Espagne, des engagements contre les accords de libre-échange

Depuis deux semaines, les mobilisations d’agriculteurs ne faiblissent pas non plus en Espagne. Après des blocages routiers, plusieurs tracteurs ont convergé jeudi dernier vers le siège du ministère de l’Agriculture, en plein cœur de Madrid. Un rassemblement similaire est annoncé le 21 février. L’union des paysans catalans, l’une des principales organisations à l’origine des mobilisations, dénonce particulièrement la concurrence déloyale générée par les accords de libre-échange.

Le ministre espagnol de l’Agriculture, Luis Planas, a déjà annoncé une série de mesures, parmi lesquelles le soutien au niveau européen du « principe de réciprocité dans l’utilisation des produits phytosanitaires dans la production alimentaire ». Aussi nommés « clauses miroirs », ces mécanismes obligeraient les pays non-européens signataires d’accords de libre-échange avec l’UE à respecter les mêmes normes que celles en vigueur sur le sol européen, notamment en matière d’utilisation de pesticides et de respect du bien-être animal.

Sous la pression du monde agricole, les ministres européens de l’Agriculture sont attendus le 26 février prochain pour une réunion du Conseil de l’Union européenne. Des discussions qui visent un objectif : « apporter des réponses à la fois rapides et structurelles à la crise actuelle du secteur agricole ».

Partager cet article

Dans la même thématique

Colère des agriculteurs : tour d’Europe des revendications
4min

International

Chercheurs américains en Europe : « Une vaste comédie », selon cette eurodéputée insoumise  

L’Union européenne débloque 500 millions d’euros pour attirer les chercheurs américains maltraités par Donald Trump. Mais cette enveloppe est-elle suffisante ? L’Union a-t-elle les moyens d’accueillir des chercheurs américains alors que sa propre recherche manque de financements ? On en débat cette semaine dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24, LCP et Public Sénat.

Le

Frappes israéliennes en Iran : un revers pour la diplomatie de Trump ?
7min

International

Frappes israéliennes en Iran : un revers pour la diplomatie de Trump ?

Les bombardements israéliens sur une série de sites iraniens durant la nuit écoulée viennent questionner l’état de la relation entre Washington et l’État hébreu, qui ont connu une série de hauts et de bas lors des derniers mois. Ce vendredi, Donald Trump a choisi de mettre la pression sur Téhéran.

Le

Pakistan Iran Mideast Wars
5min

International

Frappes israéliennes : « Israël veut replacer l’Iran comme l’ennemi principal de la région »

Cette nuit, Israël a frappé à de nombreuses reprises des sites nucléaires et des dirigeants de l'armée iranienne en justifiant une « menace nucléaire ». L’Iran a riposté avec une centaine de drones lancés vers le territoire israélien. Les attaques se sont poursuivies dans la journée. Pour Bernard Hourcade, directeur de recherche émérite au CNRS et spécialiste de l’Iran, la justification d’Israël n’est qu’une « façade » et vise à occulter la question palestinienne. Selon lui, cette série d'attaques va renforcer l’isolement d’Israël. Entretien.

Le

Iran nuclear water reactor of Arak
6min

International

Attaques d'Israël contre l'Iran : ce que l'on sait du programme nucléaire de Téhéran

Israël a invoqué la menace nucléaire pour justifier une série d’importants bombardements sur le sol iranien. Accusée de ne plus respecter depuis plusieurs années l’accord conclu en 2015 sur ses capacités nucléaires, Téhéran disposerait désormais du matériel nécessaire à la construction d’une bombe, selon des conclusions de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

Le