Trump vetoed Israeli plan to kill Iran’s supreme leader
Credit :Yassine Mahjoub/SIPA

Conflit Israël-Iran : « Les militaires américains n’attendent plus que le feu vert de Trump pour intervenir en Iran »

Pour la cinquième nuit consécutive, Israël et l'Iran ont échangé des tirs de missiles. Mais tous les regards se tournent à présent vers les Etats-Unis. Alors que Donald Trump a quitté ce lundi précipitamment le G7, une participation américaine à l’offensive israélienne est-elle imminente ? Pour Public Sénat, l’historien et spécialiste de la politique américaine André Kaspi fait un point sur la situation.
Steve Jourdin

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Donald Trump a-t-il une stratégie claire dans le dossier iranien ?
On observe une forme d’incohérence dans la posture de Trump vis-à-vis de l’Iran. Ses déclarations sont parfois contradictoires : un jour conciliant, le lendemain menaçant. Il aurait lui-même demandé qu’on n’assassine pas le guide suprême Khamenei, estimant qu’il existe une marge de négociation avec les Iraniens.

Les militaires américains, de leur côté, ont déjà élaboré une tactique d’intervention dans la région. Ils n’attendent plus que le feu vert du président pour lancer une opération. Mais pour l’instant, nous sommes dans une période d’incertitude : il est difficile de savoir quelles décisions seront effectivement prises à Washington. Aujourd’hui, dans l’opinion publique américaine, l’Iran a très mauvaise presse. Le régime est entre les mains des ayatollahs qui sont très impopulaires. L’ayatollah Khomeyni figure fondatrice du régime avait une position très hostile vis-à-vis de l’Occident et des Etats-Unis. Pour de nombreux Américains, le régime iranien est vu comme oppressif, religieux, antidémocratique, tout ce qui va à l’encontre des valeurs américaines.

 

Intervention militaire ou pas, comment Trump envisage-t-il l’avenir du Moyen-Orient ?
Trump a deux obsessions. C’est d’abord un président qui n’aime pas la guerre. Il préfère les accords, les « deals ». Il espère parvenir à un accord global avec l’Iran sur l’ensemble des problématiques régionales. Ensuite, il y a la question du pétrole, cruciale à ses yeux. Une part importante du pétrole iranien transite par le détroit d’Ormuz. Si l’Iran décidait de le bloquer, cela provoquerait une crise d’ampleur mondiale, car une grande partie de l’approvisionnement énergétique de la Chine, de l’Europe, et d’autres puissances passe par cette voie. L’enjeu stratégique est donc majeur, et Trump en a bien conscience.

 

L’administration est-elle soudée derrière lui ?
Quand un président américain s’engage, toute son administration le suit officiellement. Il n’y a pas de divergence affichée entre Donald Trump et ses principaux collaborateurs, notamment JD Vance. Tous deux sont attentifs à l’opinion publique américaine, qui reste majoritairement opposée à une intervention militaire.

Lors de la campagne électorale, Trump avait promis qu’avec lui, il n’y aurait plus de guerre, contrairement à l’administration démocrate qu’il critique. Certes, l’opinion publique américaine est très favorable à Israël et très hostile à l’Iran. Mais elle ne veut plus revivre des épisodes comme l’Afghanistan ou l’Irak : c’est un passé que beaucoup veulent aujourd’hui oublier.

 

Benyamin Netanyahou manipule-t-il Donald Trump ?
Je ne crois pas que Trump soit manipulé par Netanyahou. En revanche, ce dernier pratique habilement la politique du fait accompli. Trump, jusqu’ici, a su garder une certaine distance. En avril dernier, lorsque Netanyahou est venu chercher son appui, Trump a préféré temporiser et parler d’un possible accord avec le régime iranien sur le nucléaire.

Il n’y a donc pas de soumission. Trump garde sa propre ligne, même si Netanyahou, de son côté, mène une politique très ferme vis-à-vis de l’Iran. Sur ce point, il existe d’ailleurs un large consensus au sein de la classe politique israélienne.

 

Ce lundi, Trump a quitté prématurément le sommet du G7. Il s’en est pris à Emmanuel Macron, lui reprochant d’avoir mal interprété les raisons de son départ. « Volontairement ou pas, Emmanuel ne comprend jamais rien », a-t-il déclaré. Assiste-t-on à une dégradation soudaine dans les relations entre les deux hommes ?
Donald Trump voit en Emmanuel Macron un « bon élève », quelqu’un qui pense pouvoir influencer sa pensée. Or, Trump supporte mal ce type d’attitude. Il perçoit Emmanuel Macron comme un allié « sympathique », mais il considère que la France est une puissance secondaire par rapport aux intérêts américains. Pour lui, Emmanuel Macron peut être utile, mais il ne constitue pas un interlocuteur déterminant dans les grands dossiers stratégiques.

 

Pourquoi Donald Trump déteste-t-il autant les G7 et les sommets internationaux ?
Parce qu’il y entend beaucoup de critiques à l’encontre des États-Unis. Or, Trump aime décider seul, défendre les intérêts américains avant tout, et il est convaincu que ses intérêts coïncident avec ceux du « monde libre ».
Il pense que les États-Unis se suffisent à eux-mêmes et n’ont pas besoin de se plier aux compromis et aux discussions de ces grands sommets multilatéraux. C’est une vision très unilatérale des relations internationales, centrée sur la puissance et la souveraineté américaines.

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