Ce jeudi matin, une frappe iranienne a touché un hôpital israélien, dans le sud du pays. Une preuve pour le spécialiste du Moyen-Orient Gilles Kepel, que « l’équilibre des forces n’est pas si clair que ça » entre les deux belligérants, affirme-t-il sur notre plateau. Alors que la supériorité militaire d’Israël était actée, en particulier sur le plan aérien, le stock de missiles iraniens semble plus important que prévu. Aujourd’hui, « Netanyahou a toujours la capacité de frapper très fort l’Iran, mais il n’a pas la capacité de protéger sa population », estime Gilles Kepel.
De l’autre côté, en Israël, « le dôme de fer est en train de se démunir considérablement », affirme le spécialiste. Et cette fragilité entraîne des pertes plus importantes que prévu. Un bâtiment d’habitations a notamment été touché à Ramat Gan, faisant 16 blessés. A ce jour, le bilan israélien se maintient à 24 morts civils.
Le régime des mollahs est « visiblement en très mauvais état », analyse Gilles Kepel
Si sur le plan militaire l’Iran s’avère plus robuste que prévu, sur le plan du renseignement, Israël a d’ores et déjà établi sa supériorité. « Il y a un niveau de pénétration du renseignement israélien au sommet du système iranien […], il sera très difficile pour le système de se maintenir ». En effet, plusieurs hauts gradés du régime des mollahs ont été éliminés au premier soir de l’offensive par l’armée israélienne, dont le chef d’état-major des forces armées, Mohammad Bagheri. Aujourd’hui, les autorités israéliennes viseraient directement l’ayatollah Khamenei.
Une cible peut-être partagée par les Etats-Unis : selon Donald Trump, les autorités américaines sauraient où se trouve le Guide suprême, mais ne compteraient pas l’éliminer « pour l’instant ». Une tension qui pose la question de sa relève. Un de ses fils, Mojtaba Khamenei serait en bonne posture, mais seulement si « son père a les capacités de l’introniser », affirme Gilles Kepel. De plus, le fils n’est pas « un religieux », affirme le spécialiste, ce qui transformerait « le régime théocratique en un régime monarchique », et bouleverserait également le système des mollahs.
Au G7, « on n’a pas vraiment entendu les Européens », estime Gilles Kepel
Une situation qui inquiète Emmanuel Macron, « tous ceux qui ont voulu par le passé changer des régimes par des frappes ou des opérations militaires ont commis des erreurs stratégiques », a-t-il déclaré. Mais pour Gilles Kepel, la voix européenne ne porte pas : au G7, « on n’a pas vraiment entendu les Européens », estime-t-il.
Pour le spécialiste, si les Européens ne peuvent plus « vraiment compter sur les Etats-Unis » pour renforcer la diplomatie et parvenir à un cessez-le-feu. Aujourd’hui, il leur appartient de « construire une défense européenne » indépendante.