Election 2024 Harris
FILE - Democratic presidential candidate former Vice President Joe Biden and his running mate Sen. Kamala Harris, D-Calif., pass each other as Harris moves to the podium to speak during a campaign event in Wilmington, Del., Aug. 12, 2020. She’s already broken barriers, and now Vice President Harris could soon become the first Black woman to head a major party's presidential ticket after President Joe Biden’s ended his reelection bid. The 59-year-old Harris was endorsed by Biden on Sunday, July 21, after he stepped aside amid widespread concerns about the viability of his candidacy. (AP Photo/Carolyn Kaster, File)/WX520/24187781843010/FILE PHOTO/2407212100

Désistement de Joe Biden : « C’est la meilleure décision pour son parti et pour son pays »

Coup de tonnerre dans la course à la Maison Blanche. Dimanche, Joe Biden, affaibli par une infection au covid, un débat raté et une campagne interne appelant à son désistement, annonce qu’il renonce à briguer un second mandat, adoubant sa vice-présidente Kamala Harris. Comment comprendre cette décision, à moins d’un mois de la convention démocrate, en charge d’investir le candidat du parti ? Quel effet cela peut avoir sur la campagne ? Interview avec Anne Deysine, Professeur des universités, auteure de "Les États-Unis et la démocratie" (L'Harmattan, 2020).
Mathilde Nutarelli

Temps de lecture :

5 min

Publié le

Mis à jour le

Joe Biden se désiste, pourquoi ? Est-ce en raison de son état de santé, de son âge, ou de la pression de ses alliés ?

Malgré son obstination, Joe Biden a finalement indiqué ce dimanche qu’il renonce à se présenter à l’élection présidentielle. Il est vrai que sa prestation calamiteuse au débat le 27 juin et la succession de passages à vide et de gaffes dont il a été l’auteur ont fait prendre conscience aux Démocrates qu’ils auraient dû réagir en 2022. Mais le président avait fait valoir ses bons résultats aux élections de mi-mandat et il a ensuite fait une bonne performance au discours sur l’état de l’union le 7 mars dernier. Seulement, depuis le 27 juin et de façon croissante, les élus et l’establishment démocrate ont fait pression pour qu’il renonce. L’une de ceux qui ont joué un rôle sans doute essentiel est l’ancienne speaker de la chambre Nancy Pelosi, qui a dû montrer à Joe Biden, chiffres à l’appui, qu’il allait entraîner la défaite des Démocrates à la chambre. Or, une majorité démocrate est essentielle pour un président démocrate, mais aussi en tant que contre-pouvoir, si Donald Trump est réélu.

Biden est aussi un démocrate avec un petit « d » et il a pris, comme il l’explique dans sa lettre, la décision parce que c’est la meilleure pour son parti et pour son pays.

Pourquoi Biden avait-il été le candidat démocrate, alors que son âge et son état de santé faisaient déjà débat ?

Le parti démocrate n’a pas su ou n’a pas voulu s’opposer à lui en 2022, de même qu’il a accepté la candidature forcée d’Hillary Clinton en 2016, avec les résultats que l’on connaît.

Ce genre de désistement est-il inédit dans l’histoire politique américaine ?

C’est la première fois qu’un désistement intervient si tard, dans la campagne. À deux occasions, deux présidents ont annoncé qu’ils ne se représenteraient pas, mais longtemps à l’avance. Il s’agit d’Harry S. Truman en 1952 et de Lyndon Johnson en 1968. Mais les conventions ont été le théâtre de divisions profondes et les Démocrates ont perdu l’élection présidentielle.

Ce désistement est-il une bonne nouvelle pour la campagne démocrate ?

Même si la situation est loin d’être idéale, le désistement est une bonne nouvelle, car Joe Biden n’avait aucune chance de gagner et il aurait entraîné la défaite des Démocrates à d’autres postes, ce qu’on appelle le « Down ballot ». Il a eu raison de désigner sa vice-présidente comme candidate, même si ce n’est pas le choix de tous et même si elle n’est pas une candidate idéale, et d’indiquer qu’il lui apporte son soutien, afin d’unifier le parti. Car il fallait unifier le parti. L’unité du parti était d’ailleurs le message martelé par la speaker Nancy Pelosi, lors d’une réunion en Caroline-du-Nord, le week-end dernier. Ce qu’il s’est passé depuis le désistement de Joe Biden, c’est-à-dire les multiples Etats qui ont indiqué que leurs délégués voteraient pour Kamala Harris, ou encore le soutien de plusieurs gouverneurs, qui auraient pu être des concurrents, témoigne que cet appel à l’unité a été entendu.

Quelle est la réaction des électeurs démocrates à cette nouvelle ? Et des donateurs ?

La plupart des électeurs démocrates sont soulagés, et les donateurs ont repris les versements qu’ils avaient interrompus en raison de l’obstination du président Biden.

Quel adversaire peut être le plus redoutable face à Donald Trump ?

Kamala Harris sera sans doute la candidate démocrate opposée à Donald Trump. Et alors que celui-ci nageait sur un petit nuage après le débat du 27 juin, la tentative d’assassinat et les deux décisions de justice allant dans son sens [le 1er juillet, la Cour suprême a considéré que Donald Trump jouissait d’une présomption d’immunité concernant les actes relevant de la fonction présidentielle, retardant son procès concernant l’assaut du Capitole de janvier 2020 ; le 15 juillet, une juge fédérale a annulé la procédure à l’encontre de Donald Trump pour rétention de documents classifiés, le procureur a fait appel, ndlr], il doit désormais changer de stratégie et réorienter sa campagne. Il est désormais opposé à une femme, or, il a des problèmes avec les femmes et celle-ci est une femme noire et puissante. Elle est plus jeune que lui de près de vingt ans, donc l’argument de l’âge se retourne contre lui. Et en plus, elle sait débattre et elle saura se défendre contre lui, contre ses attaques. Elle saura l’attaquer elle-même sur le droit de vote, et surtout l’élimination du droit à l’avortement, grâce aux 3 juges que Trump a nommés à la Cour suprême.

Partager cet article

Dans la même thématique

Désistement de Joe Biden : « C’est la meilleure décision pour son parti et pour son pays »
4min

International

Chercheurs américains en Europe : « Une vaste comédie », selon cette eurodéputée insoumise  

L’Union européenne débloque 500 millions d’euros pour attirer les chercheurs américains maltraités par Donald Trump. Mais cette enveloppe est-elle suffisante ? L’Union a-t-elle les moyens d’accueillir des chercheurs américains alors que sa propre recherche manque de financements ? On en débat cette semaine dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24, LCP et Public Sénat.

Le

Frappes israéliennes en Iran : un revers pour la diplomatie de Trump ?
7min

International

Frappes israéliennes en Iran : un revers pour la diplomatie de Trump ?

Les bombardements israéliens sur une série de sites iraniens durant la nuit écoulée viennent questionner l’état de la relation entre Washington et l’État hébreu, qui ont connu une série de hauts et de bas lors des derniers mois. Ce vendredi, Donald Trump a choisi de mettre la pression sur Téhéran.

Le

Pakistan Iran Mideast Wars
5min

International

Frappes israéliennes : « Israël veut replacer l’Iran comme l’ennemi principal de la région »

Cette nuit, Israël a frappé à de nombreuses reprises des sites nucléaires et des dirigeants de l'armée iranienne en justifiant une « menace nucléaire ». L’Iran a riposté avec une centaine de drones lancés vers le territoire israélien. Les attaques se sont poursuivies dans la journée. Pour Bernard Hourcade, directeur de recherche émérite au CNRS et spécialiste de l’Iran, la justification d’Israël n’est qu’une « façade » et vise à occulter la question palestinienne. Selon lui, cette série d'attaques va renforcer l’isolement d’Israël. Entretien.

Le

Iran nuclear water reactor of Arak
6min

International

Attaques d'Israël contre l'Iran : ce que l'on sait du programme nucléaire de Téhéran

Israël a invoqué la menace nucléaire pour justifier une série d’importants bombardements sur le sol iranien. Accusée de ne plus respecter depuis plusieurs années l’accord conclu en 2015 sur ses capacités nucléaires, Téhéran disposerait désormais du matériel nécessaire à la construction d’une bombe, selon des conclusions de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

Le

La sélection de la rédaction

Election 2024 Trump
8min

International

Tentative d’assassinat de Donald Trump : « Une part croissante d’Américains reconnaît la violence comme un mode d’action légitime »

La tentative d’assassinat de Donald Trump, la 16ème contre un président ou ancien président des Etats-Unis, pose la question de la place de la violence dans la vie politique américaine. Une violence qui fait l’objet d’une légitimation croissante dans un système politique et médiatique dont la polarisation s’est accrue depuis une dizaine d’années.

Le

Elon Musk – Cannes LIONS
8min

International

Soutien d’Elon Musk à Donald Trump : une « stratégie circonstancielle » et une « convergence d’idées »

Après la tentative d’assassinat qui a ciblé Donald Trump, candidat à la présidence des Etats-Unis, Elon Musk a affiché ouvertement son soutien au républicain. Un ralliement qui permet à l’homme d’affaires de s’assurer de la préservation de ses intérêts, notamment de son entreprise spatiale SpaceX. Mais également la traduction d’un rapprochement idéologique entre les deux hommes.

Le

Election 2024 RNC
8min

International

A Milwaukee, Trump laisse tomber les discours rassembleurs et retrouve ses tropes habituels

Dans la nuit de jeudi à vendredi, quelques jours après la tentative d’assassinat contre lui, Donald Trump a prononcé son discours d’acceptation d’investiture à la convention républicaine de Milwaukee. Un discours dans lequel il s’érige à la fois comme grand réconciliateur des Américains et tout en retombant dans ses antiennes anti-immigration et ses propos évangélisateurs. Quelle stratégie de campagne se dessine-t-elle, maintenant qu’il est officiellement investi par le parti Républicain, face à un Joe Biden affaibli, poussé vers la sortie par certains de ses troupes ? Interview avec le spécialiste de la politique et de la géographie électorale américaine, enseignant agrégé à l’Institut français de géopolitique, Maxime Chervaux.

Le