Départ des soldats français en Afrique : « Ce n’est pas du tout un recul de la France », assure Sébastien Lecornu

Départ des soldats français en Afrique : « Ce n’est pas du tout un recul de la France », assure Sébastien Lecornu

Auditionné par la commission de la Défense du Sénat sur la prochaine loi de programmation militaire, Sébastien Lecornu est revenu sur les annonces du chef de l’Etat sur la diminution des effectifs militaires français en Afrique. « C’est une opportunité historique pour l’armée française », a-t-il assuré.
Simon Barbarit

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C’est une revue de détails à laquelle s’est livré le ministre de la Défense devant les sénateurs. Invité par la commission de la Défense et des forces armées à s’exprimer sur la prochaine loi de programmation militaire (LPM) pour 2024 et 2030 et le conflit ukrainien, Sébastien Lecornu n’a pas échappé à une question sur le futur partenariat entre l’Afrique et la France détaillée par Emmanuel Macron lundi à l’Elysée.

« Tout ça suscite beaucoup de questions »

« Je voudrais que vous nous disiez un mot de ce qui s’est passé hier soir […] Dès aujourd’hui tout ça suscite beaucoup de questions […] et de doutes », a fait valoir Christian Cambon, le président LR de la commission.

A la veille d’une tournée dans quatre pays d’Afrique centrale (Gabon, Angola, Congo et République démocratique du Congo) et quelques mois après l’annonce de la fin de l’opération antiterroriste Barkhane au Sahel, le président de la République a annoncé une « diminution visible » des effectifs militaires français en Afrique et un « nouveau modèle de partenariat » impliquant une « montée en puissance » des Africains.

« Ces bases ne seront pas fermées, mais elles seront transformées, elles deviendront pour les unes des académies, pour les autres des bases mais partenariales », a-t-il détaillé indiquant que ces bases étaient un « prétexte pour beaucoup d’opposants de la France et parfois un prétexte pour ne pas régler les problèmes politiques ».

Sébastien Lecornu a eu la charge d’expliciter la parole du chef de l’Etat. Les bases évoquées par Emmanuel Macron sont celles mises en place par des accords de défense entre deux Etats souverains. « La réflexion que le président de la République m’a demandé de conduire concerne spécifiquement le Tchad, la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Gabon […] Djibouti ne fait pas partie du cercle de réflexion ». Le ministre a assuré qu’aucune base ne seraient fermée mais toutes seront destinées à former plus de militaires des pays concernés.

« C’est une opportunité historique pour l’armée française »

« On est en train de faire du sur-mesure qui pourrait se traduire par une diminution du nombre de soldats français […] C’est une opportunité historique pour l’armée française qui accompagne des armées qui ont décidé de lutter contre le terrorisme. Ce n’est pas du tout un recul de la France dans ces pays, c’est une manière d’être présent différemment ».

Sébastien Lecornu a également rappelé qu’il s’agissait d’Etats souverains « et notre présence correspond à ce qu’ils veulent ». « Certains temps sont terminés […] Même si ce sont des pouvoirs issus de coups d’Etat et qui sont des juntes, on ne peut pas fouler aux pieds la souveraineté de ces Etats.

Le sénateur socialiste, Jean-Marc Todeschini s’est inquiété du devenir de la base militaire Française du Tchad, pays concerné par la menace terroriste. « Vous avez raison d’en parler mais je n’ai pas encore entamé les discussions », lui a répondu le ministre.

Rachid Temal (PS) a quant à lui indiqué que son groupe demanderait un débat dans l’hémicycle sur « la question de la France en Afrique ». « Il y a une vision gaullienne des domaines réservés mais ça n’empêche pas une vision moderniste », a-t-il fait valoir regrettant « un manque d’intégration du Parlement » sur cette question mais aussi sur la stratégie française en Indo-pacifique et sur la loi de programmation militaire.

A ce sujet, Sébastien Lecornu est revenu sur les 413 milliards d’autorisations budgétaires de la LPM, auxquels il faut ajouter les 13 milliards de reports de charges, de ressources propres et des économies sur certains programmes. L’examen du texte est prévu au mois de mai à l’Assemblée nationale et au mois de juin au Sénat.

La dissuasion militaire « ne mange pas l’essentiel des augmentations »

Une dizaine de « thèmes » sont concernés, tels que la dissuasion nucléaire, le renseignement, le cyber, l’innovation, le spatial, les fonds marins, forces spéciales… (lire notre article).

Christian Cambon s’était inquiété le 20 janvier dernier, lors des vœux aux armées du chef de l’Etat que la dissuasion nucléaire « emporte une partie des crédits ».

« Evidement c’est un effort important mais ça ne mange pas l’essentiel des augmentations de cette loi de programmation militaire », a voulu rassurer le ministre de la Défense sans donner de chiffres.

Le sénateur LR, Cédric Perrin a souligné que l’impact de l’inflation serait de 30 milliards d’euros sur les 413 prévus. Un chiffre que n’a pas contesté Sébastien Lecornu. Il indique toutefois que l’inflation avait été estimée en fonction « des critères les plus dégradés ».

Enfin, Christian Cambon a affirmé que la guerre en Ukraine « ne devait pas être l’unique boussole » de la prochaine loi de programmation militaire « mais elle pose un certain nombre de questions quant à notre capacité à affronter un conflit de haute intensité ».

Sébastien Lecornu a indiqué que le texte avait été construit à partir d’un retour d’expérience, « l’Ukraine mais pas que, l’Afrique et la lutte contre le terrorisme mais pas que. Nous voulons regarder en face, les forces et les fragilités de notre modèle d’armées et surtout regarder les menaces telles qu’elles pèsent réellement sur la Nation française aujourd’hui et pour demain ».

 

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