« Je pourrais me tenir au milieu de la Cinquième Avenue et tirer sur quelqu’un, sans pour autant perdre un seul électeur », s’était-il exclamé lors d’un meeting dans l’Iowa en 2016, avant sa première élection. Alors que Donald Trump s’apprête à faire son retour à la Maison Blanche, sa célèbre formule n’a jamais été aussi vraie.
Ce 6 novembre, en remportant l’élection dans l’État du Wisconsin, le candidat républicain devient officiellement le 47ème président des États-Unis. Les sondages prédisaient un scrutin historiquement serré, mais le milliardaire se paye même le luxe de remporter le suffrage populaire avec plus de 71 000 000 voix contre 66 000 000 pour Kamala Harris, selon le dernier décompte de l’agence de presse américaine AP.
Ressuscité après l’assaut du Capitole
La chute de Donald Trump avait pourtant été plusieurs fois annoncée, après sa défaite contre Joe Biden il y a quatre ans. Le 6 janvier 2021, exaltés par le discours du président sortant qui fustigeait une élection « volée par les démocrates radicaux de gauche » et les « médias corrompus », des centaines de manifestants se dirigeaient vers le Capitole. Un assaut meurtrier qui a traumatisé la démocratie américaine et tourné la page d’un premier mandat dans le chaos le plus total.
Lâché par ses principaux conseillers et proches collaborateurs, Donald Trump se retire alors dans sa résidence de Mar-a-Lago en Floride. Accusé d’avoir incité à l’insurrection, il devient le premier président américain à faire face à deux procédures de destitution dans un même mandat, un premier impeachment ayant déjà été engagé à son encontre en 2019. Cette fois, la mesure engagée par les sénateurs américains est purement symbolique, puisque Donald Trump a déjà quitté la Maison Blanche. Mais c’est un symbole fort : 57 sénateurs se sont prononcés en faveur de sa culpabilité, contre 43 pour son acquittement. Un score loin des 67 voix nécessaires pour engager une destitution, toutefois, jamais autant de parlementaires ne s’étaient exprimés en faveur d’un impeachment.
Meeting après meeting, Donald Trump a pourtant réussi à renverser la vapeur. Mi-juillet, lors de la convention des Républicains à Milwaukee, il est officiellement intronisé candidat du parti sans aucun suspense. À mesure que la cote de popularité de Joe Biden s’effondre, les Américains voient d’un nouvel œil le bilan de Donald Trump, notamment son volet économique qui semble l’avoir porté en 2024 face à Kamala Harris.
À coups de phrases chocs et de formules violentes, adressées à ses opposants politiques comme aux immigrés particulièrement attaqués pendant cette campagne, le milliardaire a petit à petit effacé les polémiques de son premier mandat. Réécrivant une nouvelle fois l’histoire en usant de fausses informations, Donald Trump présente les émeutiers du 6 janvier comme des « otages » et promet de les gracier une fois réélu. Un discours qui semble payer : selon un sondage réalisé en janvier 2024 par le Washington Post et l’Université du Maryland, 39 % des Américains estiment désormais que l’assaut du Capitole est en réalité un complot ourdi par le FBI.
Des procès transformés en outils de communication
Sa troisième campagne est aussi marquée par les affaires judiciaires. Plusieurs juridictions l’accusent d’avoir tenté de renverser les résultats de l’élection présidentielle de 2020, ou encore d’avoir quitté la Maison Blanche en emportant avec lui près de 200 documents classifiés. Des procès pour le moment reportés, les avocats de Donald Trump ayant réussi à faire accepter par la Cour suprême l’argument de l’immunité présidentielle, pour repousser les audiences à après l’élection.
La campagne du républicain est tout de même émaillée par une condamnation. Le 30 mai 2024, devant la cour criminelle de Manhattan à New York, Donald Trump a été déclaré coupable des 34 délits qui lui étaient reprochés. Le milliardaire est accusé d’avoir falsifié plusieurs documents comptables de campagne pour masquer un paiement de 130 000 dollars à l’actrice X Stormy Daniels, réalisé juste avant l’élection de 2016, afin qu’elle taise une relation sexuelle qu’elle dit avoir eue avec lui plusieurs années auparavant. L’annonce de la peine à laquelle sera condamné Donald Trump est attendue pour le 26 novembre, il risque jusqu’à quatre ans de prison ferme.
Loin de mettre un coup d’arrêt à sa campagne, cette condamnation a même dopé la popularité du républicain auprès de ses électeurs. Juste après le verdict du jury new-yorkais, en à peine 24 heures, Donald Trump a reçu 52,8 millions de dollars de dons, explosant son record de levée de fonds en une journée selon son équipe de campagne. Symbole du détournement de ses déboires judiciaires en outil de communication : le « mug shot » du candidat républicain, photo d’identité judiciaire utilisée pour son procès en Géorgie, s’affiche sur des produits dérivés qui se vendent comme des petits pains.
La tentative d’assassinat du candidat, le 13 juillet lors d’un meeting en Pennsylvanie, est venue couronner le tout, en offrant l’image la plus marquante cette campagne électorale. Le visage ensanglanté, le poing levé émergeant au-dessus des agents des services secrets qui l’évacuaient, Donald Trump avait lancé un « Fight ! Fight ! Fight ! » à la foule. À l’image de ce 13 juillet, le nouveau président des États-Unis apparaît aujourd’hui plus que jamais comme insubmersible.