Dans la soirée du jeudi 2 novembre, une semaine après le début de son opération terrestre dans l’enclave palestinienne, l’armée israélienne a annoncé avoir « achevé l’encerclement de la ville de Gaza ». Pour le général Vincent Desportes, invité de la matinale de Public Sénat vendredi 3 novembre, cette étape marque un tournant dans le conflit. « On va passer à une phase plus dure. Plus Tsahal va avancer, plus les combats seront durs et les pertes nombreuses des deux côtés », analyse le professeur de stratégie.
La perspective d’une « guerre des tunnels », des combats dans le réseau souterrain de plusieurs centaines de kilomètres creusé par le Hamas, se rapproche. Pour Vincent Desportes, elle est inévitable en raison des otages que le groupe terroriste détient et cache vraisemblablement dans ces tunnels : « Tsahal est dans un piège, qui va devenir un bourbier sanglant ». Les combats qui se profilent s’annoncent donc meurtriers pour l’armée israélienne, sur un terrain qui avantage le Hamas. « Il y a un pouvoir égalisateur des tunnels, on se retrouve dans un combat d’homme à homme, un combat au poignard et au révolver », estime le général.
La guerre Israël-Hamas « pourrait devenir illégitime »
Mardi 31 octobre, l’armée israélienne a confirmé avoir bombardé le plus grand camp de réfugiés de la bande de Gaza, le camp de Jabaliya, pour « éliminer » un dirigeant du Hamas. Une annonce qui a suscité l’indignation du Haut-commissariat aux droits de l’homme de l’ONU, qui a indiqué dans un tweet sa crainte « qu’il s’agisse d’attaques disproportionnées qui pourraient être des crimes de guerre ».
Alors que le nombre de victimes civiles des ripostes de Tsahal à Gaza ne cesse de croître, le général Vincent Desportes considère ce nouveau bombardement comme une grave erreur stratégique de l’État hébreu : « C’est du pain béni pour le Hamas, puisque c’est un élément qui peut encore plus retourner l’opinion publique contre Israël ». Un retournement de l’opinion qui fait courir un risque à Israël. « Cette guerre, légitime dans ses motivations, pourrait devenir illégitime par la façon dont elle est réalisée », analyse Vincent Desportes.
« La guerre est un moyen pour une fin qui doit toujours être politique »
Pour le professeur de stratégie, dans sa guerre contre le Hamas, Tsahal vise un objectif qui n’assure pas une résolution prochaine du conflit : « Cette guerre semble être conduite par un souci de vengeance, et on le comprend bien, mais surtout pour elle-même. Cette guerre veut détruire, or une stratégie ne fonctionne que si elle cherche à construire quelque chose. »
Ainsi, le général l’affirme, « la solution n’est jamais militaire. La guerre est un moyen pour une fin qui doit toujours être politique. Il n’y aura pas de paix au Moyen-Orient tant qu’il n’y aura pas une perspective de paix et de liberté pour les Palestiniens ». La deuxième visite d’Anthony Blinken en Israël, arrivé ce 3 novembre à Tel-Aviv, fait un pas dans cette direction. Le secrétaire d’État américain doit s’entretenir dans la matinée avec le Premier ministre Benjamin Netanyahou, avec un objectif clair : faire pression sur l’Etat hébreu pour s’assurer de la protection des civils palestiniens à Gaza et en Cisjordanie.