Glyphosate : pourquoi l’Union européenne en reprend pour 10 ans 

La Commission européenne va prolonger l’autorisation du glyphosate jusqu’en 2033, faute d’une majorité qualifiée d’Etats-membres pour se prononcer pour ou contre son interdiction. Une décision dénoncée par les écologistes et qui s’ajoute à un rejet par le Parlement européen de la trajectoire de réduction des pesticides de 50% d’ici à 2030.
Alexandre Poussart

Temps de lecture :

3 min

Publié le

Mis à jour le

L’agroécologie n’a pas le vent en poupe en ce moment au sein des instances européennes. Mi-novembre, la Commission européenne a décidé de prolonger jusqu’en 2033 l’autorisation du glyphosate, pesticide classé « cancérogène probable » par l’Organisation mondiale de la santé. Cette décision se base sur une étude de l’Agence de sécurité alimentaire européenne qui estime ne pas avoir identifié dans l’utilisation de cette molécule un « domaine de préoccupation critique » chez les humains, les animaux et l’environnement.

Une prolongation dénoncée par les écologistes. « Je pense que l’opinion publique est très déçue par ce qui a été décidé. Des écosystèmes entiers sont menacés par ces pesticides et notamment par le glyphosate », rappelle Nicolae Stefanuta, eurodéputé roumain, membre du groupe Les Verts, interrogé dans l’émission Ici l’Europe, sur France 24 et Public Sénat. « Evidemment qu’il faut réduire les intrants mais il faut avoir une vision qui tient compte de notre sécurité alimentaire », lui a répondu Anne Sander, eurodéputée française, membre du groupe PPE (Parti populaire européen), à la droite de l’hémicycle, favorable à la prolongation du glyphosate. « Cela aurait été irresponsable d’interdire totalement le glyphosate. Il faut l’interdire dans les parcs publics, chez les particuliers mais pas dans le monde agricole car les mauvaises herbes peuvent tuer nos cultures. »

La France s’est abstenue lors du vote

Cette prolongation a été décidée par la Commission européenne, en l’absence d’une majorité qualifiée d’Etats-membres (65 %) pour ou contre la prolongation de l’autorisation de cette molécule. 7 pays se sont abstenus dont la France. « Cela correspond bien au en même temps d’Emmanuel Macron sur le glyphosate », critique Anne Sander. « En 2017, il promettait de l’interdire en 3 ans, avant d’y renoncer, et maintenant de ne pas prendre position. » 17 Etats-membres ont voté pour la prolongation du glyphosate et notamment des pays d’Europe de l’Est. Nicolae Stefanuta n’est pas surpris. « Le gouvernement de mon pays, la Roumanie, milite pour l’autorisation des néonicotinoïdes, tueurs d’abeilles. Dans nos supermarchés, les produits biologiques ont du mal à se faire une place dans les rayons à côté des produits de l’agriculture intensive, alors qu’ils pourraient être compétitifs niveau prix. »

Le Parlement européen rejette la trajectoire de réduction des pesticides

Autre défaite pour les écologistes européens, le rejet par le Parlement européen d’un texte phare du Pacte Vert européen, défendu par la Commission européenne, qui prévoyait de réduire l’usage des pesticides de 50 % d’ici à 2030. Les élus du PPE, des groupes d’extrême droite mais aussi certains socialistes et libéraux se sont opposés à ce texte. « Le projet a été vidé de sa substance » explique Nicolae Stefanuta, qui y voit aussi un contexte électoral. « D’ici aux élections européennes de juin prochain, la droite européenne, alliée à l’extrême droite, va tout faire pour rejeter toute législation environnementale. »

Pour aller plus loin

Dans la même thématique

Glyphosate : pourquoi l’Union européenne en reprend pour 10 ans 
4min

International

Narcotrafic : « il faut une véritable police européenne » plaide cet eurodéputé allemand 

Alors que les crimes liés au trafic de drogue se multiplient en Europe, les pays européens ne sont pas à l’unisson dans la stratégie pour lutter contre ce fléau, même s’il existe une coopération européenne en la matière de lutte contre le trafic, les politiques de poursuite des consommateurs varient d’un état à l’autre. On en débat cette semaine dans Ici l’Europe, émission diffusée sur France 24, LCP et Public Sénat.

Le

Glyphosate : pourquoi l’Union européenne en reprend pour 10 ans 
6min

International

Immigration : le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau « favorable à la dénonciation de l’accord franco-algérien de 1968 »

Auditionné par le Sénat ce mercredi 27 novembre, le locataire de la place Beauvau a tiré à boulets rouges sur cet accord bilatéral et le statut particulier qu’il accorde aux ressortissants algériens qui arrivent en France. Favorable à son abrogation au vu de la dégradation des relations franco-algériennes, Bruno Retailleau précise toutefois que cette position n’engage pas le gouvernement.

Le

Glyphosate : pourquoi l’Union européenne en reprend pour 10 ans 
6min

International

Accord UE - Mercosur : le Sénat rejette largement le traité de libre échange

Sans surprise, après l’Assemblée nationale, c’est le Sénat qui s’oppose largement au projet d’accord UE – Mercosur tel qu’envisagé aujourd’hui par la Commission européenne. Un rejet qui intervient dans le cadre d’un vote consultatif, demandé par le gouvernement pour appuyer son opposition à l’accord commercial.

Le