L’Union européenne est en possession de 210 milliards d’euros appartenant à l’État russe. De quoi parle-t-on ?
Le débat actuel porte sur la confiscation des avoirs russes bloqués dans les banques de l’Union européenne. Ces avoirs comprennent des sommes d’argent issues de dépôts financiers, des revenus immobiliers, des transactions commerciales liées aux produits russes, ainsi que des flux financiers présents dans l’UE. En plus de ces fonds, certains biens immobiliers appartenant à des oligarques russes ou à des proches de Vladimir Poutine sont également concernés. Ces derniers possèdent des comptes bancaires et des propriétés en Europe, qui ont fait l’objet de mesures de gel.
La question de l’utilisation ou non de ces avoirs n’est pas nouvelle. Pourquoi revient-elle avec autant de force aujourd’hui dans le débat ?
Ce sujet a été remis en avant lors du sommet qui s’est tenu ce week-end à Londres, où le Premier ministre britannique, Keir Starmer, a insisté sur la nécessité de poursuivre l’aide à l’Ukraine. Toutefois, aucune décision concrète n’a été prise, en raison des réticences soulevées par des obstacles juridiques liés à la mobilisation de ces avoirs. Les États-Unis ayant annoncé la suspension de leur aide à l’Ukraine, cela accentue la nécessité de trouver de nouvelles sources de financement pour soutenir les enseignants, les militaires et les infrastructures du pays. L’argent est le nerf de la guerre et les avoirs russes permettraient de soulager l’Ukraine.
Peut-on légalement se servir de ces avoirs russes gelés ?
Dans un État de droit, toute saisie d’avoirs doit reposer sur une base légale solide. Les détenteurs de ces fonds peuvent engager des recours en justice pour contester leur confiscation, en prouvant qu’ils ne sont ni oligarques ni proches du pouvoir russe. L’État français, par exemple, ne peut pas vendre arbitrairement des biens appartenant à des oligarques sur la Côte d’Azur.
De plus, bien qu’il soit théoriquement possible d’adopter des lois permettant la confiscation, ces mesures restent rares et sont de toute façon soumises à des voies de recours juridiques. Il est donc erroné de penser que ces avoirs peuvent être mobilisés rapidement et sans contestation.
Le problème est-il vraiment uniquement juridique ? On a l’impression qu’il y a aussi des blocages politiques à l’intérieur de l’Europe sur cette question…
Les deux aspects sont liés. Les arguments juridiques masquent effectivement parfois des divergences d’ordre politique. La décision d’utiliser ces avoirs nécessiterait un consensus au sein du Conseil européen. Or, des personnalités comme Viktor Orbán s’y opposerait à coup sûr. Toute décision sur la confiscation des avoirs russes devra obtenir l’unanimité des États membres, ce qui complique considérablement le processus.
La Commission européenne a dévoilé ce mardi un plan destiné à mobiliser près de 800 milliards d’euros pour la défense. Quelles sont les prochaines étapes ?
Ce plan massif de 800 milliards d’euros proposé par Ursula von der Leyen, bien que crucial, suscite de nombreuses interrogations. La Commission européenne n’ayant pas de compétences directes en matière militaire, plusieurs options sont envisagées : s’agit-il d’un prêt ? De la mobilisation de fonds privés ? Pour l’instant, les modalités restent encore très floues.
Un précédent existe : lors de la pandémie de Covid-19, un traité ad hoc avait été adopté pour permettre un emprunt commun, bien que la santé ne relève pas des compétences initiales de l’UE. Si la Commission propose une approche similaire, un tel traité pourrait être mis en place. Ce genre de montage permettrait de contourner l’opposition de la Hongrie de Viktor Orban.