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Guerre en Ukraine : quels sont les enjeux du sommet de l’OTAN à Vilnius ? 

Les Etats membres de l’OTAN se réunissent à Vilnius les 11 et 12 juillet. Parmi les sujets chauds, l’adhésion de l’Ukraine à l’alliance militaire. Si le principe est acquis, les modalités et le calendrier sont loin d’être définis et devraient être au cœur des discussions. Entretien avec Bruno Tertrais, directeur adjoint de la Fondation pour la recherche stratégique.
Henri Clavier

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Le sommet de Vilnius peut-il déboucher sur une promesse d’adhésion à l’OTAN pour l’Ukraine ?

La promesse d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN a été faite en 2008. Donc la question est plutôt de savoir quand l’Ukraine pourrait rejoindre l’OTAN et surtout quels sont les gages donnés en attendant. Les discussions ne portent pas sur une promesse d’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN à une date précise avec un calendrier clair. A Vilnius, les négociations entre Etats membres vont porter sur les garanties de sécurité que l’on accorde à l’Ukraine.

Donc le principe de l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN ne pose pas de difficultés ? Quand bien même la guerre n’est pas terminée ?

Aucun État ne soutient une adhésion immédiate et sans condition de l’Ukraine. Cela poserait un problème majeur, les autres États s’engagent à protéger l’intégrité du territoire des membres. Il faudrait être prêt à l’affrontement avec la Russie ce qui n’est pas envisageable. Mais, sur le principe de l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN il n’y a, pour l’instant, aucune résistance. Par ailleurs, l’Ukraine devrait pouvoir bénéficier de la procédure accélérée comme pour la Finlande et la Suède. Il faudra quand même que chaque Parlement de chaque Etat ratifie l’adhésion.

Quelles sont les divergences de positions entre les Etats ?

Parmi les membres les plus influents, les Etats-Unis et l’Allemagne sont réticents à s’engager de manière claire. Ils préfèrent donner des garanties de soutien, notamment sur la livraison d’armes. Les livraisons d’armes et de munitions ne sont d’ailleurs pas le fait de l’OTAN mais des membres individuellement. Si les Etats-Unis et l’Allemagne hésitent à formuler une promesse ferme d’adhésion c’est par crainte que la Russie conserve des envies de vengeance contre l’Ukraine dans l’hypothèse où la Russie est vaincue ou se retire. L’OTAN poursuit un objectif de dissuasion donc personne n’a intérêt à l’affrontement avec la Russie.

Pourtant il y a peu de chances que le rapprochement entre l’Ukraine et l’OTAN soit de nature à apaiser les relations avec la Russie…

Non, évidemment. La Russie a toujours considéré que l’Ukraine devait aller vers l’est et n’a jamais accepté le rapprochement de l’Ukraine avec l’ouest, qu’il s’agisse de l’OTAN ou de l’Union européenne. Mais, paradoxalement, la Russie est responsable de ce rapprochement accéléré entre l’Ukraine et l’OTAN.

Quelle est la position française sur l’adhésion et la promesse d’adhésion ?

La France est plus allante sur le sujet que les Etats-Unis ou l’Allemagne. La France a compris le caractère européen de l’Ukraine et les sacrifices consentis par le peuple ukrainien. Pour cela, la France considère l’Ukraine comme un candidat évident.

La position française a évolué depuis 2008 ?

En 2008, la France et l’Allemagne avaient refusé un plan d’action pour l’adhésion en faveur de l’Ukraine et de la Géorgie. L’OTAN se pense comme une organisation ouverte et le plan d’action pour l’adhésion prévu par l’article 10 permet d’associer les Etats candidats. Ce rapprochement ouvre généralement la voie à une adhésion à moyenne échéance.

Une promesse d’adhésion pourrait-elle accélérer le processus d’adhésion à l’Union européenne ?

Ce sont deux organisations et deux processus totalement différents. L’adhésion à l’Union européenne est plus exigeante, notamment sur le plan juridique et demande donc plus de temps. Néanmoins, la plupart des membres de l’Union européenne souhaitent que l’Ukraine adhère.

Quels sont les autres points majeurs de ce sommet ? Doit-on s’attendre à des évolutions doctrinales ?

La réflexion doctrinale a déjà eu lieu, la question porte sur la mise en œuvre de la doctrine. Aujourd’hui, les discussions vont porter sur les nouveaux plans de défense qui sont en cours d’élaboration mais ne sont pas encore actés. L’objectif est de proposer des plans musclés et réalistes avec une attention particulière pour le nord-est de l’Europe. La localisation du sommet à Vilnius n’est d’ailleurs pas neutre. Vilnius n’est qu’à quelques kilomètres de la Biélorussie et elle est aussi proche de l’enclave de Kaliningrad, territoire russe.

 

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