« Il était temps ! », s’exclame le général Christophe Gomart, député européen LR, et membre de la Commission de la sécurité et de la défense. « Le réveil est un peu tardif, mais bénéfique, en trois ans et demi de guerre, nous n’avons rien prévu pour nous protéger contre les drones, or la guerre entre la Russie et l’Ukraine est justement une guerre de drones. » Sa réaction intervient quelques heures après l’annonce d’une réunion en urgence de plusieurs pays européens, pour plancher sur un mur anti-drones.
Il faut dire que le vieux continent est sous pression. Le 9 septembre dernier, une vingtaine de drones russes ont fait incursion dans le ciel polonais, seuls trois ont pu être abattus. Le lendemain, un autre a été pris en chasse dans le ciel roumain. C’est maintenant le Danemark qui est pris pour cible. Au moins deux de ses aéroports ont été survolés par des drones non identifiés.
Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission, avait évoqué ce mur le 10 septembre, lors de son traditionnel discours sur l’Etat de l’Union, il devient désormais plus concret.
Un mur doté de technologies de détection et d’interception
Ce sont les pays Baltes, en première ligne face à la menace russe, qui demandent la mise en place de ce mur. Ils font donc très logiquement partie des discussions tout comme la Finlande, la Pologne, le Danemark, et l’Ukraine, invitée à partager son savoir-faire.
Car depuis le début de l’invasion massive de la Russie, le pays a appris à détecter les survols de drones grâce à des capteurs acoustiques et à les abattre à moindre coût. « On va chercher ce savoir-faire ukrainien pour pouvoir le déployer le long de la frontière Est de l’Europe », explique le général Gomart. Ce qui devrait prendre au minimum un an, d’après le commissaire européen à la Défense et à l’Espace. « Compte tenu du kilométrage, je pense qu’il faudra se concentrer sur la protection des grandes villes plus que des frontières. Et puis il y a un autre problème qui se pose. Nos pays ne sont pas en guerre, abattre un drone au-dessus d’une ville, c’est prendre le risque de tuer ou de blesser des civils quand les débris retombent au sol, » souligne le général. Le sujet devra forcément être évoqué lors de la réunion.
Il faut aussi réfléchir aux coûts. Car pour l’instant, l’Otan et les pays européens font preuve de lacunes sur ce sujet. « Il y a une disproportion. On poursuit des drones qui coûtent quelques milliers d’euros, avec des avions de chasse et des missiles extrêmement coûteux, il y a un travail à faire de ce côté-là », précise le général Gomart.
Le réveil européen
Quoi qu’il en soit, beaucoup soulignent le réveil européen en matière de défense face à la menace russe, même s’il semble un peu tardif. Ce mur anti-drones, serait un projet européen réalisé en dehors de l’OTAN.
« L’Europe envisage enfin le fait que les Etats-Unis puissent se désengager de l’OTAN. Elle se prend en main et va construire ce mur, en Europe, avec des composants, du matériel et de l’argent européen. C’est une très bonne chose. Car si vous achetez du matériel américain, vous vous soumettez à la réglementation ITAR dont les procédures sont complexes et intrusives, c’est même devenu un outil d’influence pour Washington. En produisant européen on se défait de cette dépendance, » précise Christophe Gomart.
Les discussions ont commencé, ce sujet, sera aussi forcément au menu d’un sommet informel des dirigeants européen, mercredi prochain. Hasard de l’histoire, il se déroulera justement au Danemark, pays pris pour cible par des drones non identifiés.