Paris: Emmanuel Macron Receives Nigerian President Bola Tinubu

« L’accélération de son programme nucléaire nous amène tout près du point de rupture » : l’Iran, « principal défi sécuritaire » pour la France au Moyen-Orient, selon Emmanuel Macron

Iran, Israël, bande de Gaza, Liban, Syrie… Emmanuel Macron a détaillé ce lundi devant les ambassadeurs les positions françaises sur les grands enjeux internationaux en cours au Proche et au Moyen-Orient. Le président de la République a notamment pointé du doigt le rôle de Téhéran dans les différentes crises en cours dans la région. « L’Iran est aujourd’hui un risque si nous le laissons hors du cadre », estime-t-il.
Théodore Azouze

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L’Iran comme principal enjeu au Proche et Moyen-Orient. Le président de la République accueillait ce lundi des dizaines de diplomates à l’Élysée pour la tenue de la traditionnelle Conférence annuelle des ambassadeurs. L’événement, qui se tient habituellement à la fin du mois d’août, avait été annulé en 2024 en raison des Jeux olympiques et paralympiques disputés l’été dernier. Finalement organisée en cette période de vœux, la rencontre a été l’occasion pour Emmanuel Macron de revenir sur les grandes crises internationales qui ont fait l’actualité ces derniers mois. Avec, en premier lieu, la situation fragmentée au Proche et au Moyen-Orient.

L’Iran, « un risque si nous le laissons hors du cadre »

Conflit israélo-palestinien, instabilité au Liban, incertitude politique en Syrie : ces trois crises importantes – qui ont fait l’actualité tout au long de l’année – ont pour point commun l’influence de Téhéran. L’Iran constitue ainsi « le principal défi stratégique et sécuritaire pour la France, les Européens, toute la région et bien au-delà », assure Emmanuel Macron. Principale inquiétude : le développement du programme nucléaire entrepris par la République islamique. « L’accélération de son programme nucléaire nous amène tout près du point de rupture », a estimé le président de la République. 

Alors que les États-Unis sont sortis de l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien (JCPoA) lors du premier passage de Donald Trump à la Maison-Blanche, Emmanuel Macron tend aujourd’hui la main à « la nouvelle administration américaine » pour mettre en place un « accord plus large ». « L’Iran est aujourd’hui un risque si nous le laissons hors du cadre », développe le chef de l’État. 

D’autres choix géopolitiques de l’Iran ont aussi été mis en avant par Emmanuel Macron comme des risques à contenir pour l’Union européenne. « Son programme balistique menace le sol européen et nos intérêts. L’Iran est d’ores et déjà impliqué dans la guerre de la Russie contre l’Ukraine par un soutien militaire affirmé et totalement identifié. Son soutien aux groupes dangereux sur tous les terrains de confrontation au Moyen-Orient et ses tentatives de déploiement en Afrique amplifient encore ce danger, à travers ce qu’on appelle ses proxys. Et sa pratique du terrorisme revendiqué se poursuit. »

La solution à deux États encore évoquée

D’autres problématiques régionales ont également été abordées par le chef de l’État. « Les guerres du Proche-Orient ne sont pas des conflits lointains », a-t-il d’abord avancé. Le conflit entre Israël et le Hamas, en cours après les attaques terroristes du 7 octobre 2023 sur le sol hébreu, continue de faire rage dans la bande de Gaza. Emmanuel Macron, qui a appelé à plusieurs reprises à la fin des combats dans l’enclave palestinienne, a de nouveau réclamé « une paix solide, durable et sûre pour toute la région ». Une situation possible selon lui uniquement à condition de mettre un terme au conflit meurtrier à Gaza.

La position de Paris sur la crise dans cette zone du monde n’a pas beaucoup évolué ces derniers mois. Emmanuel Macron a ainsi dans un premier temps réexprimé sa « solidarité (…) complète » vis-à-vis de l’État hébreu après les attaques du 7 octobre 2023 et demandé la libération des otages toujours retenus par le mouvement islamiste à Gaza. Deux Français, Ofer Kalderon et Ohad Yahalomi, y sont toujours emprisonnés. 

Mais, dans le même temps, le président français a aussi fustigé la suite de l’intervention de Tsahal dans la bande de Gaza. « Il n’y a aucune justification militaire à la poursuite des opérations israéliennes, aux entraves délibérément mises à l’aide humanitaire et à l’état de faim et de dénuement extrêmes auxquels la population civile est réduite », a-t-il déploré. « Il faut sans plus attendre qu’Israël mette fin à la guerre, admette qu’il a des partenaires pour la paix et s’engage à un règlement juste et durable de la question palestinienne. »

Comment, à long terme, parvenir à cet objectif ? Emmanuel Macron a une nouvelle fois prôné la « possibilité » d’une solution « à deux États vivant en paix et en sécurité ». Une hypothèse souvent évoquée au début de la guerre, y compris par les États-Unis et son secrétaire d’État Antony Blinken, mais toujours rejetée en bloc par le gouvernement israélien. L’été dernier, les députés du pays avaient aussi largement rejeté le concept lors d’un vote sur la question au Parlement. L’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche le 20 janvier prochain pourrait aussi achever d’enterrer le projet. « Il faudra être ferme sur les principes, créatif sur les modalités et déterminé à construire un nouveau cadre de sécurité et coopération au Moyen-Orient », avance pour sa part Emmanuel Macron.

Au Liban et en Syrie, des « transitions » stratégiques

Autre crise évoquée lors du discours du chef de l’État : la situation au Liban. Le sud du pays a connu d’intenses combats entre l’armée israélienne et le Hezbollah en 2024, mais un fragile accord de cessez-le-feu a été signé fin novembre entre les deux belligérants. Des militaires français sont engagés parmi les Casques bleus de la Finul (la Force intérimaire des Nations unies au Liban) pour assurer la paix dans la région. « Nous serons là pour que le calme soit durablement rétabli le long de la ligne bleue », a ainsi promis Emmanuel Macron, en référence à ce tracé déterminé par les Nations Unies en 2000 comme une zone-tampon entre le Liban et Israël. 

L’État libanais, qui connaît une profonde crise politique et économique ces dernières années, n’a plus de président à sa tête depuis le retrait de l’ex-chef de l’État Michel Aoun du pouvoir en 2022. La France « souhaite » donc qu’un nouveau dirigeant puisse être choisi dans les prochains mois afin de mettre en place « la reprise pleine et entière d’une souveraineté libanaise ». L’ancien ministre des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, nommé en 2023 en tant qu’envoyé spécial pour le Liban du président de la République, « continue ses bons offices » pour aider à « réussir le processus politique » et « obtenir cette transition » dans le pays.

Plus au nord, la chute de régime de Bachar al-Assad, au pouvoir en Syrie depuis 2000, engendre aussi de nouveaux défis géostratégiques pour la France dans la région. « Soyons fiers de n’avoir jamais cédé à la facilité de pouvoir croire que le dictateur pouvait être réhabilité » s’est félicité Emmanuel Macron devant les ambassadeurs. Les suites données à la prise de pouvoir du chef de file islamiste Abou Mohammed al-Joulani doivent toutefois être teintées d’une « vigilance » particulière, souligne le président français. 

Le ministre des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a d’ailleurs rencontré le leader rebelle ces derniers jours à Damas, en compagnie de son homologue allemande, Annalena Baerbock, pour rappeler « les attentes » françaises quant au processus politique en cours. Pour Emmanuel Macron, pas question d’« abandonner » les alliés de la France « dans la lutte contre l’État islamique » ces dernières années dans le pays. Il cite notamment « l’ensemble des forces démocratiques syriennes » et les « combattants de la liberté comme les Kurdes ».

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