« Le temps de la paix est venu » : Emmanuel Macron annonce la reconnaissance par la France de l’État de Palestine
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« Le temps de la paix est venu » : à l’ONU, Emmanuel Macron annonce la reconnaissance par la France de l’État de Palestine

Devant les Nations Unies à New York, le président de la République a officialisé la reconnaissance par la France de l'État de Palestine. « Cette reconnaissance est la solution qui, seule, permettra la paix », a-t-il insisté à la tribune.
Guillaume Jacquot

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Il est 15 heures 21 à New York, 21 heures 21 à Paris, lorsqu’Emmanuel Macron prononce ces mots à la tribune de la salle plénière de l’Assemblée générale des Nations Unies à New York, suivsi d’applaudissements. « Je déclare que la France reconnaît aujourd’hui l’État de Palestine. » 

Après l’avoir annoncée en juin, le président de la République a donné ce 22 septembre solennellement la position de la diplomatie française, la seule voie selon lui, pour garantir la paix entre Israéliens et Palestiniens, à même de « briser le cycle de la guerre et de la destruction ». Le chef de l’Etat a d’abord insisté sur l’urgence au moment d’une nouvelle opération dévastatrice de l’armée israélienne dans la bande de Gaza, presque deux ans après le début d’un engrenage de violence né de l’attaque terroriste du 7 octobre 2023 par le Hamas.

« Nous ne pouvons plus attendre »

« Nous sommes là car le temps est venu. Le temps est venu de libérer les 48 otages détenus par le Hamas. Le temps est venu d’arrêter la guerre, les bombardements à Gaza, les massacres et les populations en fuite. Le temps est venu car l’urgence est partout. Le temps de la paix est venu, car nous sommes à quelques instants de ne plus pouvoir la saisir […] Nous ne pouvons plus attendre », a encouragé le président français devant des chefs d’Etat et de gouvernement du monde entier. A ses yeux, « le pire peut advenir » et des faits peuvent changer « de manière irréversible la situation sur le terrain ».

L’annonce intervient dans le cadre d’une conférence internationale de haut niveau « pour le règlement pacifique de la question de Palestine et la mise en œuvre de la solution des deux États », co-présidée par la France et l’Arabie Saoudite. La reconnaissance française intervient au même moment que celle du Royaume-Uni, du Canada, de l’Australie ou encore du Portugal. D’autres Etats devraient franchir le pas, par effet d’entraînement. Au total, au moins 146 pays, sur 193 Etats membres de l’ONU, ont reconnu l’Etat de Palestine. Emmanuel Macron a également admis que la responsabilité était « collective » sur l’échec jusqu’à présent d’une « paix juste et durable » au Proche-Orient. « Cette reconnaissance est une manière d’affirmer que le peuple palestinien n’est pas un peuple en trop », a-t-il déclaré.

« Rien ne justifie plus la poursuite de la guerre à Gaza »

Après avoir condamné l’attaque du 7 octobre, « la pire attaque terroriste » de l’histoire d’Israël, « une blessure encore vive », Emmanuel Macron a une nouvelle fois appelé à la libération de tous les otages. Avant d’adresser ensuite un message au gouvernement israélien : « Rien ne justifie plus la poursuite de la guerre à Gaza. Rien. Tout commande au contraire d’y mettre un terme définitif, maintenant, à défaut de l’avoir fait plus tôt pour sauver des vies. »

Critiqué aussi bien à Tel Aviv qu’à Washington pour son geste diplomatique du jour, le président français a répondu à son homologue américain qui, quelques heures plus tôt, avait signifié que les nouvelles reconnaissances de l’État de Palestine étaient une « récompense pour le Hamas ». « Jamais la France n’a manqué à Israël quand sa sécurité était en jeu, y compris face aux frappes iraniennes. Cette reconnaissance de l’Etat de Palestine est une défaite pour le Hamas comme pour tous ceux qui attisent la haine antisémite, nourrissent des obsessions antisionistes et veulent la destruction de l’Etat d’Israël », s’est défendu Emmanuel Macron à la tribune des Nations Unies.

Une reconnaissance qui « ouvre le chemin d’une négociation utile aux Israéliens comme aux Palestiniens »

Emmanuel Macron s’est ensuite référé à la résolution, adoptée par une large majorité d’Etats membres de l’ONU, un « plan de paix et de sécurité » pour la mise en œuvre de la solution à deux Etats. « Cette reconnaissance ouvre le chemin d’une négociation utile aux Israéliens comme aux Palestiniens […] Il nous appartient maintenant ensemble de déclencher une mécanique de paix répondant aux besoins de chacun », a-t-il appelé.

« L’urgence absolue » est « celle de coupler la libération des 48 otages et la fin des opérations militaires sur tout le territoire de Gaza », a-t-il insisté, avant de souligner la nécessité de démanteler le Hamas « sur le plan politique » puis les besoins de secours à Gaza.

Quant à la phase plus longue de la « stabilisation et de la reconstruction à Gaza », le président de la République a offert l’aide de la France dans la création d’une mission internationale de stabilisation et dans la formation des forces de sécurité palestiniennes. Emmanuel Macron a également rappelé que cette phase de reconstruction passerait aussi par « un cadre d’expression démocratique renouvelé et sécurisé » de l’Etat palestinien. « La France sera attentive à la pleine mise en œuvre de chacun des engagements pris auprès d’elle », a-t-il fait savoir, prenant à témoin l’Assemblée des promesses faites par Mahmoud Abbas, le président de l’Autorité Palestinienne, qui assistait à l’événement à distance.

« J’entends avec beaucoup de respect le peuple israélien, sa tristesse et sa fatigue. Et je veux croire que les autorités israéliennes l’entendront également et sauront s’engager à leur tour », a-t-il également ajouté, s’exprimant à nouveau en direction du gouvernement de Benjamin Netanyahou.

Une ambassade française sous une double condition

Emmanuel Macron a par ailleurs souligné, et c’était attendu, que la France déciderait d’établir une ambassade auprès de l’Etat de Palestine, mais à une double condition : « que tous les otages détenus à Gaza » soient libérés et qu’un cessez-le-feu soit établi.

Et de conclure par cette anaphore : « Le temps est venu d’arrêter la guerre à Gaza, les massacres, la mort. Tout de suite. L’urgence nous le commande. Le temps est venu pour Israël de vivre en paix et en sécurité, de la Galilée à la mer Rouge par la mer Morte, par le lac de Tibériade et par Jérusalem. Le temps est venu de ne plus discuter nulle part l’existence d’un État d’Israël et d’en faire une évidence. Le temps est venu de rendre justice au peuple palestinien et ainsi de reconnaître un Etat de Palestine, frère et voisin, à Gaza et en Cisjordanie et par Jérusalem. Le temps est venu de chasser de ces terres le visage hideux du terrorisme et de bâtir la paix. »

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