People Line The Street Before The Funeral Of Slain Hostage Hersh Goldberg-Polin
People hold the Israeli national flag along the street as the family of murdered American-Israeli hostage Hersh Goldberg-Polin's family drives to his funeral in Jerusalem, on Monday, September 2, 2024. Photo by Debbie Hill/ UPI Photo via Newscom/upiphotosthree025262/UPI/Newscom/SIPA/2409021616

Manifestations en Israël : Benyamin Netanyahou se livre à « une véritable course contre la montre »

Après la découverte des corps de six otages israéliens détenus par le Hamas, une grève générale a été décrétée dans le pays. Les manifestants demandent la reprise des négociations, en vue de la libération des dizaines d’otages encore prisonniers dans la bande de Gaza. Sous pression, « Benyamin Netanyahou a besoin de la poursuite des combats », explique l’historien Pierre Razoux.
Rose-Amélie Bécel

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Samedi 31 août, les corps de six otages retenus par le Hamas ont été retrouvés dans un tunnel du sud de la bande de Gaza. Un nouveau drame qui accentue la pression sur le Premier ministre Benyamin Netanyahou, sommé par une large partie de la population israélienne de poursuivre les négociations en vue de la libération des otages. Selon un décompte de l’AFP, sur les 251 personnes enlevées le 7 octobre, 97 se trouvent toujours dans la bande de Gaza, dont 33 déclarées mortes par l’armée.

300 000 manifestants à Tel-Aviv

Après une soirée de manifestations dans plusieurs villes de l’État hébreu ce dimanche 1er septembre, un appel à la grève générale a été lancé par Histadrut – la principale centrale syndicale israélienne – pour ce lundi. Un appel suivi par plusieurs municipalités et entreprises, entrainant la fermeture de nombreux établissements scolaires et perturbant les services de transport.

« Cette mobilisation a été un succès hier, avec près de 300 000 manifestants dans les rues de Tel-Aviv. Aujourd’hui, c’est plus modéré. La grève est suivie dans les villes traditionnellement de gauche comme Tel-Aviv et Haïfa, mais complètement ignorée dans les villes de droite comme Jérusalem », constate Pierre Razoux, directeur académique de la Fondation méditerranéenne d’études stratégiques et auteur de Tsahal, nouvelle histoire de l’armée israélienne (Tempus, Perrin). Le tribunal israélien du Travail, situé à Tel-Aviv, a par ailleurs ordonné la fin immédiate de la grève.

L’élimination du chef du Hamas Yahya Sinwar en ligne de mire

De son côté, malgré une mobilisation de plus en plus forte de la société civile, Benyamin Netanyahou semble rester inflexible. « Quiconque assassine des otages ne veut pas d’accord », a-t-il déclaré peu après la découverte des six corps dans la bande de Gaza, promettant de « régler son compte » au Hamas. Un discours guerrier qui intervient alors que l’armée israélienne a lancé, depuis le 28 août, une vaste opération en Cisjordanie, visant à neutraliser les milices palestiniennes dans le territoire.

« Benyamin Netanyahou a besoin de la poursuite des combats pour se prévaloir d’un bon bilan militaire si un cessez-le-feu venait à s’imposer. Dans le narratif, il faut qu’il soit en position de pouvoir dire à la population “nous avons atteint nos objectifs” », explique Pierre Razoux. Pour l’historien, le Premier ministre israélien se livre ainsi à « une véritable course contre la montre » visant à affaiblir autant que possible le Hamas, avec pour objectif central l’élimination de leur chef Yahya Sinwar, pour le moment introuvable.

« Benyamin Netanyahou joue sa survie politique, mais aussi personnelle »

Si le Premier ministre de l’État hébreu persiste dans le rejet des négociations, c’est également pour des raisons politiques, tant son gouvernement de coalition semble fragile. Début juin, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir et le ministre des Finances Bezalel Smotrich – tous deux issus de partis politiques d’ultra-droite – ont menacé de démissionner si le chef de l’exécutif acceptait l’accord de cessez-le-feu présenté par les États-Unis.

Sans leur soutien, le Premier ministre se retrouverait grandement fragilisé. « Beaucoup de choses pourraient faire craquer cette coalition et conduire le Premier ministre à se retrouver en minorité », analyse Pierre Razoux, « les deux ministres sont sur une ligne très dure, la moindre concession sur les colonies, sur un minimum de pouvoir conféré aux Palestiniens, pourrait être un motif de rupture. » Dans la gestion du conflit avec le Hamas, « Benyamin Netanyahou joue sa survie politique, mais aussi personnelle », ajoute l’historien. Deux destins intimement liés car « le jour suivant son départ du poste de Premier ministre, plusieurs procès l’attendent ».

Dans ce contexte, alors que les dernières négociations pour un cessez-le-feu tenues au Caire se sont soldées par un échec, les États-Unis tentent de relancer les discussions. Joe Biden accuse Benyamin Netanyahou de ne pas en faire assez pour parvenir à un accord et a annoncé ce 2 septembre réunir les négociateurs américains pour discuter « des efforts pour arriver à un accord qui assurera la libération des otages restants ». Une perspective qui semble pour le moment bien lointaine, trois des six corps retrouvés ce samedi faisaient parti d’un groupe de 30 otages dont les États-Unis proposaient la libération dans le cadre des négociations entre Israël et le Hamas.

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