Une guerre de communication s’est engagée depuis plusieurs heures entre Israël et le Hamas, après le bombardement mardi soir d’un hôpital dans la bande de Gaza, qui aurait fait entre 200 et 500 morts selon différentes sources palestiniennes. Le Hamas accuse Tsahal, l’armée israélienne, d’être à l’origine du tir. Mais l’Etat hébreu renvoie la responsabilité sur le jihad islamique palestinien, un groupe armé particulièrement actif dans la zone. « Les preuves, que nous partageons avec vous tous, confirment que l’explosion dans un hôpital de Gaza a été causée par le tir d’une roquette du jihad islamique ayant échoué », a déclaré un porte-parole de l’armée israélienne lors d’une conférence de presse.
En visite en Israël ce mercredi, le président américain Joe Biden s’est dit « indigné et profondément attristé par l’explosion », apportant son soutien à la version israélienne : « Sur la base de ce que j’ai vu, il apparaît que cela a été mené par la partie adverse, pas par vous », a déclaré le locataire de la Maison Blanche pendant un point presse à Tel-Aviv, aux côtés du Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou.
Un mouvement terroriste d’inspiration iranienne
Le Mouvement du jihad islamique palestinien, parfois désigné par l’acronyme MJIP, est né dans la bande de Gaza au début des années 1980. Ses fondateurs, un groupe d’étudiants dont le plus connu est Fathi Shiqaqi, un Palestinien formé à la médecine en Egypte, ont longtemps côtoyé les Frères musulmans avant de s’en détacher, préférant une approche plus radicale. En parti inspiré par le modèle iranien et la révolution de 1979, Le jihad islamique palestinien lutte pour la création d’un Etat islamique palestinien sur le territoire de la Palestine historique, ne reconnaissant pas le plan de partage de 1948. Il a donc fait de l’Etat hébreu son principal adversaire.
À la différence du Fatah, le parti nationaliste fondé par Yasser Arafat, et du Hamas, qui dirige la bande de Gaza depuis 2007 et a lancé l’attaque surprise du 7 octobre dernier, le jihad islamique palestinien ne s’est jamais véritablement investi sur la scène politique et n’a pratiquement jamais participé à des élections, hormis les législatives de 1996. Il œuvre essentiellement sur le terrain de la lutte armée, à travers les brigades Al-Qods, fondée en 1992. Le mouvement est considéré comme une organisation terroriste par Israël, l’Union européenne et la plupart des pays occidentaux, dont les Etats-Unis et le Royaume-Uni.
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Electron libre de l’islamisme
« Le MJIP est un mouvement à l’héritage idéologique pluriel, voire ‘hétéroclite’ qui échappe aux catégories classiques des mouvements islamistes régionaux. Tout en revendiquant un ancrage territorial palestinien sunnite, le mouvement ne cache pas sa fascination pour le chiisme révolutionnaire incarné par l’Iran ou encore pour la lutte que mène le Hezbollah au Liban contre Israël », résume François Ceccaldi, chercheur au Collège de France, spécialiste du monde arabe, dans un article pour la revue La vie des idées.
Le MJIP a connu au cours de son histoire de nombreuses scissions, qui ont parfois été avalées par ses concurrents politiques, comme l’Organisation de libération de la Palestine (OLP). La notoriété du mouvement au sein des populations arabes s’est sensiblement renforcée durant la première Intifada (1987 -1993), un soulèvement populaire à l’intérieur de la bande de Gaza contre l’occupant israélien. Il a pu être un allié de circonstance pour d’autres organisations propalestiniennes, tantôt pour le Fatah, tantôt pour le Hamas, sans jamais véritablement tomber dans le giron de l’une ou l’autre.
Attentats suicides et tirs de roquettes
Le jihad islamique palestinien a rejeté les accords d’Oslo de 1993, qui posent les bases d’une résolution du conflit israélo-palestinien, et s’est engagé à la même période dans une vague d’attentats suicides, notamment contre les colonies juives installées à Gaza. Il déploie une stratégie de l’escalade, misant à la fois sur un soulèvement populaire et une contagion du conflit aux pays voisins. Ces dernières années, il a été rendu responsable de nombreux tirs de roquettes à destination d’Israël, notamment en mai dernier, après la mort de l’un de ses leaders dans une prison israélienne.
Le mouvement est dirigé depuis 2018 par Ziyad al-Nakhalah, un ancien militant du Front de libération arabe, condamné à la prison à vie par l’Etat hébreu. Selon le Conseil européen pour les relations internationales (ECFR), les activités du MJIP sont principalement financées par l’Iran.