Zelenskyy Meets Von Der Leyen In Brussels Ahead Of High-Stakes Trump Talks
August 17, 2025: Ukrainian President Volodymyr Zelenskyy addresses the press alongside European Commission President Ursula von der Leyen in Brussels, Belgium, Sunday, 17.08.2025. Zelenskyy affirms that the United States fully supports Ukraine and dismisses RussiaÃ?s territorial demands as unrealistic and impossible to fulfill. Photo by Wiktor Dabkowski (Credit Image: © Wiktor Dabkowski/ZUMA Press Wire)/SIPA60046842_000016/ZEUS/2508171538

Rencontre Trump-Zelensky : « En refusant de mettre la pression sur les Russes, les Américains biaisent la négociation » 

Ce lundi soir Volodymyr Zelensky, accompagné de plusieurs dirigeants européens dont Emmanuel Macron s’entretient à Washington avec Donald Trump à la suite du sommet américano-russe avec Vladimir Poutine. Les discussions sur le règlement de la guerre en Ukraine s’annoncent houleuses. 
Stephane Duguet

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Après le président de la Russie Vladimir Poutine reçu en grandes pompes vendredi 15 août par Donald Trump à Anchorage en Alaska, le président américain échange ce soir à Washington avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky pour tenter de trouver une issue à la guerre en Ukraine. Les deux chefs d’Etats s’entretiendront à 19h avant d’élargir les discussions à 21h avec une délégation européenne composée du président français Emmanuel Macron, du chancelier allemand Friedrich Merz, de la Première ministre italienne Giorgia Meloni, du Premier ministre britannique Keir Starmer, du président finlandais Alexander Stubb, du chef de l’Otan Mark Rutte et de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen.

Les Européens se réuniront avec Volodymyr Zelensky avant de se rendre à la Maison Blanche où ils soutiendront le président ukrainien dans sa demande de « garantie de sécurité » si un accord sur la fin de la guerre était trouvé. Retour sur les enjeux de ces échanges avec Ulrich Bounat, analyste géopolitique spécialiste de l’Europe centrale et de l’est, chercheur associé chez Eurocreative.

Ce soir, Volodymyr Zelensky retourne à la Maison Blanche pour un premier rendez-vous seul à seul avec Donald Trump avant d’être entouré de plusieurs dirigeants européens. Est-ce qu’il peut revivre la séquence humiliante du 28 février quand Donald Trump l’avait attaqué verbalement en direct devant les caméras de télévision ? 

On ne peut pas complètement l’exclure parce que l’administration américaine pose quand même petit à petit, par petites touches, depuis hier, les bases d’un certain nombre de concessions exigées de la part de l’Ukraine. Certaines sont plus difficiles que d’autres. Par exemple lorsque Donald Trump exclut une entrée de l’Ukraine dans l’OTAN. Ça, je pense que les Ukrainiens l’ont bien compris depuis un certain temps donc ce n’est pas si important. En revanche, lorsque Donald Trump parle de concessions territoriales, là ça devient beaucoup plus compliqué, notamment si cela passe par la reconnaissance de la capture de certains territoires par la Russie, s’il s’agit de faire sortir l’armée ukrainienne de zones pour les donner à la Russie. Dans ces conditions, je pense que c’est inacceptable d’autant plus que les contreparties éventuelles évoquées par Donald Trump, à savoir des garanties de sécurité, sont quand même extrêmement floues. Mais cette fois, Volodymyr Zelensky arrive en force avec le soutien des Européens justement pour éviter la catastrophe du 28 février.

Est-ce que la présence des dirigeants européens est vraiment de nature à changer l’atmosphère des échanges ? 

Il y aura d’abord un tête-à-tête entre le président ukrainien et Donald Trump. Volodymyr Zelensky sait qu’il n’aura pas un allié face à lui et qu’il va trouver un Donald Trump qui veut obtenir un résultat le plus rapidement possible quitte à lui tordre le bras. Je trouve inquiétantes ses dernières déclarations sur son réseau social où il dit que c’est à Volodymyr Zelensky de mettre fin à la guerre. Je rappelle quand même qu’il y a un agresseur et un agressé. Si on veut arrêter la guerre, c’est plutôt sur l’agresseur, la Russie, qu’il faudrait mettre la pression.

En février, les Américains voulaient un résultat rapide donc ils se sont alignés sur les positions du plus fort, les Russes et ont tordu le bras aux plus faibles, les Ukrainiens. La différence avec aujourd’hui c’est que Volodymyr Zelensky était seul et sans doute pas préparé. Il est probable qu’effectivement ça ne se passe pas super bien mais que ce ne soit pas une catastrophe. D’autant plus que je n’imagine pas Donald Trump recevoir les Européens après avoir humilié Volodymyr Zelensky. Quand je dis qu’il ne faut quand même pas exclure ce scénario, c’est parce que la scène du 28 février n’avait rien de spontanée. C’était un mode opératoire qu’il a répété ensuite avec le président sud-africain. Mais si ça venait à arriver et qu’il ne recevait pas ensuite les dirigeants européens, ça montrerait une crise dans la relation transatlantique voire une rupture de la relation et pour Donald Trump ce serait aller trop loin.

Au-delà du rôle éminemment symbolique que jouent les Européens à Washington en accompagnant Volodymyr Zelensky, à quoi sert leur présence ? 

Ils viennent avec des idées et des propositions concrètes notamment sur les garanties de sécurité. Donald Trump dit qu’il veut la paix, il a ouvert la porte à une garantie de sécurité. Les Européens sont d’accord pour négocier le fond des choses, pour négocier la paix, l’architecture de sécurité en Europe, les garanties de sécurité. C’est une façon d’essayer de coincer Donald Trump tout en lui donnant raison. Cette approche est intéressante parce qu’il faut aller dans son sens tout en obtenant des concessions de sa part. C’est une manière pour les Européens d’avoir une place à la table des négociations mais aussi d’obtenir des garanties de sécurité pour l’Ukraine sans lesquelles ça va être très compliqué pour les Ukrainiens de faire des concessions majeures. Pour Kiev, ces garanties de sécurité doivent les assurer que la guerre ne reprendra pas comme après les accords de Minsk.

Justement comment faire accepter ces garanties de sécurité à la Russie et s’assurer qu’elles seront efficaces ? 

La question montre toutes les difficultés causées par la position américaine. En refusant de mettre la pression sur les Russes, les Américains biaisent la négociation. Poutine n’a pas changé d’objectif, il veut capitulation Ukraine politiquement et militairement. Mais dans le cadre de la négociation, Donald Trump pourrait mettre la pression sur Russie. En ne le faisant pas, il s’autocoince parce que Vladimir Poutine ne les acceptera pas de bonté de cœur. Si le président américain veut vraiment arriver à arracher un accord à Volodymyr Zelensky, il faudra lui donner des garanties de sécurité.

Quand on parle de garanties de sécurité, cela concerne une police aérienne, un renforcement de l’armée ukrainienne, un déploiement de forces occidentales à l’arrière dans certaines villes comme Kiev ou Odessa. Il s’agit aussi d’instructeurs, de sapeurs ou encore de démineurs. Emmanuel Macron parle d’un « signalement stratégique ».

Sur les négociations d’une fin de conflit, que peuvent encore arracher les Européens à Donald Trump aujourd’hui ? 

Il y a quand même un consensus général sur le fait que la ligne de front va servir de ligne de démarcation entre l’Ukraine et la Russie. Mais Vladimir Poutine a une exigence particulière sur le nord de l’Oblast de Donetsk et c’est le point de contention. Sur le reste, les Russes savent qu’ils ne peuvent pas prendre les villes de Zaporijia et de Kherson et qu’ils ne peuvent pas traverser le Dnipro. Les Ukrainiens savent aussi que la Crimée est hors limite. Les villages pris entre l’Oblast de Soumy et l’Oblast de Koursk, stratégiquement ça n’a aucune valeur. Là-dessus on peut sûrement trouver un accord. En revanche, le point rajouté par les Russes sur les villes de Slaviansk et Kramatorsk, les 30 % de l’Oblast de Donetsk encore sous contrôle de l’Ukraine, c’est un point très dur. S’ils l’acceptaient, ce serait une demi-capitulation pour les Ukrainiens et Vladimir Poutine l’a sûrement ajouté justement pour avoir du poids dans la négociation.

On lit beaucoup que dans ces négociations, les Européens sont faibles. Est-ce que vous partagez cette analyse ? 

C’est compliqué. Je dirais oui dans un sens car les Américains et les Russes aimeraient pouvoir s’entendre sur le dos des Européens. Le fait qu’ils n’y soient pas arrivés montre que les Européens arrivent quand même à peser dans les négociations quand bien même ils ne sont pas à la table des discussions. Rappelons que le premier partenaire économique des Etats-Unis, c’est l’Europe. Le fait que Trump et Poutine ne soient pas arrivés à un accord s’explique parce que Trump estime qu’il ne peut pas s’aliéner complètement les Européens. S’il faut une garantie de sécurité gérée par les Européens, il faut qu’ils soient à la table des négociations pour parler de cela. L’Europe a un certain nombre de leviers sur les Américains et les Russes parce que nous avons les sanctions les plus dures. Mais nous avons tardé à les utiliser, parce qu’à 27, c’est compliqué d’user du ton de la fermeté géopolitique.

 

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