Taxes sur les petits colis asiatiques : « On est complètement à côté de la plaque », déplore le président de la CPME

Les importants droits de douane imposés par les États-Unis à la Chine font craindre un report d’une partie des exportations de Pékin vers le marché européen. Mardi 29 avril, le gouvernement a proposé la mise en place de « frais de gestion » pour chaque petit colis en provenance de Chine. Pas suffisant, selon la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME). Interrogé au Sénat, son président, Amir Reza-Tofighi, a pointé une mesure « complètement à côté de la plaque ».
Théodore Azouze

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Une autre conséquence des droits de douane américains. La guerre commerciale lancée par Donald Trump fait craindre à de nombreux acteurs un effet secondaire majeur pour les entreprises françaises. Ils redoutent l’arrivée de nouveaux produits asiatiques, en particulier venus de Chine, sur le marché européen. Pékin subit les plus importantes surtaxes de la part des États-Unis, atteignant 145% pour la plupart de ses secteurs. La menace d’une concurrence déloyale, avec des biens ne respectant pas nécessairement l’ensemble les normes fixées par l’UE, effraie ainsi les marques françaises et européennes.

Pour anticiper l’intensification de ce flot de marchandises, le gouvernement a proposé mardi 29 avril la mise en place d’« un petit montant forfaitaire sur les colis » venus d’Asie, à partir de 2026. Des « frais de gestion », à hauteur de « quelques euros » par colis ou de « quelques dizaines de centimes par article », selon la ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin. L’objectif ? Financer le renforcement à venir des contrôles douaniers sur ces envois. « On est complètement à côté de la plaque », a fustigé, quelques heures après cette annonce, le président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), Amir Reza-Tofighi. 

Temu et Shein déjà régulièrement mis en cause

Intervenant lors d’une table ronde au Sénat sur les répercussions de la guerre commerciale pour les entreprises françaises, le responsable juge la mesure loin d’être suffisante, mais aussi bien trop tardive. Les géants chinois de la fast-fashion Temu et Shein sont aujourd’hui déjà régulièrement mis en cause pour la conséquence de leur activité sur les petits magasins. « Il nous faut deux ans pour faire supprimer l’exemption douanière et [aujourd’hui] on met des frais de quelques euros », expose le patron de la CPME, en référence à l’exonération douanière accordée par Bruxelles à ces petits colis. « Dans deux ou trois ans, on va faire une commission d’enquête pour savoir pourquoi on a tué notre commerce en France, si on n’est pas capable de prendre des décisions rapides et impactantes »

Sans saluer sa politique commerciale de manière générale, Amir Reza-Tofighi estime que Trump « a su prendre des décisions rapides sur ce point-là ». Le milliardaire républicain a signé un décret au début du mois d’avril pour multiplier par trois les droits de douane contre ces petits colis. Dans un communiqué publié un peu plus tard mardi, la CPME a par ailleurs regretté que le gouvernement « ne semble pas prendre la pleine mesure » de la situation. « Notre commerce est en passe d’être submergé par un afflux inédit de marchandises à bas coût produites dans un cadre ne respectant ni nos règles sociales, ni nos exigences environnementales, ni nos standards de qualité et de sécurité du consommateur », souligne l’organisation. 

Quelles solutions apporter à cet important enjeu commercial ? La structure patronale préconise « la mise en place d’une taxe forfaitaire de 25 euros sur chaque colis de moins de 150 euros en provenance de pays hors UE ». Mais aussi « la révision urgente des seuils d’exemption douanière au niveau européen, sans attendre 2028 ». Enfin, la CPME appelle aussi à des « contrôles effectifs » renforcés sur ces produits asiatiques. Au total, environ 4,6 milliards de colis d’une valeur inférieure à 150 euros ont été envoyés à l’intérieur des frontières européennes en 2024, dont 91% venus de Chine.

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