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Republican presidential nominee former President Donald Trump points to the crowd at an election night watch party, Wednesday, Nov. 6, 2024, in West Palm Beach, Fla. (AP Photo/Julia Demaree Nikhinson)/NYSS582/24311286952542//2411060918

Vers une trêve au Moyen-Orient ? En tant que président américain, « Donald Trump pense qu’on peut régler tous les problèmes du monde en claquant des doigts »

Après une riposte de Téhéran la veille sur une base américaine au Qatar, Donald Trump a annoncé lundi un « cessez-le-feu complet et total » entre l’Iran et Israël. Mais le président américain s’est montré irrité après que « les deux camps » ont selon lui « violé le cessez-le-feu ». La paix est-elle vraiment une perspective proche au Moyen-Orient ? Réponse avec Adel Bakawan, chercheur associé à l’Institut français des relations internationales (IFRI).
Théodore Azouze

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Il souhaite s’afficher en faiseur de paix au Moyen-Orient. Après avoir « remercié » Téhéran pour sa riposte jugée « très faible » contre une base américaine au Qatar lundi, Donald Trump a informé que l’Iran et Israël avaient accepté « un cessez-le-feu complet et total ». 12 jours après le début des hostilités militaires entre les deux pays, le 13 juin, ce dernier s’est montré dans sa déclaration particulièrement optimiste. « C’est une guerre qui aurait pu durer des années et détruire tout le Moyen-Orient, mais ce n’est pas le cas et ce ne sera jamais le cas ! », a poursuivi le président américain, dans un message posté sur son réseau Truth Social. 

Pour lui, la situation est désormais claire : les frappes américaines sur trois des principaux sites du programme nucléaire iranien, samedi, ont permis la possibilité d’un arrêt des bombardements entre Israël et l’Iran. Mais la nuit qui a suivi l’annonce de Donald Trump a été marquée par de nouvelles salves de frappes de part et d’autre. D’après Israël, celles lancées par la République islamique se seraient poursuivies après l’officialisation du cessez-le-feu. L’État hébreu a alors promis en riposte de « poursuivre les opérations intensives visant les actifs du régime et les infrastructures terroristes à Téhéran ».

Donald Trump « pas content » d’Israël, ni de l’Iran

De quoi irriter fortement Donald Trump, qui s’est entretenu par téléphone avec le Premier ministre israélien Benyamin Netanyahou ce mardi. « Israël, dès que nous avons trouvé un accord, ils sont sortis et ont lâché beaucoup de bombes, je n’en ai jamais vu autant, je ne suis pas content d’Israël », s’est agacé devant la presse le milliardaire républicain. « Donc je ne suis pas content d’eux. Je ne suis pas content de l’Iran, mais je ne suis vraiment pas content d’Israël. » Finalement, après le coup de fil entre les deux dirigeants, le pouvoir israélien a indiqué « s’être retenu » cette nouvelle série de frappes.

Ces dernières frappes témoignent en tout cas d’une grande fragilité du cessez-le-feu, « désormais en vigueur » selon le locataire de la Maison-Blanche. « Donald Trump est très pressé, ça fait partie de sa personnalité », explique à Public Sénat Adel Bakawan, chercheur associé au programme Turquie/Moyen-Orient de l’Institut français des relations internationales (IFRI). « Et puis : il a une illusion, il pense qu’en étant à la tête de la première puissance du monde, on peut régler tous les problèmes en claquant les doigts. Seulement, les réalités sociales, politiques, géopolitiques sont tellement complexes ! »

Anti-interventionniste revendiqué, Donald Trump déclarait encore mi-mai que son rôle consistait à « mettre fin aux conflits, pas à les commencer ». Fidèle à ce précepte, une partie de sa base du mouvement « Make America Great Again » (MAGA) se montrait réticente à toute action militaire en Iran. Pas question donc pour le président américain de donner l’impression de vouloir entraîner les États-Unis dans une spirale guerrière au Moyen-Orient. Or, cette opération militaire américaine dorénavant menée, Washington se retrouve de fait encore plus lié au développement du conflit entre Israël et Iran. 

Une trêve bienvenue pour l’Iran

Comment pourraient réagir ces deux puissances dans les prochains jours ? Pour Téhéran, une trêve semble bienvenue. « L’Iran n’a aucun vraiment aucun intérêt à ne pas respecter ce cessez-le-feu », souligne Adel Bakawan. « Ce cessez-le-feu proposé par Donald Trump, c’est un gilet de sauvetage énorme pour la République islamique, qui, jusqu’à hier, se battait avec le monde pour sauver son programme nucléaire. Mais aujourd’hui, au moment où on se parle, ils se battent pour sauver le régime. Celui-ci est profondément fragilisé. » Avec de nombreux dégâts causés sur ses infrastructures militaires, d’importants chefs du pouvoir éliminés et des centaines de morts à déplorer, l’Iran apparaît aujourd’hui au pied du mur. 

Sur la scène internationale, ses soutiens demeurent faibles. Depuis les attaques terroristes meurtrières du Hamas le 7 octobre 2023 en Israël, les principaux groupes liés du régime ont été considérablement affaiblis, en particulier par les opérations conduites par l’armée israélienne. Outre le mouvement islamiste palestinien, le Hezbollah a été décimé par les frappes de l’État hébreu. En Syrie, Bachar al-Assad, son principal allié, a quant à lui été renversé au mois de décembre. Quant à ses autres soutiens… « La Chine, la Russie, le Pakistan, la Turquie : tout reste à l’échelle de condamnations », pointe Adel Bakawan. « L’Iran est seul. »

Israël, la tentation du jusqu’au-boutisme

Dans ce contexte, Israël pourrait à long terme ne pas se contenter d’une persistance du régime des mollahs. Ces derniers jours, le ministre de la Défense du pays, Israel Katz, a assumé viser des « organismes gouvernementaux chargés de la répression ». Cohérent à sa politique jusqu’au-boutiste et poussé par ses alliés d’extrême-droite, le Premier ministre israélien pourrait être tenté de porter un coup fatal au pouvoir en place à Téhéran. « Benyamin Netanyahou ne dit pas la vérité lorsqu’il dit que la totalité des objectifs fixés est atteinte », estime Adel Bakawan. « Israël, partiellement, a gagné la guerre, mais pas définitivement, mais pas totalement. »

Donald Trump, attendu dès ce mardi au sommet de l’Otan à La Haye (Pays-Bas), rediscutera de l’ensemble de ces dossiers avec ses alliés de l’Alliance atlantique. En difficulté pour imposer leur voix à l’international, les Européens soutiennent le projet de cessez-le-feu américain entre Israël et l’Iran. Régulièrement critique de l’organisation, le président américain évoquera par ailleurs un autre conflit dont avait aussi promis de mettre un terme : la guerre en Ukraine. Pendant que le Moyen-Orient s’enflammait ces dernières semaines, Moscou a multiplié les frappes sur différentes villes ukrainiennes. Une série de bombardements russes a encore fait 11 morts ce mardi dans la région de Dnipropetrovsk, au centre-est du pays.

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